dimanche 30 septembre 2012

[Critique] Antiviral, de Brandon Cronenberg



antiviral
(Canada, 2012)



Sortie le 13 février 2013



Le Jour du Saigneur # 85




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Dans la famille Cronenberg, on connaissait déjà bien David, le père, avec ses œuvres zarbis et organiques si particulières… Eh bien il faudra désormais compter avec Brandon, le fils, avec ses
œuvres zarbis et organiques si particulières… Il est d’ailleurs étonnant que la progéniture du réalisateur de « La mouche » se jette avec autant d’évidence sur les traces de son paternel, tant cet «
Antiviral » rappelle en de nombreux points les premières œuvres cronenberguiennes, de « Chromosome 3 » à « Vidéodrome », depuis « Scanners » et voire même jusqu’à « eXistenZ » !

Pour son premier long métrage, Brandon propose ainsi une œuvre déconcertante, à la froideur clinique et à l’atmosphère aussi glacée que les films de jeunesse de David… On retrouve d’ailleurs dans
« Antiviral » cette même sensation que l’on éprouve généralement devant les images de jour du saigneurCronenberg père, partagé entre le rejet et la
fascination, entre le dégoût et l’attraction irrésistible… C’est que le fils mêle avec la même aisance le pulsionnel et le cérébral, la machine et la chair, dans une forme de fusion impossible
entre l’esprit et la matière… La mise en scène, lente et quasi-mathématiques, nous emporte avec elle et malgré nous dans un bad-trip hypnotique pas forcément agréable, mais duquel on ne
ressortira pas indemne, pour le meilleur (sur l’écran du cinéma) et le pire (à l’intérieur de nous-même).

Il est troublant alors de ne pas savoir exactement ce que l’on a pensé du film aussitôt les lumières rallumées, mais c’est bien là la force de ce cinéma si particulier et que l’on croyait
jusque-là inimitable (bon, du père au fils, on peut penser que c’est une simple histoire de gênes après tout…) : c’est le genre de fiction à proliférer en nous, à nous mettre mal à l’aise, à nous
donner un sentiment d’« inquiétante étrangeté », à nous hanter et à nous questionner jusqu’à ce que l’on cède pour admettre qu’il nous a (dé)montré quelque chose… n’est-ce pas justement là que se
trouve tout l’intérêt du cinéma même : « montrer » ?

Mais si Brandon C. s’inspire beaucoup de David C. sur un plan formel, on sent qu’il a néanmoins quelque chose d’autre à dire et qu’il le fait avec fracas et vigueur, pour nous parler avec
modernité de son monde à lui, celui dans lequel il a grandi et qui n’est déjà plus celui que nous décrivait par métaphore son père il y a déjà plus de trente ans… Car sa vision d’un futur
déshumanisé et obsédé par la célébrité n’est pas une aberration et pourrait très bien être une projection plausible des dérives actuelles de notre société ! Dans son monde, le personnage
principal (interprété par Caleb Landry Jones, jeune acteur au physique ingrat et au jeu fascinant) travaille ainsi pour une société qui propose à ses clients de se faire contaminer par un virus
contracté par leur star préférée, une façon finalement absolue et hyper intime de communier avec son idole, en allant jusqu’à partager ses germes ! Une vision terrifiante et a priori absurde,
mais pas si bête en y réfléchissant un instant, tant les comportements actuels de certains fans frôlent parfois la folie pure… Dans le monde d’« Antiviral », des restaurants proposent même des «
steaks de célébrités », morceaux de chair recréés à partir des cellules vivantes de ces dernières : la passion jusqu’à la dévoration, recherche ultime dans une société malade et monstrueuse,
devenue anthropophage et cannibale ! Des représentations glaçantes et passionnantes de nos peurs les plus enfouies, que le père de ce jeune réalisateur prometteur n’aurait certainement pas
reniées…



Perspective :



- Antiviral à l'Etrange Festival 2012































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2 commentaires:

  1. Et est-ce qu'on sait si Brandon C. ne serait pas fan de Marilyn Manson par hasard ? Ca aurait carrément pu lui inspirer ce film car la thématique des comportements délirants des fans pour leurs
    idoles se retrouve dans les chansons et réflexions de MM depuis bien longtemps, notamment texto cette idée de se faire contaminer par leurs maladies. Il y a toujours eu aussi chez lui un regard
    critique sur une société déshumanisée, contrôlée par le star system, les médias et le futile, sous médocs à outrance et rendue insensible, et où on est prêts à vendre/acheter n'importe quoi... En
    outre, Marilyn Manson est aussi un artiste qui dérange et interroge, dont on regarde parfois les vidéos partagé entre dégoût et fascination (ou alors c'est juste moi pour le coup? :)

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  2. j'ai appris récemment que le petit brandon a été bassiste dans un groupe punk... mais de là à dire qu'il est fan de manson, il faudrait lui demander directement ! :)

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