jeudi 30 septembre 2010

Martyrs, de Pascal Laugier (France, Canada, 2008)



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Note :
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A l’époque de sa sortie en France, « Martyrs » a bien failli se voir attribuer le label peu courant de « film interdit au moins de 18 ans » mais non pornographique, qui avait été créé tout
spécialement à l’occasion du film « Baise-moi » de Virginie Despentes en 2000. Bon, c’est vrai que le film de Pascal Laugier fait preuve d’une rare violence visuelle (spécialement dans le cinéma
francophone), mais franchement, à bien y regarder, il n’y avait pas de quoi fouetter un chat errant !

Reconnaissons d’abord à « Martyrs » le mérite d’avoir percé une brèche dans le cinéma de genre français, tout particulièrement celui du « gore sadique » ! Il possède une efficacité et une fureur
peu commune dans sa mise en scène, qui permet d’en mettre plein la vue à ses spectateurs : tueries en série, jeux d’ombre, séquestration, écorchage humain, alliage de métal et de chair à la
Cronenberg… Tout y passe, et c’est plutôt réjouissant pour l’amateur d’horreur cinématographique ! Pascal Laugier avoue d’ailleurs avoir voulu interroger toute cette violence, osant même un
discours pseudo ontologique : « Je voulais que chaque coup soit douloureux, non par quelque discours moral sur la représentation de cette violence, mais parce que c'est le sujet même du film : au
bout, tout au bout de la violence, est-ce qu'il y a quelque chose ? Je crois qu'au fond, c'est le genre de questions que posent tous les films d'horreur que j'aime ; en quoi et pourquoi la
condition humaine est-elle aussi atroce ? » Sauf que le film révèle très vite ses défauts, et autant le dire tout de suite, ce n’est pas très joli joli à voir, à l’image des scènes de tortures
épouvantables que le réalisateur nous donne à regarder…

D’abord, la construction même du film est bancale… Il cherche à commencer très fort et très vite, avec l’enfance volée de l’une des héroïnes, puis tout de suite après toute une série de meurtres
fulgurante, résultat de la vengeance de la jeune fille quinze ans plus tard sur ceux qui lui ont fait tout ce mal quand elle était petite… Forcément, après tout ça, le souffle retombe et le film
est contraint de partir dans une autre direction pour se donner une contenance, ce qui lui confère un aspect boiteux, comme si une autre histoire venait se plaquer artificiellement à la première…
Plutôt mal fichu dans sa structure, « Martyrs » perd en outre une cohérence d’ensemble qui aurait pourtant pu lui être salutaire…

Mais ce n’est pourtant pas le moindre de ses défauts, hélas ! Laissant présager pour commencer une banale histoire de vengeance contre les kidnappeurs de la jeune fille devenue complètement
folle, le film s’aventure plus loin dans une sombre histoire aussi vaine qu’illuminée : une sorte de société secrète cherche en fait à savoir ce qu’il y a après la mort, en torturant des jeunes
femmes pour en faire des martyrs, c’est à dire étymologiquement des « témoins » du royaume de Dieu… L’idée est un peu débile, en effet, et son traitement n’est guère plus subtil,
malheureusement…

Les deux actrices sauvent un peu le film grâce à leur élan furieux : Mylène Jampanoï et Morjana Alaoui se donnent vraiment, et ça fait plaisir à voir ! Sans compter que l’on peut discrètement
remarquer la présence du jeune Xavier Dolan au casting, dans un rôle bref mais intense, puisqu’il se prend un coup de fusil en pleine poitrine dès les premières scènes… Grandiose !































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Simon Werner a disparu… de Fabrice Gobert (France, 2010)



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Note :
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Avec son « Simon Werner », Fabrice Gobert a su réaliser un premier film détonnant, en parvenant notamment à superposer les styles et les genres avec une certaine aisance et une audace indéniable
! Sous ses allures de « teen movie » lycéen, le long métrage varie habilement de la comédie au drame, du thriller à la romance… Il y a du « Elephant » dans « Simon Werner a disparu » : dans sa
façon de suivre les adolescents à tour de rôle sur une période définie bien sûr, quitte à répéter une même séquence selon des regards différents, mais aussi dans sa structure, dans sa douceur,
dans sa fascination palpable pour le monde insondable de l’adolescence… Mais un « Elephant » plus explicatif aussi, plus bavard et moins radical : un « Elephant » pour adolescent, en somme, avec
une bande son moins « concrète » et plus rock, et avec une richesse formelle loin cependant de faire défaut… La précision des cadrages, les mouvements de caméra autour des ados, l’utilisation de
la lumière, étrange, qui paraît rendre des effets de réel à la fiction… Admirable et fascinant !

De jeunes et beaux acteurs, tous excellents, font vivre des personnages comme autant de « stéréotypes adolescents » (le beau mec sportif, le comique de service, la jolie fille populaire, le
souffre-douleur…), tout en les détournant plaisamment du cliché : le footeux va ainsi passer le film avec des béquilles, la belle semble idolâtrée bien malgré elle par les autres, etc. Ces
figures différentes mais toujours complémentaires vont permettre d’établir une architecture filmique subtile et maîtrisée : le cours du récit reprendra ainsi à quatre reprises, selon le point de
vue de quatre personnages, jusqu’à la révélation fatidique sur la disparition de Simon, en épousant justement le regard de ce dernier… Les noms des lycéens s’affichent ainsi à tour de rôle à
l’écran, divisant le film en autant de fragments d’informations, et chaque partie permet un traitement de l’histoire adapté au personnage, révélé jusque dans la mise en scène : "Pour la partie de
Jérémie, la plus classique, on tournait avec un objectif standard, on avait envie de le suivre tout le temps et la caméra était souvent en mouvement", explique le réalisateur, "dans celle
d'Alice, on avait envie d'être sur le visage d'Ana Girardot, on utilisait des focales plus longues, plus serrées sur elle, comme c'est un peu "la star du lycée" on avait également toujours un
projecteur braqué sur elle, qui la mettait en valeur ; les deux autres ont été définis selon leur caractère principal, Jean-Baptiste, solitaire, était filmé en plans larges et Simon avait la
caméra en permanence embarquée avec lui".

