jeudi 6 mai 2010

Mourir comme un homme, de Joao Pedro Rodrigues (France-Portugal, 2010)



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Note :
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A la fin du film, le héros défunt chante « Je veux être pluriel »… Cette formule, troublante et émouvante, résume bien tout ce que l’on a pu découvrir de lui au cours de la projection du superbe
« Mourir comme un homme ». Pas seulement parce qu’il est un homme en train de se transformer en femme, mais aussi, et peut-être surtout, parce qu’il est un « homme », au sens premier du terme :
un être humain… Tout au long du film, on assiste en effet au parcours de Tonia, transsexuel vieillissant pourtant toujours très digne, aux prises avec les multiples facettes de son existence :
son présent qui lui rappelle qu’il est peut-être temps d’en finir avec la scène, son passé avec ce fils qui semble passer dans sa vie comme pour mieux le hanter ou le torturer, ou encore son
avenir incertain avec le jeune Rosário, son copain voleur et immature, sans compter les marques de la maladie, qui se font de plus en plus présentes au fil du récit… Qui n’en est d’ailleurs pas
un ! Car comme souvent avec le réalisateur d’ « O Fantasma », on commence dans un monde connu et on s’enfonce peu à peu dans des déambulations étranges et moites, dans un réservoir de fantasmes
où tout peut basculer d’un instant à l’autre… Quand les personnages arrivent dans une forêt, lieu par excellence de la révélation des choses enfouies et refoulées, on pénètre dans une rêverie
étonnante… On avait également assisté à une très belle scène de « déterrement » auparavant, où le personnage retrouvait des tas de choses que son chien avait enterré dans le jardin au fil du
temps. Cependant, là où l’on pouvait facilement perdre pied dans « O Fantasma », le cinéaste parvient ici à nous rattraper de justesse après chacun des détours hallucinatoires qu’il emprunte…

Plastiquement, « Mourir comme un homme » est une pure expérience, qui ne ressemble à aucun autre objet filmique. S’abreuvant à diverses sources, le film de Rodrigues, que l’on peut qualifier
ironiquement de « trans-genres » tant il est multiple et « pluriel » (à l’image de Tonia), parvient à définir ses propres formes et à suivre sa voie unique et fascinante. La mise en scène se
permet ainsi des fulgurances incroyables ! Des objets sont filmés comme autant de symboles (une chaussure de femme devant la photo de Tonia en homme dans un aquarium) ; un filtre rouge recouvre
une séquence entière, séquence par ailleurs éminemment contemplative, présentant les personnages dans des poses digne d’un tableau bucolique, dilatant le temps dans une belle harmonie ; des
chansons sont interprétées par Tonia à des moments parfaitement inattendus ; une scène de masturbation frontale dans un cinéma parvient à rendre l’instant poétique… On est parfois dans la
comédie, d’autres fois dans le drame ; on éprouve de la tendresse et de la compassion pour un personnage quasi sacrificiel et intensément mystique, toujours prêt à aider l’autre alors que
personne ne lui rend… Et puis il y a ce plan séquence magistral à la fin, au cours duquel on voit le personnage en femme en train de chanter à son propre enterrement, surélevé comme un ange
au-dessus de son corps mort dans un cercueil, habillé comme un homme. Le mouvement de la caméra est alors circulaire dans le cimetière, puis s’échappe du côté de la ville, vers le lointain…
Sublime !































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2 commentaires:

  1. ça a l'air très très bien...


    O fantasma (que j'aime bien, par ailleurs) est sans doute un des films les plus déconcertants que j'ai jamais vu.


    Celui ci à l'air sensiblement plus abordable, il me semble, non ?

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  2. oui beaucoup plus ! j'étais sorti d'o fantasme sans savoir où j'étais... là ça reste un peu narratif, on comprend la fin... ;)

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