samedi 24 août 2013

[Carte blanche] Des bribes de musiques de films remontent à la surface... (par David Tredler)


tred_il_etait_une_fois.pngPassez un été "en chanté" avec Phil Siné !



Sur son « impossible blog » d'authentique cinéphile parisien, David Tredler nous fait vivre ses trépidantes mésaventures de
spectateurs, entre les émerveillements passionnés qui ponctuent sa cinéphilie et les énervements contre les trop nombreux spectateurs indélicats... A la façon des billets de son blog si personnel et dans le cadre de notre série d'été « en chanté », il accepte aujourd'hui de nous raconter un
échantillon des nombreuses émotions que la musique évoque pour lui dans une salle de cinéma...


Quelle est donc la première note de musique entendue dans une salle de cinéma… quel âge avais-je… C’était probablement celle accompagnant le célèbre logo Disney. A moins que ce ne fût le
roulement de tambour de la Fox. Les entrées en matière musicales des studios hollywoodiens font partie intégrante de l’imaginaire musical que l’on associe au grand écran, parce qu’on les a
entendues des dizaines, des centaines de fois. Mais il est des notes de musique dont il n’a pas nécessité des centaines d’écoutes pour qu’elles se logent pour longtemps dans notre mémoire. Des
notes de musique dont je me souviendrai probablement toute ma vie. Des notes indissociables d’une image. Des notes qui font parcourir un frisson à travers moi et qui n’ont pas le même sens ni la
même puissance sans les images qui les accompagnent. Il est celles qui sont iconiques et avec lesquelles il semble que l’on a passé notre vie. Mais les entendre dans une salle de cinéma est d’une
saveur bien plus grande. Je m’en suis rendu compte en allant traîner du côté de la Cinémathèque Française lorsque celle-ci a consacré une rétrospective tred_moissons_ciel.jpgde son œuvre à Steven Spielberg. Même si je
connaissais déjà par cœur la filmographie de Spielberg, il y en avait tant que je n’avais jamais vu sur grand écran, ou pas depuis l’enfance, que je n’ai pu résister à aller m’y promener.

La musique de John Williams m’a fait l’effet d’une madeleine de Proust lorsque les notes de « Jurassic Park » ont retenti dans l’enceinte de la salle Langlois. Celles des « Aventuriers de l’Arche
Perdue » m’ont fait trépigner de jubilation sur mon fauteuil. Ce genre de musique me prend telle une bourrasque à chaque fois que je replonge en salle dans un film qui a accompagné mon enfance et
mes premiers pas de cinéphile. Mais il y a plus fort que le facteur nostalgie. Plus fort que les sons des souvenirs de l’enfance. Il y a le choc de la découverte.

Cette petite musique qui résonne à vos oreilles et se glisse dans le paysage d’un film que vous découvrez sur grand écran, lorsqu’il règne une alchimie indéfinissable entre un plan et une note,
entre une séquence et un mouvement, ou une chanson. Cet instant d’osmose parfaite, je le chéris entre tous lorsqu’il se produit sous mes yeux, à mes oreilles, alors que je suis calé dans mon
fauteuil de cinéma et absorbé par ce grand écran doué de vie.

Je pourrais en citer tant de ces instants cinématographiques suspendus, ces tred_harry_lime.jpginstants où
le temps semble ralentir et où le cœur s’emballe. Je revois Orson Welles, caché dans un coin de rue sombre, révélé à Joseph Cotten par une lumière inattendue. Alors qu’un chat se frotte contre
ses jambes, que de joyeuses notes de guitares méditerranéennes se font entendre. La caméra zoome sur le visage d’Orson, qui s’était fait attendre pendant plus de 40 minutes dans le film, et se
trouve enfin révélé, alors que l’air de guitare, collé au sourire malin de Welles et à la surprise de l’apparition, rend cette scène du « Troisième homme » mémorable.