Fabrice Gobert semble se servir de cette disparité des points de vue pour insérer à son long métrage une large réflexion sur la notion de réalité. On observe au fil du récit comme une
superposition de couches du réel, correspondant à autant de perceptions possibles des choses, notamment à propos des disparitions successives de plusieurs personnages. Le cinéaste joue à nous
montrer la compréhension du monde par ses personnages, mais aussi à nous embrouiller en nous livrant de multiples perspectives interprétatives… Ainsi, une même phrase d’un personnage, selon le
point de vue adopté, sera entendu différemment : quand Rabier parle de sa mère à Jérémie, Jérémie entend « Elle est bonne ta mère », d’un ton vulgaire, mais Rabier dit pourtant dans sa version
des choses « Elle est belle ta mère », d’un ton respectueux et presque amoureux. Ces variations sur les mots, sur les gestes et sur les ressentis, permettent de semer le doute sur la vérité. Par
l’intermédiaire des divers personnages, le spectateur va alors imaginer mille choses sur la disparition de Simon (un professeur meurtrier, un élève mal dans sa peau, une fugue, ou des histoires
plus glauques de pédophilie et de viol…), jusqu’à ce que le réalisateur adopte la vision de Simon sur ce qui est réellement advenu, offrant un dénouement brutal et cru tout bressonien à ce long
métrage inspiré.































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mercredi 29 septembre 2010

"J'ai tué Xavier Dolan", par Gabriel Roy













Bien sûr, j'aurais pu choisir la facilité, pour cette semaine spéciale consacrée à Xavier Dolan, en vous proposant l'une (ou l'autre) des innombrables publicités dans lesquelles le jeune homme
était apparu enfant, notamment pour les produits de beauté québécois Jean Coutu, ou son apparition à 11 ans comme "porte-parole de l'association pulmonaire"... Mais non, cela aurait semblé beaucoup trop évident
et balisé !



Au lieu de ça, je vous propose une vidéo originale dans laquelle Gabriel Roy, sorte d'humoriste de la Belle Province, donne son "point de vue" sur le premier film de Xavier Dolan, "J'ai tué ma
mère", tout en se livrant à une parodie amusante du long métrage... Bien qu'il n'ai visiblement guère apprécié ce petit chef-d'oeuvre (mais il faut accepter les points de vue différents, même
s'ils ne proviennent évidemment que d'une erreur de jugement ;o) le sketch n'en demeure pas moins rudement drôle !































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mardi 28 septembre 2010

Notre jour viendra, de Romain Gavras (France, 2010)



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Note :
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Fils de Constantin Costa Gavras, le petit Romain semble plus avoir été influencé par Bertand Blier (façon « Les valseuses ») que par son père pour son premier long métrage. « Notre jour viendra »
raconte ainsi l’incroyable odyssée sans but ni comment de deux hommes reliés par leur seul cuir chevelu : ils sont roux ! Gavras décrit ses personnages « comme des Don Quichotte lancés dans une
quête vaine et désespérée », une quête qui sera semée de nombreuses scènes chocs et bien barrées : des lapins pendus dans un cimetière, une fillette spectatrice des ébats de l’un des deux
rouquins avec trois jolies filles, un caméo gothique de Kim Chapiron, une chasse à l’homme à l’arbalète, des hommes contraints de s’embrasser « avec la langue » pendant un mariage devant
l’Eglise, un « kidnapping » de montgolfière… Si le cinéaste a probablement un peu la provoc’ facile – provocation qui au passage ne choque plus vraiment de nos jours –, on ne peut pas nier qu’il
le fait avec style et panache ! Loin d’être un nouvel « Orange mécanique », dans lequel la violence n’est jamais expliquée, « Notre jour viendra » reste surtout intéressant pour la liberté et
l’ouverture qui émanent de son récit… Le parcours des personnages (Vincent Cassel et Olivier Barthelemy sont excellents !) s’avère tout autant absurde que sauvage, et le désir de l’un de
rejoindre l’Irlande, véritable paradis des roux, ajouté au cynisme rebelle de l’autre, ne transpire finalement que la bêtise de la condition humaine, où l’intolérance le dispute à des idéaux bien
souvent factices… L’humour noir et nihiliste de l’ensemble rend quoiqu’il en soit ce premier essai réjouissant et confère une bonne place à Romain Gavras dans la catégorie des « cinéastes à
suivre » !































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Les amours imaginaires, de Xavier Dolan (Québec, 2010)


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Note :
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Le deuxième film de Xavier Dolan, "Les amours imaginaires", dans les salles le 29 septembre 2010



(Re)lisez la critique de Phil Siné en cliquant ici



 



Voici la note d'intention du réalisateur à propos de son film :




À l’origine, je ne devais pas tourner ce film. Je revenais d’un road trip en compagnie de deux amis, Niels et Monia. Le voyage avait été particulièrement riche en péripéties, et de déserts arides
en pittoresques obèses, notre huis clos intensif avait fait germer l’idée d’un projet inspiré de notre triumvirat. C’est au cours de cette même odyssée kerouakienne que j’appris l’annulation du
film que je devais tourner en octobre (reporté pour cause d’argent et de temps, étonnement). Bien que victorieux de ma survie, je rentrai donc au pays bredouille.

La perspective de ne rien faire pendant un an m’horrifiait, et l’automne montréalais étant fécond en tournages de films, j’étais taraudé par d’incessants panneaux annonçant je-ne-sais-plus-quels
plateaux de cinéma. Persuadé de mon éventuelle mort substantifique, effrayé par le concept de la stagnation créative, je me mis en tête d’écrire quelque chose dans l’urgence. Or, début septembre,
je pris le train pour le Festival de Toronto. Devant le défilé irisé du Lac Ontario, je sortis mon ordinateur et écrivis le scénario des Amours Imaginaires. Je le peaufinai pendant le Festival et
sur la route du retour. Revenu à Montréal, j’avais entre les mains mon deuxième long-métrage. Ne restait plus qu’à trouver 600 000 $ pour le tourner. Bagatelle !

Marchant dans les traces que mes pas avaient laissées à l’époque de J’ai tué ma mère, je recommençai la ronde du jeune cinéaste famélique, suppliant vainement ladres potentats et faux mécènes de
donner corps au rêve, encore une fois. Je pensais naïvement que la gloire estivale qui m’auréolait ouvrirait à la volée quelques portes closes. Sachant que la vague se casserait un jour ou
l’autre, que le succès peut-être évanescent expirerait au terme de la saison, je voulais profiter du momentum pour recueillir les aumônes. Mais personne ne répondait à l’appel. Les quelques
hommes d’affaires approchés procrastinaient, harponnés par leur frénésie mégalomane, étrangers aux moeurs du cinéma. Le feuillage des arbres brunissait à vue d’oeil, et j’avais besoin de couleurs
chatoyantes. L’automne fuyait. Impatient, je sortis les quelque derniers maravédis qu’il me restait et donnai le feu vert pour démarrer la machine, convaincu, par une force intrinsèque insensée,
que l’argent viendrait tôt ou tard.

