lundi 1 octobre 2012

[Critique] Vous n’avez encore rien vu, d’Alain Resnais



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(France, 2011)



Sortie le 26 septembre 2012




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A partir d’un matériau purement théâtral - deux pièces de Jean Anouilh, "Eurydice" et "Cher Antoine ou l'amour raté"-, Alain Resnais réalise un film incroyablement gonflé et novateur, aux
frontières parfois d’une expérimentation typique d’un jeune cinéaste fougueux… c’est dire si le nonagénaire possède encore une vigueur et une énergie certaine pour nous offrir encore
d’authentiques merveilles !

Ce qui attire le plus l’œil, à la vue de « Vous n’avez encore rien vu », c’est à quel point Resnais parvient haut la main à honorer la gageure et le pari fou qui caractérise son film. Après avoir
réuni les comédiens qui à travers le temps ont incarné les différentes versions de sa pièce dans sa maison, un homme désormais défunt leur présente une nouvelle captation de cette pièce, en leur
laissant le soin de juger si elle mérite qu’on la finance… C’est alors que se déroule la pièce, via d’abord cette captation que l’on voit sur écran, puis via les différents comédiens devenus
spectateurs et redevant acteurs : leurs différentes voix se mêlent, ainsi surtout que leurs jeux différents, révélant leurs âges et leurs époques, montrant la modernité atemporelle du texte
qu’ils jouent… Mais de ce concept très théâtral, Resnais, le cinéaste « moderne » issu de la « nouvelle vague » française, sait le transformer en pur objet cinématographique… Et à la façon d’un
Lars Von Trier sur « Dogville », notamment, il démontre que le décor, même figé ou absent, n’est pas le révélateur d’un art, mais que tout n’est au contraire que mise en scène : « Vous n’avez
encore rien vu », même confiné dans des décors factices de théâtre, se révèle ainsi d’un bout à l’autre comme un pur film de cinéma, fourmillant de trouvailles et de techniques de réalisation que
l’on ne trouve que dans le septième art !

Mais outre la mise en scène, intelligente et innovante, réussissant entre autres des mises en abyme passionnantes (la captation théâtrale, véritable « film dans le film » est d’ailleurs réalisée
par un autre regard que celui de Resnais : celui de Bruno Podalydès…), « Vous n’avez encore rien vu » est aussi un grand film sur la direction d’acteurs ! Il est d’abord amusant de voir tous ces
grands acteurs français introduits à l’écran dans leurs propres rôles par un même coup de téléphone qu’ils reçoivent tour à tour (générique ludique et original), puis on demeure fasciné et
passionné par leurs jeux et la superposition de leurs voix tout au long du film : chacun se révèle comme l’écho de l’autre, ou inversement… Si Resnais ne joue pas toujours le jeu jusqu’au bout,
privilégiant parfois son couple fétiche (Sabine Azéma et Pierre Arditi) au risque de quelques menues longueurs, le concept reste suffisamment intrigant et surprenant pour nous tenir en haleine
jusqu’au bout, nous délivrant au passage de belles tirades sur l’amour, le vie, la mort, ou le temps qui passe… Pour ponctuer le passage du temps, même Bruno Podalydès a eu l’idée de fabriquer un
véritable pendule de Foucault dans le « film dans le film » qu’il a réalisé : "Je tenais à ce que le pendule soit autonome, qu’il mène sa vie, que les comédiens s’écartent pour le laisser passer.
Quel que soit le rythme de la scène, il y avait, visible, un temps objectif, inéluctable".



Autres films d'Alain Resnais :



L’année dernière à Marienbad (1961)



Les herbes folles (2009)































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2 commentaires:

  1. Un film magnifique, innovant, émouvant, drôle. Et pour ma aprt pas ennuyeux du tout :)

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  2. Un beau film, une magnifique performance d'acteurs et une vrai originalité intercative... 3/4

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