jeudi 28 juillet 2011

[Critique] Deep End, de Jerzy Skolimowski



deep end



Deep End, de Jerzy Skolimowski
(Grande-Bretagne, Allemagne de l’Ouest, 1970)



 Note :
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Premier film britannique de Jerzy Skolimowski, tout juste exilé de sa Pologne natale,
« Deep end » est une étonnante et troublante évocation des mœurs d’une société pervertie. On y fait la connaissance du jeune Mike, un adolescent de 15 ans ayant fraîchement quitté
l’école et n’ayant trouvé d’autre moyen de subsistance que de travailler dans le milieu crasse d’un établissement de bains publics. Au milieu des regards vicieux et concupiscents des clients et
des clientes âgés à son égard, il s’amourache passionnément de sa collègue Susan, plus âgée que lui et collectionnant les aventures… Deux sensibilités s’affrontent alors : la pureté et
l’innocence de Mike, et la nature volage et déjà corrompue par un environnement contaminant de Susan.



 



A travers « Deep end », Skolimowski s’attache d’abord à décrire une atmosphère
sociétale particulièrement dégoûtante, dominée par la sexualité et une dépravation apparemment permanente… Les personnages traversent des décors où règnent la prostitution ou le commerce
protéiforme du sexe : les fameux bains où ils travaillent, les cinémas projetant des films pornographiques, des établissements de nuit à l’érotisme dégoulinant dès leurs devantures…
Cependant, dans sa façon repoussante et presque violente de filmer la chair et ses désordres, il n’oublie jamais de distiller une dose d’humour bienvenue, si ce n’est salvateur. La façon dont les
vieilles rombières agrippent le corps du pauvre Mike dans leurs cabines, avec un grotesque pléthorique, demeure par exemple assez tragiquement risible. On pense également à cette délicieuse scène
dans le cinéma, où Mike caresse Susan alors qu’elle est avec son fiancé, ces séquences burlesques où les personnages déposent des plaintes auprès de policiers, ou encore la recherche éperdue des
personnages d’un diamant tombé dans la neige…



 



Mais ce qui reste le plus captivant et le plus émouvant dans « Deep end », c’est
la description du parcours largement initiatique de Mike. Exalté par l’incarnation lumineuse et radieuse de l’acteur John Moulder-Brown, beau et sensible comme un ange, le personnage représente
symboliquement l’éveil des sens propre à l’adolescence : le film possède en cela une modernité et une atemporalité hallucinante, qui font parfaitement oublier ses 40 ans d’âge ! A
travers cet amour intense et romantique qu’il voue à la belle mais inconstante Susan, Mike fait l’apprentissage de la cruauté de l’amour confronté à une réalité corrompue. On le voit souvent se
perdre dans ses fantasmes, comme lorsqu’il nage dans la piscine avec un simulacre photographique en carton de sa dulcinée, en imaginant faire l’amour avec elle dans l’eau… L’eau semble d’ailleurs
posséder une place centrale dans cet univers amplement sensuel, puisque si c’est dans une piscine vide que Mike fait finalement l’apprentissage de la chair, c’est à la mort qu’il sera confronté
lorsque celle-ci se remplira à nouveau : l’amour absolu qui conduit à la mort, dénouement tragique de cette histoire délicatement universelle et métaphysique… Gracieux et de toute
beauté !































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3 commentaires:

  1. Oui c'est un très joli film, sensible et charnel.
    Mais dis-donc, je ne te savais pas si pudibond ^^

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  2. Peut-être le plus grand film sur l'adolescence. Un ton acidulé, délicieusement pop, qui mélange le léger au tragique avec virtuosité. Skolimowski démontre ici tous ses talents de peintre. Et que
    dire de l'actrice (dont j'ai oublié le nom) et de sa crinière rousse...

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  3. oui, tout à fait d'accord avec toi... ;)

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