Et belote, rebelote ! Un an presque jour pour jour après le début du tournage de J’ai tué ma mère, extirpés du lit à des heures aurorales, et sous la dictature néronienne du bon gel agreste, nous
buvions un café infâme dans une forêt de Lotbinière, et je criais «Action !», au septième ciel, ravi. Le soir, de retour au dortoir - nous logions dans une ancienne habitation curiale
post-moderne reconvertie en gîte - je songeai à notre première journée, sentant bien que ce film, au final, n’aurait rien à voir avec J’ai tué ma mère. Mais je ne m’interdisais pas encore
radicalement, à ce moment-là, un mandat émotif, dense et écorché comme à mes débuts. Je n’avais pas encore décidé que ce film ne serait la suite de rien, ni la victime d’une comparaison
infériorisante. Je n’avais pas l’intention nette et définie d’une foncière différence ou d’un nouveau départ. Et pourtant, comme par magie, comme si l’inconscient collectif du plateau avait voulu
m’éviter l’écueil de la redondance, Les amours imaginaires se distingua de lui-même de fil en aiguille, imposant sa voix, son âme et sa couleur propres. Quant à l’argent, des investisseurs du
secteur privé (que j’avais rencontrés par l’entremise d’un ange-gardien) sortirent de l’ombre peu après le début du tournage, et sauvèrent notre mise. Ils nous donnèrent tout, et furent
littéralement les héros du film.

Aujourd’hui, avec le recul, étonné par tous ces concours de circonstances et surtout par la façon dont tous les éléments de l’univers se sont alignés pour que cette oeuvre existe à un moment
précis, je réalise qu’aucun autre film mieux que Les amours imaginaires n’aurait pu être mon deuxième film. Dans ce bonheur indicible de l’oeuvre complétée, je songe déjà à l’art en attente, à la
suite, à l’avenir.

Xavier Dolan



 



Mise en perspective :



- J’ai tué ma mère, de Xavier Dolan (Québec, 2009)



- Les amours imaginaires, de Xavier Dolan (Canada,
2010)
































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lundi 27 septembre 2010

J’ai tué ma mère, de Xavier Dolan (Québec, 2009)

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Note :
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Inspiré d’une nouvelle qu’il avait écrit plus jeune (titrée encore plus violemment « Le matricide »), le premier long métrage du jeune prodige Xavier Dolan est en partie autobiographique,
peut-être presque thérapeutique, ce qui lui confère un côté réaliste souvent troublant dans les situations de passions familiales excessives qu’il met en scène : "Evinçant le côté très ésotérique
de la nouvelle, j'ai écrit « J'ai tué ma mère » en misant sur le côté hyperréaliste des détails irritants du quotidien, et en tentant, un peu maladroitement, de démontrer la dichotomie des
sentiments, et d'évoquer la nostalgie, le souvenir de l'enfance", exlique lui même le cinéaste… Dolan parvient justement brillamment à décrire cette relation pétri d’ambiguïté entre le fils et la
mère, Hubert Minel et Chantal Lemming, les deux personnages principaux du film : connaissant de véritables rapports conflictuels d’amour-haine, ils passent leur temps à se disputer, souvent de
façon complètement passionnée et hystérique. Ca en devient parfois presque drôle, tellement les excès sont captés avec fougue et pertinence ! Le ton du film est d’ailleurs en constant équilibre,
à l’image de leur relation, entre drame et comédie, traversé par un humour vachard et décalé. Filmé à distance de la situation que Dolan a probablement lui-même vécu quelques années auparavant,
le jeune cinéaste demeure sans concession pour ses personnages, les filmant chacun à tour de rôle dans toute leur vérité, avec leurs défauts ET leurs qualités, faisant preuve d’une incroyable
maturité : le portrait de l’un n’est jamais favorisé par rapport à l’autre et c’est en cela que l’émotion s’avère forte et crédible. Partagée entre tendresse et cruauté, l’image qu’il dresse de
cette relation filiale est bien plus subtile que ce qu’elle peut sembler au premier abord : avec un film au titre assassin à l’égard de sa mère, Xavier Dolan signe finalement une véritable
déclaration d’amour pour elle !

Mais « J’ai tué ma mère » va bien au-delà de son sujet principal, à savoir les rapports conflictuels d’un adolescent avec sa mère. L’âge des premières expériences est évoqué avec une grâce
magnifique, Hubert cherchant comme tous les jeunes de son âge à se démarquer et à s’inventer : les questions de l’identité, de l’indépendance, de la sexualité, et même de l’art, sont exposées
avec délicatesse au fil du récit… Comme si le film débordait de toutes parts, à l’image des intentions apparemment très fertiles et pleines de verve de l’apprenti réalisateur québécois.

Dans le domaine plastique et artistique, Xavier Dolan cherche d’ailleurs à en mettre le maximum, comme si le cinéma était pour lui le lieu de la rencontre entre les arts : peinture, musique,
poésie, textes, photo… tout cela s’entrechoque avec une très belle cohérence dans « J’ai tué ma mère ». Mettant d’abord en avant ses propres influences ou tout simplement ce qu’il aime, il cite,
discrètement ou de façon plus ostentatoire, le dripping à la Jackson Pollock (magnifique scène où Hubert et son copain peignent et font l’amour, mélangeant la grâce de l’art à la sexualité), des
toiles de Klimt, de Munch, la musique de Vivaldi ou des chansons pop plus jeunes et dans l’air du temps, des poèmes ou des citations incrustés en surimpression dans les images… Certains lui ont
pour cela reproché un style un peu poseur ou tape-à-l’œil, mais ces citations ne s’avèrent pourtant jamais gratuites : elles sont souvent le reflet des personnalités de chaque personnage.

Mais les citations les plus évidentes sont bien entendues cinématographiques, art total auquel se consacre finalement Dolan, en y imposant un style bien trempé et très personnel. Quand Hubert
annonce à sa prof que sa mère est morte (une explication possible du titre du film, d’ailleurs) ou quand ses parents ne voient plus que l’internat comme solution à son insubordination, on pense
évidemment à Antoine Doisnel dans « Les 400 coups » de François Truffaut. La liberté proposée jadis par le cinéma de la nouvelle vague n’est d’ailleurs pas une influence fortuite dans le cinéma
décontracté et éparpillé en mille éclats selon Dolan ! Sa mise en scène en impose dès les premières images de son long métrage et ne s’essouffle à aucun moment jusqu’au générique de fin… Tout y a
l’air précisément pensé et disposé : des séquences en noir et blanc en dehors de la narration, où Hubert évoque sa mère dans d’étonnants cadrages ; les détails de la composition des plans, de la
disposition des objets, du choix de ces objets ; les jeux sur les couleurs, les lumières ; des énumérations visuelles au style photographique, à la rapidité presque subliminale, qui ponctuent le
film comme autant de transitions magnifiques, à la fois musicales et visuelles, d’une intensité admirable… « J’ai tué ma mère » renferme au final tout un univers de jeux de correspondances,
visuelles, sonores et sensitives, à la richesse infinie !

