lundi 15 février 2010

Tu n’aimeras point, de Haim Tabakman (Fr.-Israël-All., 2009)

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Note :
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Pour son premier film, Haim Tabakman s’attaque à un sujet des moins évidents, celui de l’homosexualité dans le monde juif orthodoxe, c’est à dire dans un monde ultra-croyant et très rituel où
l’amour entre homme n’est pas condamné mais n’est juste pas censé exister… Le cinéaste a d’ailleurs déclaré en plaisantant à ce sujet que « Tu n’aimeras point est en quelque sorte un film de
science-fiction [parce que] dans le monde orthodoxe, il faut savoir que l’homosexualité n’existe pas. Elle n’est pas reconnue comme étant une possibilité ». Un film éminemment politique et
audacieux, donc, à la fois portrait subtil d’une communauté en vase clos et très belle et troublante histoire d’un amour impossible, fondé sur un tabou insurmontable…

« Tu n’aimeras point » nous plonge dans la vie de Aaron, un membre respecté de la communauté juive de Jérusalem, marié et père de quatre enfants. Suite à la mort de son père, il reprend seul la
boucherie du quartier. Il engage alors Ezri comme assistant, un jeune étudiant qui cherche à concilier sa croyance et sa condition d’homosexuel. Aaron lui apprend un métier quand Ezri finira par
lui apprendre l’amour véritable… Leurs rapports sont montrés avec une infinie douceur. On les voit s’apprivoiser peu à peu tous les deux, grâce à une mise en scène tout en retenue et en sobriété.
C’est tendre et c’est beau, jusqu’à ce que la communauté s’en mêle en révélant ses doutes sur le garçon engagé par Aaron, qui est en réalité un « étranger » dans le quartier…

Tabakman se livre ainsi à une vraie réflexion sur l’amour et la religion. Alors que les membres les plus extrêmes de la communauté sont prêts à lancer le déshonneur sur Aaron et sur sa famille,
Aaron rappelle au rabbin ses propres mots : lors d’une étude talmudique, celui-ci explique que le pêcheur est peut-être celui qui inflige un jeûne à son corps, bien plus que celui qui jouit de la
vie… Car Dieu a donné le monde à l’homme pour qu’il s’en repaisse. Et c’est exactement ce que fait Aaron dans sa relation avec Ezri, qui lui a ouvert les yeux sur le monde et sur sa beauté. Il dira
lui-même « j’étais mort et maintenant, je suis vivant ». La femme d’Aaron est également un très beau personnage, silencieuse et aimante, pleinement consciente de ce qui se passe et prenant sur elle
pour continuer une vie « normale ». On est ici loin de tout excès et la désarmante simplicité de « Tu n’aimeras point » force le respect ! La scène finale, où Aaron retourne dans le point d’eau
purificateur qu’Ezri lui avait fait découvrir, seul espace dans le film en-dehors de Jérusalem (et à l’abri du monde et de son intolérance !), laisse une fin ouverte et libre à l’interprétation,
plongeant presque l’œuvre dans une forme d’onirisme poétique et symbolique : Aaron enfonce tout son corps sous l’onde… finira-t-il par remonter à la surface ?

Bonus DVD :
Contre toute attente pour ce genre de film plutôt modeste, le DVD n’est vraiment pas avare en bonus intéressants ! Outre la classique bande annonce, on a droit à un making of plutôt bien fait,
laissant la parole aux différents acteurs du film et présentant quelques points de conflits sur le tournage. Une interview du cinéaste vient alimenter la réflexion sur le sujet délicat évoqué par
son long métrage, complétée par deux reportages sur des débats organisés lors de projections en salle de « Tu n’aimeras point ». Une véritable pépite pour compléter sa vidéothèque !


Tu n'aimeras point



Un film de Haim Tabakman avec Zohar Shtrauss et Ran Danker



Editeur : France Télévisions Distribution



http://boutique.francetv.com/

Date de sortie : 13/01/2010

Critique réalisée en partenariat avec

cinetrafic






























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7 commentaires:

  1. un film intéressant  - à suivre
    bonne soirée

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  2. J'avais très très envie de le voir...
    Je vais attendre que le DVD baisse un peu...

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  3. Non, justement, trop gros joueur... et du coup, là en fin de mois... plus joueur du tout...

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  4. Je viens tout juste de le voir... au cinéma! (encore une fois, les films du cycle art et essais semblent passer bien tard par rapport aux sorties officielles chez moi, quand on sait que j'ai vu
    Away We Go seulement la semaine dernière et Fish Tank il y a 10 jours...).
    J'en reparle plus en détails dans quelques jours (je dois d'abord parler d'Eli's Book, de Percy Jackson et de Wolfman)(oui, je suis terriblement en retard), mais j'ai un
    peu moins accroché que toi. En théorie, tout est très bien, mais dans ce genre d'histoires (les amours impossibles, que j'aime beaucoup, va savoir pourquoi), j'ai besoin de m'accrocher aux
    personnages, de "vibrer" avec eux, d'avoir peur pour leur amour. Ici, je n'ai pas réussi à croire à cette histoire. Peut-être que le début de la relation n'était pas assez développé (je marche plus
    aux petits gestes retenus, aux détails qui montrent le désir poindre sans pouvoir être satisfait, et le seul que nous ayons réellement eu avant l'épisode du dessin, c'est cette main posée, retirée
    puis reposée sur le dos du jeune Ezri - il y en a eu d'autres, mais pas assez parlant), peut-être que je n'ai pas compris le pourquoi de l'intérêt d'Ezri pour Aaron (celui d'Aaron pour Ezri est
    plus évident ^_^).
    Et pourtant, j'ai adoré le traitement des réactions de la communauté, cette oppression de vivre dans un monde où tout le monde sait tout sur tous, où l'on se permet de diriger la vie des autres.
    Mais l'élément important, l'implication manquait pour moi. Dommage...

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  5. Rhooo, je voulais le voir, j'avais répondu à Cinétrafic moi aussi... Trop tard aparemment ! Enfin, ta critique me motive encore plus...

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  6. Ca a l'air vachement intéressant ce film...

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  7. et ça l'est ! il ne faut pas hésiter une seule seconde...

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