Le refuge, de François Ozon (France, 2010)

Note :

« Le refuge », c’est l’histoire de Louis qui meurt et de Mousse qui apprend qu’elle est enceinte de lui (Louis). Alors elle part se « réfugier » dans un coin isolé et tranquille, où Paul, le frère
de Louis, vient quand même veiller sur elle et sur sa grossesse… A partir de cette colonne vertébrale narrative, qui est plus un prétexte que la matière d’un véritable scénario, le cinéaste sculpte
un film éminemment « ozonien » ! Comme dans nombre de ses films, il y insuffle une intense puissance visuelle et émotionnelle qui émerge d’une apparente simplicité…

L’histoire pourrait en effet sembler banale et sans grand intérêt, mais son traitement est tout à fait hors norme et très personnel… A fleur de caméra, Ozon filme ses personnages avec une douceur
et un lyrisme absolu et sincère et nous donne à vivre viscéralement toutes les émotions qui les traversent… Avec Isabelle Carré, merveilleuse, on apprend à être une femme enceinte qui doute et qui
ne sait jamais trop bien où elle en est. Avec Melvil Poupaud, brève apparition, on sait ce que ça fait de se faire un bad trip mortel. Et avec le solaire et ténébreux Louis-Ronan Choisy, formidable
chanteur (injustement méconnu) brillamment recyclé en acteur le temps d’un film, on vit comme un homo aux origines incertaines sur le point d’être l’origine d’un enfant… C’est vraiment très beau,
tendrement mélancolique et très touchant.

Après l’étonnant et ostentatoire « Ricky », François Ozon signe un long métrage d’une simplicité désarmante. Mais il laisse cependant l’empreinte latente, tout au long de son film, d’un dénouement
presque apocalyptique, dans le sens originel de « révélation ». La révélation de la filiation par exemple, de se retrouver père et capable de l’être… Il arrive au fond à une forme de mystique
pervertie (évidemment !), à base de sodomie et d’enfant Jésus émasculé (entendez « féminisé » et donc dénaturé…), dont on entrevoyait déjà les prémices à travers la figure de folle illuminée sur la
plage, qui se jetait aux pieds de la putain enceinte pour lui toucher le ventre, fougueusement interprétée par Marie Rivière…