dimanche 31 janvier 2010

Mother, de Joon-ho Bong (Corée du Sud, 2010)

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Note :
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« Mother » est un film vraiment étonnant et inattendu. On y suit l’itinéraire d’une mère dont le grand fils attardé aurait commis un meurtre : celui de la pute du quartier, si l’on puit dire. Face
à un système judiciaire expéditif, pressé de classer l’affaire en jetant son fils en prison, la mère va elle-même mener l’enquête et s’acharner surtout à tout faire pour innocenter son fils et le
sortir de sa geôle… y compris l’irréparable ! Car au fond, c’est bien connu lorsque l’on s’attaque à un être cher, peu importe la vérité : seul le bien de l’être aimé doit compter !

Il y a vraiment des plans surprenants dans « Mother » : un personnage étrangement coupé à la taille par la pelouse au milieu d’un terrain de golf, la mère filmée en plongée dans un cimetière formé
de nombreux cercles surélevés… L’esthétique du film est très soigné et vraiment original ; on y décèle la main d’un grand cinéaste : Joon-ho Bong nous livre une mise en scène puissante et subtile
pour un film à l’histoire souvent déroutante…

Le personnage du fils, débile léger, semble maintenu dans son état fragile par une mère possessive et ultra protectrice, toujours derrière lui, guidée par un amour exacerbé… Elle fait encore dormir
son fils dans son lit, celui-ci y prenant d’ailleurs une posture fœtale, comme un gros bébé, un enfant qui n’a jamais vraiment quitté le ventre de sa génitrice. Cette relation aux frontières de
l’inceste est décrite tout en douceur par le cinéaste, sans démonstration trop appuyée, ce qui rend le film bien plus intrigant encore…

Un autre thème fort du film passe par le rapport à la mémoire. Le fils semble prisonnier d’une amnésie quasiment permanente et se frotte frénétiquement les tempes lorsqu’il veut essayer de
retrouver la mémoire : des images lui reviennent alors, pas forcément les bonnes, pas forcément aux bons moments… La mère, elle, s’acharne à retrouver la mémoire du fils de son côté, mais
lorsqu’elle y est confrontée, la voyant dans toute sa cruelle vérité, elle va tout faire pour l’effacer à nouveau, pour rendre la liberté à son enfant en maintenant l’état d’amnésie et en
transformant surtout la vérité… La mère devient elle-même criminelle, mais évitera d’y penser encore une fois que les choses seront rentrées dans l’ordre, parce que seul l’oubli possède une vertu
cathartique à ses yeux, pour le meilleur mais surtout pour le pire, dans la mesure où des innocents devront payer… Cette femme monstrueuse est semble-t-il l’incarnation d’un Etat coréen qui oublie
volontairement des pans entiers de sa sombre et terrible Histoire !

Malgré quelques longueurs, « Mother » est un film éclatant ! La noirceur et l’atmosphère assez glauque y est contrebalancée par un humour souvent décalé et salvateur. Un humour parfois très noir,
vous l’aurez compris : la scène où le fils tue la jeune fille, puis s’approche du corps étendu, se penche vers elle pour lui dire qu’il ne faut pas traîner par terre, demeure quand même un moment
assez extraordinaire…






























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4 commentaires:

  1. j'ai vu la critique sur le nouvel obs mais ton texte est beaucoup plus fort.
    Bonne soirée

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  2. LE film que j'ai le plus envie de voir en ce moment !

    J'ai absolument et immensément adoré Memories of murder et The Host et les quelques extraits que j'ai pu voir de celui ci me laisse à penser qu'il y a du génie chez ce cinéaste !!!

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  3. j'ai tout simplement adoré ce film !

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