vendredi 24 mai 2013

[Critique] Only God Forgives, de Nicolas Winding Refn



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(France, Danemark,
2013)



Sortie le 22 mai 2013




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« Drive » restera-t-il une parenthèse dans la carrière de Nicolas Winding Refn ? Film
probablement le plus « grand public » de sa filmographie, le plus « américain » aussi, il reposait également pour la première fois sur un scénario que le cinéaste n’avait pas écrit de sa main :
un scénario plus classique, narratif et compréhensible que la plupart de ses autres longs métrages… Avec « Only God Forgives », Refn a donc repris la plume et nous livre une œuvre éminemment
mystérieuse, comme pouvait l’être notamment le sublime « Guerrier
silencieux
». Le projet de ce film le « hantait » d’ailleurs depuis longtemps et sa réalisation s’imposait pour lui, malgré toutes les propositions qu’on a pu lui faire après le phénomène «
Drive »…

« Only God Forgives », c’est l’histoire d’une vengeance… Mais une vengeance dans laquelle il n’y a ni gentil ni méchant – ou alors que des méchants, et ni vraiment de héros non plus… Il y a la
crasse de l’humanité, il festival cannes 2013y a les non-dits, les rapports de
domination… Mais au fond, on a souvent l’impression que tout ça ne compte pas vraiment, tant ce qui émane le plus dans ce film est son mystère. Un mystère qui apparaît dès le générique,
curieusement écrit en thaï, comme pour mieux nous imprégner de l’atmosphère du film situé à Bangkok. Et puis le mystère irrigue surtout la forme du long métrage, qui relève en outre presque de
l’exercice de style… La mise en scène de Nicolas Winding Refn est juste incroyablement dingue et somptueuse, nous plongeant dans des ambiances glauques et ténébreuses, baignant dans des lumières
rouge sang ! Comme tout amoureux de l’image, il privilégie les silences et les absences poétiques aux trop longs discours explicatifs… et c’est juste très beau, souvent, et puis très violent, le
temps de quelques fulgurances. Une scène de torture assez intense devrait notamment marquer les esprits…

Si l’on pourra éventuellement reprocher au réalisateur une certaine vanité dans ses images, ou un côté poseur dans sa mise en scène, il demeure néanmoins impossible de ne pas être subjugué et
admiratif devant un tel talent graphique ! Sans compter que les acteurs nous font goûter à des compositions vraiment étonnantes et stimulantes… Ryan Gosling est encore plus mutique que dans «
Drive » (eh oui, c’est possible !), mais il est ici loin d’avoir le beau rôle : sous le joug d’une mère castratrice devant laquelle il n’ose rien dire, il semble en proie à des frustrations
éminemment psychanalytiques (notamment dans ses rapports aux femmes) et il se ridiculise dans un combat à mains nus avec son « adversaire », qu’il doit éliminer pour venger son frère, selon le
désir de sa mère… Cette mère, justement, parlons-en : un personnage antipathique et poussif au possible, incarné avec une fougue hallucinante par une Kristin Scott Thomas purement méconnaissable
! C’est peut-être d’ailleurs elle la vraie star du film, tant sa transformation est bluffante et excitante… On ressort au fond de « Only God Forgives » comme d’un trip halluciné, tout à la fois
scotché, désarçonné, excité et un brin perplexe aussi, un peu à l’image des propos étranges que tient le cinéaste pour expliquer la dimension quasi mystique de son film : "Tout cela, bien sûr,
est très existentiel, mais c’est parce que la foi est fondée sur le besoin de trouver une réponse transcendante alors que, la plupart du temps, nous ignorons quelle est la question. Lorsque la
réponse surgit, par conséquent, il nous faut faire un retour complet sur notre vie afin de trouver la question. Ainsi, le film est conçu comme une réponse, mais ce n’est qu’à la fin que la
question est révélée."



Autres films de Nicolas Winding Refn :



Drive (2011)



Le guerrier silencieux (2010)































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3 commentaires:

  1. Fan de la première heure (et bien avant "Drive" son plus "mauvais" film) Refn signe encore un grand film mais les sirènes hollywoodiennes commencent à araser son côté rugueux... 3/4

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  2. Bien belle critique qui se saisit de cet étrange et intimidant objet filmique. Beaucoup se demandent encore comme moi s'il est raccord avec ses goûts cinématographiques ou si c'est une verrue
    boursouflée prétentieuse de la pire espèce.

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  3. Je suis pas un grand fan de Refn et j'ai lu tellement d'échos negatifs sur ce film que je pense passer mon chemin. Je le verrais plus tard peut être lors d'un éventuel passage à la télévision ;-)

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