lundi 8 mars 2010

Nés en 68, d'Olivier Ducastel et Jacques Martineau (France, 2008)

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Note :
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Avec Nés en 68 : nous nous aimerons jusqu'à la mort, on voit très bien ce que Olivier Ducastel et Jacques Martineau ont voulu faire : une grande fresque (épique ?) sur les grandes luttes
politiques des quarante dernières années en France. En ancrant leurs personnages de fiction dans l'Histoire en train de se faire, ils les érigent en autant de symboles de l'évolution des moeurs et
des courants politiques (de gauche surtout). L'histoire de tous ces personnages, disséminés sur deux générations, c'est donc aussi une histoire des idées, des idéaux et des illusions. Le film
montre d'ailleurs parfaitement l'évolution "descendante" de notre monde en perte de repères et de rêves : on passe de l'illusion au désenchantement, des idéaux libertaires et libertins de mai 1968
aux années sida, de l'amour libre à l'amour à mort, pour finalement basculer dans l'horreur du sarkozysme...

Mais tout en montrant cette déchéance, le film gagne pourtant en souffle et en lyrisme. Ce n'est d'ailleurs sans doute pas un hasard si le film prend vraiment son envol avec la "nouvelle
génération", celle des enfants de 68. La structure du film se base sur ces deux "âges" : la première partie présente les parents remplis d'illusions qui fondent une communauté autogérée à la
campagne ; la seconde raconte le désarroi de ces mêmes parents et le monde d'amour mortifère qu'ils ont légué à leurs enfants. Il faut bien admettre que la première heure et demi, nourrie d'idéaux
hippies et post-soixante-huitards, est la moins réussie, parfois un peu ennuyeuse et artificielle. Les réalisateurs se rattrapent à merveille dans la seconde heure et demi (oui, oui, le film dure
trois heures !), lorsque la plupart des habitants de la "communauté" ont fini par revenir dans le monde "réel" de la société de consommation. Les enfants, eux aussi, ont fui la campagne, mais n'ont
cependant pas abandonné le combat...

Et c'est bien là l'idée forte de Nés en 68 : si en 40 ans, le monde s'est effondré, les consciences ont compris que la meilleure façon de changer une société, ce n'est pas de la fuir mais
de l'attaquer de l'intérieur. Participer à la vie de la cité pour mieux la combattre, voilà ce que les années ont appris aux idéalistes devenus "réalistes désenchantés mais engagés". Anéantis par
les changements du monde qui les entoure, peu à peu contaminés par les idéologies mortifères de la droite, après les faux espoirs au goût d'amertume du mitterrandisme (tout le film est maillé et
"daté" par les changements de gouvernement français), les personnages n'en conservent pas moins cette rage de lutter, toujours et encore. Et c'est probablement cela qui les rend si beaux et si
touchants : cette capacité à croire qu'on peut changer le monde, même lorsque celui-ci est condamné. Mais ce qui nous les rend plus proche encore, ce sont leurs doutes permanents, leurs
hésitations, leurs sensations d'avoir fait les mauvais choix, d'avoir emprunté les mauvais chemins... Le doute, ou même l'échec, au final, est le meilleur enseignement, quand la réussite, elle, au
fond, n'apprend rien. Malgré la peur, malgré la mort et malgré le monde, l'amour guide sans faillir tout ce petit monde attachant. Et même si la marche du monde tout entier se dresse contre eux, il
leur restera toujours, comme le très beau personnage de Boris (interprété par le tout frais Théo Frilet) l'affirme : "le droit de ne pas être d'accord". Le message est simple,
certes, mais sa force touche, c'est indéniable. Le film s'achève sur une ambiguïté, une image emblématique : celle de jeunes gens "révolutionnaires" perchés sur le socle de la colonne de la place
de la Bastille, dont une jeune fille, portrait parfait du personnage joué par Laetitia Casta, véritable fil rouge de cette somme cinématographique... Chacun est libre d'y voir l'image optimiste
d'un nouvel espoir à venir, ou celle, plus sombre, d'un éternel recommencement des illusions qui finiront toujours par être vaincues par le rouleau compresseur des gouvernements...






























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3 commentaires:

  1. Ah, je suis bien content de voir ces trois étoiles pour ce film tant démoli à sa sortie...

    J'espère que c'est la version longue (version télé) que tu as vu car elle est bien meilleure...

    Casta m'a absolument ébloui dans ce film qui m'a cueilli plus d'une fois !

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  2. 3 étoiles ?!... 2 à la rigueur j'aurais compris  mais lorsque tu met 3 c'est déjà très très bon en général... Je ne suis pas tout à fait ok avec toi.
    Ma critique du 27 mai 2008 :


    Plein d'idées tout le long du film mais le tout s'est transformé en un monceau de caricatures et de facilités où la démagogie n'est pas oubliée. Le scénario bête et gentillet suit sans vergogne
    et sans rélexion une chronologie historique... l'avortement, flower power, canicule de 76, l'élection de Mitterand, , le sida et l'homosexualité (traité comme si c'était indissociable !), le mur
    de berlin, l'élection de Chirac, la dissolution de l'assemblée... Bref quitte à faire cela ils ont alors oublié la crise pétrolière des années 70, le rainbow warrior, Tchernobyl, les attentats
    terroristes...etc... Mais la plus grosse erreur c'est de faire croire tout le long du film qu'il n'y a que deux partis politiques en France l'extrème droite et l'extrème gauche, comme si tout
    n'était que noir ou blanc !?!!!! Un film pavé, je n'en doute pas, de bonnes intentions mais qui au finsh est très maladroit, très inégal, démagogue au plus haut point et surtout loin d'être
    impartial (ce qui est grave lorsque on relate des faits historiques à ce niveau) comme une sorte de film de propagande. dernier problème : quand les parents font aussi jeunes que leurs enfants !
    1 étoile pour certaines scènes réussie, la nostalgie et les bonnes intentions.

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  3. ah oui tu n'es même carrément pas ok !
    tu rejoins la critique de l'époque, qui n'était pas terrible terrible...

    par contre pour le rapprochement sida et homosexualité, c'était un peu obligatoire dans la mesure où c'est les homosexuels qui se sont mobilisés les premiers contre la maladie... aussi parce qu'ils
    étaient les plus atteints, ça aide !
    je crois vraiment qu'il y a beaucoup de sincérité dans ce film de la part des 2 cinéastes, notamment justement dans leur façon de présenter les militantismes... plus que de propagande donc, je
    parlerai de sincérité : et heureusement que les réalisateurs expriment leurs convictions ! c'est de la fiction, pas du documentaire... ;)

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