J’entends d’ici l’air de Tôru Takemitsu, dans ces premières minutes de « Dodes’kaden » qui nous font découvrir un jeune homme s’imaginant conduire sa propre locomotive au milieu des taudis de son
quotidien, cet air si doux, si entraînant et où pointe cependant l’amertume qui parcourt le film d’Akira Kurosawa.

J’entends aussi poindre la musique des films de Terrence Malick, le « Gassenhauer » de Carl Orff alors que Martin Sheen et Sissy Spacek vivent à tred_badlands.pngl’écart de la société et jouent aux sauvages dans la
nature texane, ou le « Carnaval des animaux » de Camille Saint-Saëns qui sublime les images entre chien et loup des « Moissons du Ciel », où la grimace déçue de Sam Shepard répond aux yeux perdus
de Richard Gere.

Je me revois, écrasé et ébahi par l’attente de l’arrivée du train dans la séquence d’ouverture d’ « Il était une fois dans l’Ouest », quand le bruit du vol des mouches laisse la place à cet air
d’harmonica si emblématique, au moins aussi emblématique que les sifflements en rythme des prisonniers de guerre du « Pont de la rivière Kwai » que j’ai pour la première fois entendus sur grand écran il y a quelques
semaines à peine
.

Je sens encore les tambours cogner dans ma poitrine, lorsque la salle s’est éteinte et que sur cet immense écran noir a retenti la musique de Maurice Jarre, celle de « Lawrence d’Arabie ». 
Je les sens toujours cogner en moi, ces tambours, en me remémorant Peter O’Toole observant de son regard azur l’immensité d’un désert que les tambours imaginés par Jarre ont rendu palpable. Plus
les tambours cognaient, plus je me voyais là, au côté de Lawrence, dans cette chaleur infinie.

Je me rappelle l’excitation sans commune mesure lorsqu’après l’apparition des logos de la 20th Century Fox et de Lucasfilm, après le fameux « A long time ago, in a galaxy far, far away », les
premières notes que John Williams a créé pour George Lucas et sa saga « Star Wars » ont retenti en ce jour d’octobre 1999 en préambule à « La menace fantôme », après une si longue attente.

Je revois le temps s’arrêter lorsque Tony Leung et Maggie Cheung se tred_chungking.jpgcroisèrent
dans une ruelle pluvieuse de Hong Kong et que soudain se fit entendre cet air de musique de Shigeru Umebayashi depuis à jamais associé à « In the mood for love » de Wong Kar Wai.  Wong Kar
Wai, à qui l’on doit également l’une des plus belles entrées à l’écran, lorsque la serveuse Faye Wong de « Chungking Express » écoute à fond « California Dreamin’ » des Mammas & Pappas et que
la silhouette d’un policier se profile dans le flou. Celui-ci se rapproche alors que l’on entend « All the leaves are gone… and the sky is grey… ». Arrivé au comptoir, le flic en uniforme retire
sa casquette et lance un sourire à Faye Wong : Tony Leung déjà, dans une apparition indissociable de la chanson des Mammas & Pappas, comme le sourire d’Orson Welles est à jamais associé à ce
petit air de guitare…
De tels instants cinématographiques où la musique a su cristalliser une image, j’en garde précieusement des centaines dans mon imaginaire, prêts à ressortir dès que j’entends la bonne note de
musique…



Retrouvez David Tredler sur "l'impossible blog ciné" !































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3 commentaires:

  1. J'aime beaucoup ce qu'écrit David Tredler que je lis sur son blog !


    Merci de l'avoir mis en avant chez toi !


    Ah la musique au cinéma tout un beau programme !


    Bisous

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  2. Fidèle (frustré !) de chez David, je débarque ici par le lien qu'il a mis sur son blog. J'avais quand même de te dire que je te lisais aussi de temps à autre, Phil. Il faudrait que je le fasse
    plus souvent.

    Merci de partager avec nous ta passion !

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  3. je devrais proposer à David de m'écrire plus d'articles pour que tu viennes plus souvent alors... ;)


    merci de ton passage et de ton message, ça fait très plaisir ! :o)

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