La principale figure stylistique demeure peut-être d’ailleurs l’opposition. Chaque décor est notamment très travaillé, contrastant généralement avec un autre : la maison de la mère, véritable
enfer sur terre pour Hubert, est par exemple très sombre et surchargé d’objets kitsch symptomatiques de l’inculture populaire de sa génitrice, alors que celle de la mère de son petit copain, qui
a un rapport détendu et idéal avec elle, est claire et parsemée de tableaux ou de photos d’artistes… Xavier Dolan parvient même à révolutionner et réinventer la règle du champ contrechamp,
phénomène d’opposition traditionnel du cinéma classique : son découpage des plans au montage ne ressemble en effet à aucun autre, ses personnages étant généralement assis cote à cote et pourtant
bel et bien isolés chacun dans son cadre par une alternance de champs parallèles… Une cohérence sémantique émane alors très joliment de ce procédé, spécialement lorsque la mère et le fils sont
filmés de cette façon : elle exprime la difficulté d’être ensemble, malgré la proximité physique des deux personnages… Hubert et sa mère ne sont donc pas simplement opposés l’un à l’autre : ils
sont à la fois l’un CONTRE l’autre ET l’un AVEC l’autre, ensembles et séparés à la fois !

A travers son premier film, Xavier Dolan ne se contente ainsi pas de raconter une histoire passionnée et passionnante, il rend un hommage vibrant et sincère à l’art en général et au cinéma en
particulier. Il rappelle à chaque plan la puissance des images, notamment à travers certaines séquences entièrement musicales ou sonores, qui ne se contentent jamais d’être uniquement
illustratives mais toujours habilement narratives, exclusivement par leur force visuelle. Il n’oublie pas non plus de laisser une large place au symbole, parfois par de discrètes allusions (le
nom du pensionnat où se retrouve coincé Hubert s’appelle « Notre Dame des Douleurs ») ou par des images plus fortes, comme lorsque la mère vient rejoindre son fils à la fin du film, comme pour
faire la paix, alors que celui-ci vient d’arracher la larme à l’œil de la petite figurine qui la représentait… « J’ai tué ma mère » n’est ainsi pas seulement le film maîtrisé d’un petit génie de
20 ans, mais bel et bien un grand et beau film indépendamment de cela, d’une richesse émotionnelle et d’une force visuelle épatante, qu’il convient de voir absolument !

 

xavier dolan

 

Mise en perspective :

- Les amours imaginaires, de Xavier Dolan (Canada, 2010)









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dimanche 26 septembre 2010

Hors-la-loi, de Rachid Bouchareb (France, Algérie, Belgique, 2010)



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Deuxième volet d’une trilogie amorcée par « Indigènes » en 2006, sur les liens historiques entre la France et l’Algérie, « Hors-la-loi » continue l’exploration de la face cachée et honteuse d’un
pan entier de l’Histoire de France, en traitant de la guerre d’indépendance de l’Algérie, depuis les larmes d’un peuple chassé de ses terres jusqu’à la fin des massacres civils et la « liberté »
en 1962… Dans cette fresque historique aux reconstitutions impressionnantes, Rachid Bouchareb a voulu mêler discours pédagogique et grand spectacle populaire… et il y est parfaitement parvenu !
Sa mise en scène reste certes de facture classique, mais néanmoins de grande qualité, soignée et efficace dans des scènes d’action atroces, comme le massacre de Sétif du 8 mai 1945. La violence
n’est d’ailleurs ni culpabilisatrice ni partisane comme des polémiques injustes ont pu le prétendre, mais tout simplement réaliste : « Hors-la-loi » a le mérite de montrer enfin les crimes du
colonialisme français, comme Coppola, Kubrick ou DePalma l’ont fait pour l’Amérique et le Vietnam. En décrivant principalement le parcours de trois frères algériens, dont deux membres actifs du
FLN, dans ces années de lutte, Bouchareb relie habilement fiction et Histoire, et transforme son film en divertissement intelligent et réussi.































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samedi 25 septembre 2010

The Housemaid, d’Im Sang-soo (Corée du Sud, 2010)



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Dès les premières images, « The Housemaid » impose une atmosphère moite et en apesanteur qui fascine. Perchée aux étages supérieurs d’un immeuble qui surplombe une rue animée et populaire, une
jeune femme s’apprête visiblement à sauter, dans l’indifférence générale du monde d’en bas. Seul de riches bourgeois l’observent distraitement depuis leur appartement de verre, comme dans une
bulle qui les protège… Une fois le grand saut exécuté seulement, l’agitation et le voyeurisme malsain de ses frères humains entrent en action ! Dès la première scène, Im Sang-soo expose ainsi
avec une belle virtuosité une classe dirigeante fortunée parfaitement isolée d’une réalité sociale tragique de la Corée du Sud, d’un peuple qui souffre juste au bas de la rue, littéralement à ses
pieds…

Le film nous fait ensuite pénétrer une grande maison bourgeoise d’une riche famille sud-coréenne, dans laquelle une autre jeune femme, issue du peuple elle aussi, va faire son entrée comme bonne.
Docile et influençable, elle ne tardera pas à se faire manipuler par le cynisme de ceux qui la dirigent : abusée puis engrossée par le chef de famille, elle sera dissuadée par la maîtresse de
maison calculatrice et sa belle mère acariâtre de ne pas garder l’enfant, à n’importe quel prix ! Doté d’une esthétique stylée et glaçante, « The Housemaid » diffuse une terreur sourde et
languide dans la lente agonie quotidienne de la jeune servante… On pourra juger le tout un peu maniéré et parfois prétentieux, mais la critique sociale est un vrai coup de poing ! Le long métrage
s’achève d’ailleurs sur deux séquences fulgurante : un suicide abrupte et « enflammé » et une conclusion étrange et symbolique d’un salon déplacé à l’extérieur de la maison…































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  • vendredi 24 septembre 2010

    Abattoir 5, de George Roy Hill (Etats-Unis, 1972)



