dimanche 20 juin 2010

Air Doll, de Hirokazu Kore-Eda (Japon, 2010)



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Note :
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Le sujet de "Air Doll", construit en forme de conte contemporain, est d'abord des plus étonnant et stimulant : il s'agit en réalité de l'adaptation d'un manga japonais qui évoque l'histoire d'une
poupée gonflable pour fantasmes sexuels qui prend soudainement vie. Tout cela commence donc par surprendre de la part du réalisateur de "Still walking". Ce qui a très vite intéressé Kore-Eda
Hirokazu dans ce projet, c'est la dimension métaphorique du thème de l'air, et notamment la sublime image poétique où un homme regonfle la poupée par le biais de son propre souffle : « [cela] m’a
semblé d’une grande force érotique ; j’ai trouvé ce passage très cinématographique », explique-t-il, « je n’avais jamais abordé un sujet pareil jusque-là, et j’avais donc envie de tenter
l’expérience. Il s’agit d’une sexualité qui passe par le souffle d’un être humain, […] je trouve que l’idée d’être, pour ainsi dire, mis au monde par le souffle d’autrui est une manière très
intime d’établir un lien avec quelqu’un et d’y prendre du plaisir ».

La métaphore de l’air contenu par le corps de la poupée, insufflé par les hommes qu’elle propose de « satisfaire » (même si ce n’est pas forcément choisi, elle n’arrête pas de se répéter qu’elle
n’est qu’une poupée gonflable, seulement là pour satisfaire le plaisir et les désirs des hommes), fait donc plonger le film dans une déconcertante poésie : ça pourrait être trash ou graveleux,
c’est au contraire doux et émouvant… On a beau voir la poupée laver au savon ce qui lui tient lieu de vagin après un coït mécanique et dépourvu de sentiment, qui la renvoie à son statut de «
poupée d’air » et finalement aussi à la mort, le film conserve pourtant une tenue éminemment charmante et quasiment innocente. Sûrement parce que le cinéaste a la très bonne idée de tout filmer
du point de vue de cette poupée qui tout à coup se retrouve pourvu d’un cœur, d’une âme, dont elle ne sait finalement que faire… Quand elle prend vie, elle se met à parcourir la ville et à
s’émerveiller de chaque chose : le monde redevient un grand terrain de redécouvertes infinies…

Quand elle entre dans un vidéoclub, lieu qui permettra d’émettre de nombreuses références cinéphiliques et où elle deviendra employée, elle tombe tout de suite amoureuse d'un jeune vendeur. C’est
avec lui que la sexualité la renverra à la vie, et non plus à la mort… Du moins un certain temps, juste le temps pour lui de lui souffler dans la valve (et non pas dans la vulve, vous l’aurez
compris…) Mais comme tous les hommes, il va lui mentir, en lui laissant croire qu’il est comme elle, ce qui l’amènera à commettre l’irréparable, de revenir vers la mort, mais encore une fois en
toute innocence, comme malgré elle… L’amour, ce ne serait donc que du vent ?

Les métaphores se multiplient délicieusement et judicieusement dans « Air Doll », et culminent peut-être lorsque la poupée se retrouve devant son « créateur », véritable symbole de Dieu, avec qui
elle a une conversation ontologique et métaphysique sur son existence… ou plus largement sur l’humanité. Malgré une apparente trivialité, que l’on ne ressent pourtant jamais, le film nous
apparaît surtout d’une beauté incroyable : on s’émerveille de chaque plan, de chaque mouvement de la poupée (superbement interprétée par l’actrice coréenne Bae Doona), de ses découvertes et de
ses déceptions, de ses questions et de ses envolées célestes (magnifique scène où elle se met à danser en flottant jusqu’au plafond), de cette petite musique qui souffle délicieusement à nos
oreilles, de la magie et de la mélancolie enfin, qui s’immiscent doucement tout au long de ce long métrage bien plus riche et plus lourd que l’air…































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4 commentaires:

  1. Encore une fois, j'ai vu une bonne critique de ce film dans Mad Movies, j'en prends bonne note

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  2. Nobody Knows & Still Walking sont deux des plus beaux films de ces dernières années, donc cet Air doll est parmi mes must see !

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  3. Je suis jalouse, je meurs d'envie de le voir celui-là! (prière d'insérer la complainte habituelle...)

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  4. :o) j'espère qu'il sortira bientôt par chez toi ! :)

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