mardi 16 août 2011

[Carte blanche] Little Miss Sunshine, de Jonathan Dayton et Valerie Faris (vu par Joss)


Joss est un garçon sensible de 28 ans, « parisien mais pas trop », comme il le dit lui-même… Il nous raconte ses « histoires d’avril » sur son joli
blog
, à base d’anecdotes ou de tranches entières de sa propre vie, de souvenirs intimes ou de mésaventures variées, qu’il raconte toujours avec beaucoup de vivacité et un humour plein de
finesse. Ses billets doux le rendent à la fois drôle et émouvant, savoureux et attachant, et on les parcourt toujours avec bien du plaisir… Il nous fait l’honneur aujourd’hui d’écrire chez Phil
Siné, par le biais d’une carte blanche qu’il a choisi de consacrer à un film qui lui va comme un charme : « Little Miss Sunshine ».



carte blanche
little_miss_sunshine.jpg



Little Miss Sunshine, de Jonathan Dayton et Valerie Faris (Etats-Unis, 2005)



Carte blanche de Joss



Blog : Histoires d'avril



 



Une camionnette, des Miss et des Loosers



Autant te le dire d’emblée, parler de cinéma est un exercice que je ne maîtrise pas vraiment, mais comme Phil Siné me l'a proposé gentiment je te raconte mon film à moi, « Little Miss Sunshine ».
Je ne saurais pas exactement dire pourquoi, mais c'est le premier titre qui m'est venu à l'esprit lorsque j'ai fouillé ma mémoire à la recherche du film dont j’aurais le plus envie de parler.

Olive est une petite gamine d'Albuquerque au sourire pétillant et aux rondeurs joviales qui rêve devant son écran de télévision de devenir Miss America. Rien que ça. Le parcours menant à ce Graal
ultime étant semé des pires embûches et plein de rivales prêtes à mordre, on va commencer raisonnablement par postuler au concours de Little Miss Sunshine pour lequel Olive est sélectionnée grâce
à un petit coup de pouce du destin. Toutefois, autant jouer franc jeu tout de suite ma petite Olive, en tant qu’observateur extérieur, on se dit rapidement que c'est pas complètement gagné, cette
histoire de concours. Bien au delà de la préparation de ce concours de beauté, ce film nous raconte quelques jours du parcours d’une famille qui paraît furieusement bancale de tous les angles
d’où on puisse la voir.

Olive croit dur comme fer en sa réussite et s’entraîne chaque jour sous la houlette de son grand-père paternel libidineux et gentiment trash dans le but de préparer un numéro dont eux seuls
connaissent la teneur. La mère d’Olive semble être le seul personnage sensé et sain d’esprit au sein de la famille - tout est relatif – et est le lien essentiel entre les autres personnages. Son
père est un formateur monomaniaque et un poil exaspérant qui cherche à démontrer à chaque instant l’efficacité de sa méthode miracle pour éveiller le winner qui sommeille en chacun de nous,
pauvres loosers ordinaires. Son frère est un adolescent torturé ayant fait vœu de silence (et apparemment la grève du coiffeur) depuis neuf mois pour affirmer sa détermination à devenir pilote
d’avion (euh…). Au début du film la famille est rejointe par l’oncle maternel d’Olive, tout fraîchement sorti de l’hôpital après une tentative de suicide faisant suite à une déception amoureuse,
celui-ci doit rester sous la surveillance de tout ce petit monde afin d’éviter une récidive. On en est franchement désolé pour lui.

Dans le but de se rendre en Californie sur les lieux du sacro-saint concours, la famille embarque à bord de ce qui devient au fil du voyage le personnage le plus attachant à mes yeux : une
camionnette Volkswagen jaune dont la jeunesse doit remonter à la Guerre de Sécession, pas moins. Avec une dérision récurrente, le trajet, ses discussions et les péripéties qui l’accompagnent
amènent les membres de la famille à se rapprocher, s’ouvrir et se découvrir. Etre un winner ne se décrète pas vraiment, quoi qu’en dise le programme en neuf étapes dont le père est si fier.

De stations-service en motels, chacun réalise peu à peu l’évidence du mur vers lequel ils sont en train de foncer et les questionnements du frère et de l’oncle offrent une belle réponse au
concept du winner. Un savant mélange d’humour légèrement noir, de tendresse et d’émotion délicate nous emmène à bord de la camionnette jusqu’à cette scène jubilatoire où le fameux numéro secret
nous est dévoilé.

Le film est truffé d’éléments qui s’opposent, symboles de la réussite implacable d’un côté et objets vivotant tant bien que mal de l’autre. Les rivales d’Olive lors du concours, petites machines
à gagner aussi naturelles que des soldats de plomb et programmées pour bouter l’adversaires hors de leur chemin, tellement parfaites, sont à l’exact opposé de cette camionnette récalcitrante à
l’embrayage capricieux et au klaxon borné. Les scènes les plus savoureuses restent d’ailleurs celles à suspense dans lesquelles la famille s’emploie à pousser la camionnette défaillante pour lui
donner l’élan suffisant, le spectateur (enfin, moi) se prend alors à vouloir pousser l’engin avec eux puis les agripper à l’intérieur. Ces séances de bobsleigh sous le cagnard semblent avoir une
influence considérable sur la cohésion familiale.

A mon sens, l’humour du film frôle parfois le graveleux sans jamais tomber pour autant dans le mauvais goût. Il se dégage une tendresse évidente à mesure que les membres de la famille se
rapprochent. Le film me laisse chaque fois un brin envieux en pensant à ces héros hasardeux et hésitants, capables à la fin de laisser leur embarras au placard parce que l’essentiel est ailleurs.
Les loosers bienheureux.



 



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