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    Prix du Jury au Festival de Cannes en 1972, « Abattoir 5 » est un film hors norme. Sa forme épurée un peu statique, façon film de SF un peu trop intello, et sa structure narrative éclatée comme
    un puzzle littéraire, peuvent en faire une œuvre difficile d’accès, souvent prête à perdre son spectateur en cours de route… Mais quoiqu’il en soit, on demeure bel et bien ici en présence d’un
    film plein d’audaces, doté d’une créativité stimulante ! L’histoire, tirée d’un roman de Kurt Vonnegut Jr., s’attache à l’étrange destin de Billy Pilgrim, citoyen américain apparemment modèle,
    entouré de sa petite famille, qui a cependant la faculté incroyable de voyager dans le temps… Sauf que ses sauts dans le temps se produisent brusquement et qu’il n’a aucune prise sur eux : en
    plus de sa petite vie de vétéran de guerre, il alterne alors les existences d’un soldat fait prisonnier par les Allemands pendant la seconde guerre mondiale, ou même d’un homme enlevé par des
    extraterrestres sur la planète Tralfamadore, où les entités supérieures invisibles cherchent à comprendre les comportements humains… On admire les transitions formelles entre les différentes
    époques, mais aussi la puissance visuelle qui émane de ce petit bijou filmique. On adhère également à la critique forte et intelligente de l’absurdité de la condition humaine, particulièrement
    dans le spectacle ignoble et vain de la guerre… George Roy Hill sait cependant laisser le public de son film assez libre de son interprétation : la déconstruction systématique du récit peut
    perturber, certes, mais la richesse spéculative et esthétique d’« Abattoir 5 » en font un long métrage profondément innovant et perturbant. Une curiosité à (re)découvrir !































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    Homme au bain, de Christophe Honoré (France, 2010)



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    Homme au bain... Peau de lapin !



     



    Même lorsqu’il réalise à la légère, en « mode mineur » dirons-nous, Christophe Honoré parvient à livrer une œuvre riche et passionnante ! « Homme au bain », qui devait en réalité n’être qu’un
    moyen métrage en réponse à une carte blanche proposée par le théâtre de Gennevilliers, a ainsi miraculeusement été étiré en long, dans lequel le cinéaste ose explorer avec panache ses obsessions,
    les thématiques du corps et du désir…

    Au fond, le film ne raconte que peu de chose : deux garçons se séparent le temps d’un voyage professionnel à New York pour l’un d’eux, mettant à l’épreuve leur relation visiblement déjà bien
    compromise… Christophe Honoré plante d’abord un décor : une banlieue de barre HLM (Gennevilliers), où il ne filme pourtant que des gays parfaitement affirmés, loin du coup de l’image des jeunes
    sauvageons qui enflamment les voitures. Le réalisateur filme-t-il un fantasme de banlieue, issue d’un imaginaire homo-érotique bien connu ? La sensualité et la sexualité brute du film ne fait
    d’ailleurs que commencer : de nombreuses scènes s’attardent sur des corps nus, respirant le désir, dansant et faisant l’amour avec d’autres corps… L’emploi d’une star du X, François Sagat, n’a
    d’ailleurs rien d’innocent : mais si l’acteur est filmé dans des trips sexuels à la marge et souvent brutaux, on retient surtout l’extrême sensibilité qui émane de ce corps tout en muscles qui se
    meut avec une candeur déconcertante, de ce regard de petit enfant perdu, de cette démarche parfois mélancolique… Honoré trouve d’ailleurs là une très belle illustration de l’un de ses roman, « La
    douceur » : sous la dureté des apparences se cache toujours une douceur des choses, une émotion… L’introduction du film assène d’ailleurs l’idée avec conviction : avant que son amant le quitte,
    le personnage de Sagat l’oblige à faire l’amour une dernière fois, malgré ses réticences. Est-ce un viol ou une preuve d’amour ? C’est bien là toute l’ambiguïté des sentiments. L’autre reviendra
    pourtant, guidé par l’amour…

    Honoré profite de cette œuvre expérimentale en forme de parenthèse dans sa carrière pour « se vider » entièrement de ses fantasmes, bien sûr, mais surtout de toutes ses obsessions que l’on
    n’avait jamais vu aussi prégnantes à l’écran jusque-là. Le film est une nouvelle fois truffé de références littéraires : le réalisateur aime filmer les livres, leurs couvertures et nous le prouve
    une nouvelle fois… Cela aboutit d’ailleurs à une scène merveilleuse et d’une étonnante drôlerie : sur le point de se prostituer auprès d’un voisin plus âgé, Emmanuel (François Sagat) se retrouve
    entièrement nu devant une bibliothèque pleine de livres… De ce décalage naît le choc de la pornographie et de l’intellect, en d’autres termes du profane et du sacré : Honoré filme l’homme comme
    il est, en somme, dans sa totalité la plus paradoxale…

    Les séquences à New York donnent au film un aspect documentaire : le personnage est censé suivre la tournée promotionnelle d’une actrice (Chiara Mastroianni) et la filmer à cette occasion.
    Récupérant des images de la présentation de « Non ma fille tu n’iras pas danser » en Amérique, Honoré offre à son film l’occasion de séquences cocasses ou semi-poétiques : des petits commentaires
    mal sonorisés de Chiara, la découverte d’un sosie d’Al Pacino jeune (miam !), et l’occasion de multiples rencontres… Des rencontres et encore des rencontres, en effet, qui peuvent déborder à
    l’horizontal pour de nouveaux rapprochements sensuels, encore…

    Et puis on admire enfin les cadrages incroyables du cinéaste, les errances de la caméra conférant une dimension quasi expérimental au film, l’exploration magnifique des corps de jeunes hommes en
    émois, leur découpage plan par plan, cette poésie du quotidien qu’Honoré sait si bien mettre en scène… La notion de « cadre » s’adapte en outre parfaitement à cet « Homme au bain », nourri
    d’influences multiples, de cinéma bien sûr, mais peut-être bien plus encore de peinture ! Le titre même du film apparaît effectivement comme une parodie virile de toutes ces toiles de maîtres
    intitulées « Femme au bain » qui parcourt l’histoire de l’art, mais reprend surtout le nom d’un
    tableau de Gustave Caillebotte
    , image d’un homme de dos s’essuyant après la sortie du bain, reprise très exactement sur l’affiche du film… Si Emmanuel n’est pas une « œuvre d’art », comme le
    lui reproche son riche et vieux voisin, Christophe Honoré sait rapprocher avec brio et subtilité le prosaïsme de la bestialité du corps et la poétique de l’art !



