samedi 7 septembre 2013

[Critique] Backstage : Mylène Farmer part en live



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Backstage



d’Emmanuelle Bercot



(France, 2004)



Passez un été "en chanté" avec Phil Siné !




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En intitulant son film « Backstage », la cinéaste Emmanuelle Bercot nous emmène en « coulisses ». A priori dans les coulisses du monde du show-business à travers la description du quotidien d’une
grande star de la variété française, mais peut-être bien plus certainement dans celles de l’adolescence, thème cher à la réalisatrice, avec le parcours de cette jeune « fan », absolue et maladive
dans son adulation, qui réussit à pénétrer l’intimité de la chanteuse à qui elle voue littéralement un « culte »…

C’est par le biais d’une émission à mi-chemin entre la variété et la télé-réalité que « Backstage » va se faire croiser deux mondes qui normalement ne se rencontrent jamais : celui de Lauren
Waks, célèbre chanteuse à succès, et celui d’une de ses plus grandes fans de 17 ans, Lucie, qui voit sa star débarquer à son domicile pour lui chanter une chanson, suite à la demande qu’a fait sa
mère, tout aussi allumée et collectionneuse d’autographes, à l’émission de télé. Sauf que la rencontre n’a pas lieu à ce moment-là, Lucie ne trouvant d’autre réaction que de s’enfermer dans sa
chambre devant le choc d’une telle confrontation… C’est à Paris, où la jeune fille s’enfuit pour retrouver son idole, que Lauren accepte de la recevoir dans l’hôtel de luxe où elle loge et de lui
faire alors pénétrer l’univers si fascinant dans lequel elle évolue…

C’est avant tout ce « choc » improbable et impossible de la star inaccessible et de sa fan que voulait montrer Emmanuelle Bercot : "Il y a un jeu du mystère et de la frustration. Le mirage doit
être préservé à tout prix. Entre les deux parties, le parcours est balisé par des vitres, des barrières, des gardes du corps... Autant de limites dressées entre deux mondes irrémédiablement
opposés, bien qu'entrelacés. Parfois, la rencontre se produit, mais les secondes sont alors sauvagement comptées. A l'origine de « Backstage », il y a eu cette question : qu'est-ce qui se
passerait si ces instants de quelques secondes se prolongeaient ? Qu'est-ce qui se passerait si le rapprochement illusoire entre une fan et son idole avait lieu, vraiment, physiquement, dans la
durée que suggère la découverte de l'un par l'autre ?" Par le prisme de la folie obsessionnelle d’une fan, qui révèle alors au sens propre sa position de « fanatique », la cinéaste filme au fond
quelque chose de la folie adolescente : les réactions passionnelles et irrationnelles, spontanées et presque dangereuses… Il y a de la cruauté, voire du sadisme, dans le jeu que finissent par
jouer les deux personnages principaux, et un mélange d’amour-haine qui demeure le vecteur de toutes les fascinations. Si Lucie finit par se transformer en succube quasi-vampirique à l’égard de
Lauren, commençant par lécher sa brosse à dents pour finir par s’offrir à son ex-amant, Lauren se révèle de son côté tout aussi perdue et enfantine que son admiratrice… La relation qu’elles
tissent se fait progressivement plus ambiguë et semble pouvoir dégénérer à tout instant : réaction épidermique quand la fan surprend sa star couchant avec un autre – la rendant alors « impure » à
ses yeux – ou tentative de noyade de sa fan pour la star qui se sent au fond dévorée par l’autre, au point de ne plus pouvoir exister ailleurs que dans ses fantasmes… De caprices de star en
dérives de fan, « Backstage » s’enfonce dans des abîmes de cruauté et d’autodestruction assez impressionnants !

Pour incarner ces deux personnages à fleur de peau, Bercot dirige avec beaucoup de talent deux actrices qui n’en manquent pas non plus ! Isild Le Besco fait presque peur tant son interprétation
de la folie de la fan, jusqu’à la perte de soi, semble authentique, et Emmanuelle Seigner électrise dans sa posture à la fois sévère et extrêmement fragile, glaçante et sensuelle… Son personnage
se rapproche d’ailleurs par bien des aspects d’une star bien connue de la chanson française, la seule à pouvoir comme dans le film créer un tel engouement auprès de son public : Mylène Farmer ! On dirait que les créateurs de « Backstage » se sont amusés à
disséminer tout au long du film comme autant d’indices révélant l’inspiration du personnage de Lauren Waks… La vision d’un concert qui ressemble plus à une messe grandiose et ritualisée, la
distance par rapport aux médias (Lauren ne voulait pas faire l’émission à la base), les fans qui campent devant son hôtel, l’évocation d’un certain « Laurent » à la composition des chansons de
Lauren (on pense forcément à Laurent Boutonnat), l’histoire au détour d’un dialogue des paillassons qui disparaissent du domicile de la star (des fans volaient régulièrement ceux de Mylène Farmer
lorsqu’elle n’habitait pas encore sa résidence surveillée), l’ambiguïté autour de la mort du père ou de l’inceste (la chanson « Blanc comme neige »)… et puis les chansons composées pour le film,
bien évidemment, enregistrées en qualité professionnelle avec la voix d’Emmanuelle Seigner (disponible dans leur intégralité sur la superbe B.O. du long métrage), qui paraissent parodier le style
poétique et mystérieux de Farmer (rythmes et musicalité, nappes sonores, vocabulaire utilisé dans les paroles, jeux d’écriture automatique…), au point de créer la même fascination chez
l’auditeur…



Perspective :



- Mylène Farmer fait son cinéma chez Phil Siné !































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