     



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    "Homme au bain" de Gustave Caillebotte































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    jeudi 23 septembre 2010

    Happy Few, d’Anthony Cordier (France, 2010)



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    Happy few (Nom masculin, Pluriel) : Terme anglais signifiant "les quelques privilégiés". Si on comprend bien le privilège des deux couples du film, qui vont pouvoir se mélanger dans une
    atmosphère de moiteur échangiste toute en bites et en cons, on demeure plus sceptique quant à nous, spectateurs peu privilégiés du nouveau film d’Anthony Cordier. Quand « Douches froides », son
    premier long métrage, filmait les corps avec une sensualité sauvage et une crudité impressionnante et libre, on sent ici que l’emploi d’acteurs connus et pas forcément adaptés, rend la chose plus
    convenue, quand ce n’est pas risible… Marina Foïs a d’énormes tétons, ça on le savait déjà, mais la voir se faire prendre et molester comme une chienne par Nicolas Duvauchelle, puis demander à
    Roshdy Zem de la gifler en lui faisant l’amour, ça relève de l’improbable.

    Le discours du film est de plus un peu vain : les quatre personnages semblent ne se voir que pour la bagatelle, et leurs tergiversations, leurs petits secrets, leurs « oui » ou leurs « non »,
    quand ce n’est pas les deux à la fois, finit bien vite par lasser et nous ennuyer profondément… Anthony Cordier veut faire ressentir la communion qui émane de ces deux couples réassortis, mais ça
    sombre trop souvent dans le ridicule : la scène où ils sont là avec leurs portables à tous écouter ce que font les uns et les autres est d’une maladresse folle et d’un grotesque insensé ! On
    éclate aussi bien involontairement de rire lorsque le personnage de Marina Foïs fait irruption en pleine nuit dans la chambre de son mari dormant avec sa maîtresse consentie pour dire qu’ils ne
    doivent plus dormir ensemble : la façon dont parle l’actrice et la voix de pauvre fille un peu abrutie qu’elle prend nous renvoie terriblement à sa grande époque dans la troupe des Robins des
    Bois…

    « Happy Few » s’avère ainsi bien trop rapidement chiant à mourir, et quand on voit les deux couples baiser tous ensemble dans la farine pour corser leur sexualité et accomplir le fantasme de
    l’une des filles (Elodie Bouchez, aux désirs ô combien sensuels de boulangerie), on a un peu l’impression d’un grand n’importe quoi ni sensuel ni choquant, mais bel et bien affligeant… Une belle
    façon encore de rouler le spectateur dans la farine, à son corps défendant !































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    mercredi 22 septembre 2010

    La veuve joyeuse, d’Ernst Lubitsch (Etats-Unis, 1934)



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    Note :
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    Tiré d’une opérette à succès du début du 20e siècle, « La veuve joyeuse » signée Lubitsch en demeure probablement la meilleure adaptation cinématographique. Tourné en deux versions, l’une
    américaine, l’autre française, avec des acteurs différents (sauf les deux rôles principaux dans ce cas précis), comme c’était la mode en ce temps-là, la version anglo-saxonne est demeurée la plus
    célèbre. Le film raconte l’histoire de Madame Sonia, une riche veuve du royaume imaginaire de Marshovie, qui quitte le pays pour s’amuser un peu à Paris. Sa fortune représentant plus de la moitié
    de la fortune du royaume, les autorités sont chargées de la faire revenir : ils envoient alors le Comte Danilo, un coureur de jupons, pour la séduire et la convaincre de l’épouser…

    Si l’on met de côté les séquences musicales parfois un peu longues et vieillottes, le film demeure une plaisante petite comédie de mœurs, aux dialogues enlevés et aux situations cocasses, allant
    même jusqu’à un mariage arrangé en prison… Les quiproquos se multiplient, mais les deux amoureux finiront bel et bien par se retrouver, malgré leurs désaccords apparents. Maurice Chevalier et
    Jeanette MacDonald font mouche pour interpréter ce couple improbable ! « La veuve joyeuse » s’en prend aussi discrètement à la politique ou à la hiérarchie du pouvoir, ce qui en fait un intérêt
    supplémentaire, bien qu’accessoire… Le tout reste surtout une comédie savoureuse, riche en cocasseries et en coquineries, exactement comme Lubitsch sait si bien le faire…































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    Ces amours-là, de Claude Lelouch (France, 2010)



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    On le sait, Claude Lelouch est un peu le spécialiste des « films somme » qui assomment un peu quand même… Avec « Ces amours-là », il va encore plus loin, puisqu’il ne se contente pas de
    multiplier les personnages et d’entremêler leurs destins les uns avec les autres, il signe une sorte de « film anniversaire » en forme de gros gâteau plein de crème écœurante, allant même jusqu’à
    y insérer des images de ses films précédents… Un « best of » boursouflé de ses cinquante ans de cinéma, en somme, un brin prétentieux et auto satisfait, dont on se serait malheureusement bien
    passé.

    Avant de constater la médiocrité d’ensemble de « Ces amours-là », il convient cependant de souligner la sincérité que l’on sent bien derrière le travail de Lelouch. Un travail complètement vain,
    certes, mais un travail tout de même, qui exalte l’amour du cinéma et surtout l’éternel amour de l’amour de son auteur… Dommage que tout soit constamment plombé par les lourdeurs et les
    maladresses !

    « Ces amours-là » raconte les histoires d’amour d’une femme, Ilva, qui a aimé sans limites les hommes qu’elle a croisé dans sa vie… L’histoire traverse le temps, la guerre, le cinéma… Ah oui,
    parce qu’Ilva est ouvreuse dans un cinéma en fait, l’occasion pour Lelouch de truffer son film d’affiches et d’extraits de films multiples, comme autant d’hommages bien lourdingues et appuyés à
    sa passion. Tout est d’ailleurs grandiloquent dans cette fresque interminable qui tombe bien souvent dans le ridicule et le risible : le débarquement en Normandie par exemple, ou certaines scènes
    dans les camps de concentration, avec un bâton de dynamite et quinze figurants, fallait oser… Si seulement Lelouch avait su calmer ses ardeurs et se contenter de réaliser un film à la hauteur des
    moyens mis à sa disposition ! Mais non, il veut tout faire en grand, en flamboyant, quitte à se vautrer complètement dans le mauvais téléfilm…

    Au final, un film assommant et épuisant, dont les destins croisés de ses trop nombreux personnages nous ennuient profondément… Les acteurs ne rattrapent en outre rien du tout, mais faut dire
    qu’ils ne sont pas aidés. Quant aux chanteurs (Lelouch a toujours aimé employer des non-acteurs pour rendre ses films encore plus mauvais…), qu’en dire ? Sinon que Raphaël est plutôt effacé,
    voire absent, et que Liane Foly fait vraiment vieille mémère toute refaite… Autant dire que ça fait pitié ! Et comme si on en n’avait pas assez, alors même que l’on crie au supplice, Lelouch en
    rajoute une louche en truffant ses dialogues de ses satanés aphorismes, les fameux « lelouchismes » : « Les plus belles années d’une vie sont celles que l’on n’a pas encore vécues », « L’amour
    est un long voyage dont le retour vaut parfois plus cher que l’aller », « Il vaut mieux éclairer que rayonner », « Je crois que l’on porte tous en nous deux vies : l’une pour apprendre, l’autre
    pour la vivre »… Au secours, n’en jetez plus ! A l’heure où de grands cinéastes qui faisaient encore de bons films passent l’arme à gauche (Alain Corneau, Claude Chabrol), on en vient à regretter que certains continuent de faire
    des films…































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    mardi 21 septembre 2010

    3 bonnes raisons d’aller voir (voire revoir) « Oncle Boonmee »


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    1.
    Parce qu’il s’agit probablement du meilleur film de l’année, dixit moi-même, le Festival de Cannes, qui lui a décerné la récompense suprême cette année, et surtout le dernier Palmarès interblog du cinéma ! (Pourvu que ça
    dure…)

    2.
    Parce que même si l’on peut ne pas aimer l’« Oncle Boonmee », mais alors vraiment ne pas l’aimer, il se trouve que si on l’aime, ce n’est pas à moitié non plus ! Au fond, c’est un film qui ne
    peut laisser indifférent, qui impose des sentiments très forts et très tranchés, qui interroge chacun sur son propre rapport au cinéma et qui peut laisser sa trace en nous pendant encore bien
    longtemps… Le risque vaut donc vraiment la peine d’être encouru par tous ceux qui auraient encore des doutes ou des réticences !

    3.
    Parce que quoi qu’on en dise, c’est toujours assez drôle de voir (ou même d’entendre, parfois !) des gens en train de dormir dans une salle de cinéma… Et si « Oncle Boonmee » devenait pour
    certains le nouveau moyen (entièrement sain et naturel) de combattre leurs insomnies ?



     



    Relire la critique
    d'"Oncle Boonmee" par Phil Siné































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    Le dernier exorcisme, de Daniel Stamm (Etats-Unis, 2010)



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    Voici donc le dernier avatar de toute la série de films née depuis la sortie du « Projet Blair Witch », vieux maintenant de plus de 10 ans ! Usé jusqu’à la corde, le concept continue
    malheureusement de venir polluer les salles de cinéma avec des sommets de médiocrité : voir le récent « Paranormal activity » par exemple… Faut dire que ces films ne coûtent pas très cher,
    ce qui est donc tout bénefs pour les producteurs : une image vidéo amateur tremblotante façon documentaire, deux ou trois acteurs, des éclairages à la lampe torche, des décors et une équipe
    technique réduite ou inexistante, deux chewing-gums et trois bouts de ficelle… Faut-il aller jusqu’à dire que c’est clairement du foutage de gueule ?

    « Le dernier exorcisme » vient après tous les autres et souffre fatalement de la comparaison avec les pionniers du genre « je vous en mets plein la vue avec presque rien »… Du coup, en ce qui
    concerne l’effet de surprise, on repassera ! Pour le reste, on ne peut pas dire que ce soit très bon, mais on peut pourtant souligner une volonté de faire les choses dans les règles de l’art de
    l’arnaque cinématographique : une gradation dans les scènes qui font peur (enfin, qui font « sursauter » plutôt, essentiellement grâce à une façon de filmer épileptique et à l’aveuglette, qui
    permet de révéler les choses au tout dernier moment), les passages obligés (comme le caméraman qui prend la fuite en filmant toujours devant lui), une scène finale déchaînée (avec accouchement
    d’un bébé-monstre, bûcher enflammé et messe noire), etc.

    L’histoire n’est pas non plus très innovante, bien qu’un peu hérétique, montrant un homme d’église un brin désabusé : le révérend Cotton Marcus décide en effet de réaliser un documentaire pour
    prouver que les exorcismes ne sont que des escroqueries… sauf qu’il tombe malheureusement sur Belzébuth ou un de ses sbires ! Reste quand même un peu d’humour, distillé au compte goutte au début
    du film, spécialement lorsque le prêtre explique à la caméra ses « trucs » pour faire trembler les murs ou faire fumer son crucifix pendant l’exorcisme qu’il réalise. C’est un peu mince, tout de
    même !































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    lundi 20 septembre 2010

    Le bruit des glaçons, de Bertrand Blier (France, 2010)



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    Un écrivain alcoolique, qui n’écrit plus depuis longtemps, reçoit la visite de son cancer, véritable personnification du mal qui le ronge de l’intérieur et qui le porte doucement vers la mort…
    L’écrivain, c’est Jean Dujardin, et le cancer, Albert Dupontel : côté interprétation, le duo fonctionne très bien. Les dialogues sont nourris et les gags s’enchaînent avec régularité : on rit de
    bon cœur, même si le mordant et la noirceur de Blier semblent un peu s’amenuiser avec le temps, au point qu’une histoire d’amour avec la bonne va bel et bien finir par « sauver » l’écrivain… Mais
    bon, là n’est pas le cœur du problème, puisque Blier ne sombre jamais non plus dans le bon sentiment : il édulcore simplement son cinéma, que l’on avait naguère connu beaucoup plus incisif ! Ce
    qui pose véritablement problème, c’est peut-être la minceur de l’histoire initiale qui, si elle reste plutôt originale, n’en semble pas moins traîner en longueur au fil du long métrage… On
    s’ennuie donc un peu, surtout que la mise en scène, théâtralisée à l’excès et sans excès de virtuosité non plus, n’est pas là pour sauver les meubles…































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    dimanche 19 septembre 2010

    Godzilla : Final Wars, de Ryuhei Kitamura (Etats-Unis, Japon, Chine, Australie, 2004)



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    Réalisé pour célébrer le cinquantième anniversaire de la franchise « Godzilla » (née en 1954 devant la caméra d’Inoshiro Honda), cet épisode « Final wars » était aussi
    officiellement annoncé comme l’ultime aventure de toute la saga ! Ce qui est d’ailleurs toujours le cas à ce jour, même s’il se murmure déjà que la machine serait très prochainement relancée…

    Pour marquer le coup, du coup, les producteurs ne lésinent devant rien pour ce film hommage à 50 ans de Godzillerie, construit également comme un beau feu d’artifices venant clore cette
    incroyable odyssée : budget colossal, effets spéciaux incessants et pétaradants, monstres par dizaines… et surtout une couverture internationale, puisque toute la planète est attaquée ! «
    Godzilla final wars » est d’ailleurs une coproduction mondiale, même s’il demeure dans l’esprit traditionnel du film de « kaijû » japonais…

    Dans le futur, l’ONU est doté d’une force armée pleine d’humains mutants dont le but est de combattre les monstres. Cette force s’appelle l’Earth Defense Force, ce qui donne en sigle « EDF »
    (sic), et faut dire en effet qu’ils possèdent une belle énergie, toujours prêts à sauter partout ou à frapper avec force ! Sauf que pour la première fois, les monstres attaquent toutes les
    grandes capitales de la Terre simultanément : eh ben là, ils assurent plus chez EDF… et l’humanité risque de mal finir !

    Heureusement, les Xiens (venant de la planète X, bien entendu…) passent pas là, chassent les monstres et assurent aux terriens venir pour les aider à repousser une grosse étoile qui fonce droit
    sur la Terre ! Quelques gentils humains héroïques, aidé d’un mutant sympa, vont en réalité s’apercevoir qu’il n’y a pas d’étoile et que les Xiens sont là pour prendre le contrôle de la planète…
    Ce sont eux, en réalité, qui contrôlent les monstres et détournent même les mutants à leur avantage ! La seule solution pour sauver la Terre, c’est bien sûr de s’en aller réveiller Godzilla… Ouf
    ! On l’attendait plus celui-là…

    « Godzilla Final Wars » bénéficient ainsi d’un scénario riche et complet, avec lequel on se marre plutôt bien et dans lequel on ne s’ennuie pas une seconde ! Il faut dire qu’en terme d’action
    bien « fun », on est rudement servi : entre la multitude de monstres destructeurs, comme autant de « guest » des précédents longs métrages de la saga (Gigan, Rodan, Anguilla… Oui oui, ils sont
    tous là !), et les combats délirants des mutants façon « Matrix », on n’a pas le temps de voir défiler les deux heures du long métrage… On soupçonne Kitamura d’en avoir rajouté dans le délire «
    made in japan » et même dans l’ironie, tant l’accumulation des scènes de n’importe nawak et de kitsch fuse de tous les bords de la pellicule ! Quand Godzilla se réveille, il faut voir comment il
    fait le tour du monde en deux coups de queue de dinosaure et comment il t’expédie tous les autres monstres en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire… La scène la plus savoureuse est aussi
    peut-être le combat le plus expéditif : le vrai Godzilla nippon se retrouve face au Godzilla de synthèse américain et l’envoie valdinguer à l’aise d’un bon coup de patte…
    Alors, c’est qui le plus fort maintenant ? L’affiche française du film n’avertit-elle d’ailleurs pas clairement : « Attention aux imitations ! »

    Si les clins d’œil à la saga ne manquent pas (passage en revue des plus célèbres adversaires de Godzilla, débarquement des extraterrestres, destructions de maquettes à volonté…), cet épisode est
    surtout un grand morceau de bravoure divertissant et plein d’idées ! Un film à la mise en scène à la fois soignée et efficace, qui conserve pourtant le charme nanardeux et rigolo des anciennes
    productions de la Toho… Une belle synthèse dont on se délecte avec une vraie jubilation, et qui se paie même le luxe de s’achever sur un très beau message humaniste, à travers l’image de deux
    enfants, l’un humain l’autre godzillasaure, qui se mettent sur le passage des adultes afin de les empêcher de se battre encore… Une conclusion pacifique épatante !































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    La Saga "Godzilla" selon Phil Siné



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    Voici les films de la saga "Godzilla" vus par Phil Siné, classés par ordre chronologique :



     



    Godzilla, d’Inoshiro Honda (Japon, 1954)



    Godzilla vs Megalon, de Jun Fukuda (Japon, 1973)



    Godzilla vs. Mechagodzilla, de Jun Fukuda (Japon, 1974)



    Godzilla vs Biollante, de Kazuki Omori (Japon, 1989)



    Godzilla & Mothra : The battle for Earth, de Takao Okawara
    (Japon, 1992)



    Godzilla vs Mechagodzilla II, de Takao Okawara (Japon, 1993)



    Godzilla, de Roland Emmerich (Etats-Unis, 1998)



    Godzilla : Final Wars, de Ryuhei Kitamura
    (Etats-Unis, Japon, Chine, Australie, 2004)



     



    Bonus :



    Portrait de Godzilla, véritable "monstre" de cinéma



    La rencontre au sommet de Godzilla et de Bambi



    Gamera : une saga concurrente de Godzilla































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    samedi 18 septembre 2010

    Jeu "Oh my Godzilla !" : And the winner is...


    godzilla_hollywood_boulevard.jpegOui, je sais, vous
    n'en pouviez plus de l'attendre, mais voici enfin le résultat du grand concours de votre été
    : "Oh my Godzilla !"



    Dénouement d'un suspense insoutenable, sachez avant tout que la compétition fut très serrée et que TOUS les candidats ont obtenu des voix (et pas seulement la leur !) Il me semble important de le
    signaler, tant le niveau de qualité des participations était élevé...



    Mais fi des tergiversations et place au podium, en images :



    godzilla jeu zabeille



    Zabeille et sa carte postale astucieuse s'impose sur la première marche, avec un score
    de 13 points ! Elle a donc le droit de choisir son cadeau : un t-shirt "Oh my Godzilla" inédit à tirage unique ou un double DVD "Godzilla" (avec les films « Godzilla & Mothra : the battle for Earth » et « Godzilla vs Megalon »)



    godzilla jeu bruce kraft



    A la seconde place, c'est la version "Alice contre Godzilla" signée Bruce Kraft qui
    s'impose, avec 11 points... Il obtient donc le second cadeau en jeu, celui dont n'aura pas voulu sa copine Zabeille !



     



    Quant à la troisième place, elle revient au joli dessin de Nico : malheureusement il n'y a
    pas de troisième lot... Très joueur, il avait choisi de ne pas voter pour sa pomme, ce qui aurait pourtant été déterminant... Héhé ! Sans regret ?



    Contre toute attente, le talent de poètesse de Cachou se place à la 4e place (les votants
    s'amusent...), ex aequo avec la magnifique Godzibroderie de notre Brodeuse Bazar !



    Bravo encore à toutes et à tous d'avoir contribué tout l'été à ce jeu et n'oubliez pas que "l'essentiel c'est de participer", bien sûr ! Sans compter que vous allez très bientôt pouvoir vous
    rattraper avec de nouveaux jeux qui vous permettront de remporter plein de DVD !































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