vendredi 1 juin 2012

[Critique] Blade Runner : the final cut, de Ridley Scott


blade_runner.jpg(Etats-Unis, 1982-2007)




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Avec « Blade Runner », Ridley Scott faisait entrer le cinéma de science-fiction dans une nouvelle ère, si nouvelle peut-être que son film en fût d’abord un retentissant échec lors de sa sortie en
salle… Ce qui ne l’empêcha pas par la suite de gagner allégrement le statut d’œuvre culte, largement mérité par ailleurs !

Proposant la première adaptation d’un roman de Philip K. Dick à l’écran (suivront par la suite « Total Recall », « Planète Hurlante », « Minority Report » ou plus récemment « L’agence »), le cinéaste visionnaire lançait finalement une nouvelle mode, en soignant
particulièrement et singulièrement l’univers et l’atmosphère de son film… Intégrant notamment certains ingrédients du film noir, « Blade Runner » impose une vision inhabituellement sombre du
futur, dans un Los Angeles oppressant et ultra glauque de 2019, toujours dans une nuit poisseuse et sous une pluie tenace… Le film oppose l’extrême modernité de voitures volantes ou d’immenses
bâtiments futuristes brillants de mille feux à la sinistre réalité sociale des bas-fonds grouillant de vermines, de pilleurs et de miséreux : on pense alors aux visions expressionnistes 
d’un Fritz Lang dans « Metropolis » !

Peu à peu envoûté par l’ambiance et le rythme extrêmement lent du long métrage (contrastant parfaitement avec les œuvres fantastiques énergiques et ostentatoires à la mode de l’époque façon «
Star Wars » !), on sombre avec le personnage principal du film dans une mélancolie infinie,
portée par une mise en scène d’un calme feutré et englobant et par une bande originale nimbée par la musique hypnotique de Vangelis… Sous nos yeux hallucinés, Harrison Ford incarne le « blade
runner » Rick Deckard, chargé de retrouver et de « retirer » des robots dissidents dangereux revenus sur Terre pour trouver un moyen de prolonger leur durée de vie, limitée à quatre ans…

Ce qui trouble le plus est que ces robots ne ressemblent en rien à des robots : appelés « réplicants », ils imitent justement à la perfection les êtres humains, au point de se confondre avec eux
et de ne plus toujours savoir s’ils sont des androïdes ou de véritables hommes… Cette ambiguïté permet d’offrir à « Blade Runner » une vraie profondeur philosophique et métaphysique sur la vérité
humaine, qui explique en partie le titre original du roman de K. Dick sur lequel se base le film (« Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? ») et confronte le spectateur à une œuvre
plus subtile et cérébrale comme « 2001, l’odyssée de l’espace »… On
demeure notamment bouleversé par le beau personnage de Rachel (Sean Young), robot persuadée qu’elle est humaine à cause des souvenirs qu’on lui a « implantés » : la prise de conscience de sa
nature factice sera bien sûr terrible et la poussera elle aussi à la désobéissance et à la fuite… Mais l’ultime version du film, immensément plus fine que le montage d’origine, se permet même
d’aller plus loin en faisant planer le doute sur le personnage de Deckard lui-même, à travers la licorne en origami qu’il trouve à la fin, laissée par Bryant, un personnage qui connaîtrait ainsi
ses pensées les plus intimes, Deckard rêvant justement à une licorne…

Si la noirceur finit par tout emporter dans « Blade Runner », laissant planer le doute sur la notion d’âme ou d’existence des êtres, cette noirceur sait toujours se faire intensément poétique…
Pour preuve l’ultime monologue du chef des réplicants dissidents juste avant ses derniers instants de « vie » et juste après avoir épargné Deckard en le sauvant dans un dernier geste profondément
humain : "J'ai vu tant de choses que vous humains, ne pourriez pas croire. J'ai vu de grands navires en feu surgissant de l'épaule d'Orion. J'ai vu des rayons fabuleux, des rayons C, briller dans
l'ombre de la porte de Tannhauser. Tous ces moments se perdront dans l'oubli, comme les larmes dans la pluie. Il est temps de mourir." Le mystère de ses mots, souligné par le superbe envol d’une
colombe qu’il tenait dans les mains, demeure d’une sublime intensité dans les mémoires de spectateurs de « Blade Runner » et parvient à émouvoir à chacune des visions que l’on pourra avoir du
film !



Autres films de Ridley Scott :



Alien, le huitième passager (1979)



Thelma et Louise (1991)































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5 commentaires:

  1. Papa tango Charlie2 juin 2012 à 03:49

    Je suis bien content de voir blade runner parmi tes critiques: ça m'a manqué de ne pas avoir tin avis quand je l'ai regardé cette semaine, avant prometheus. J'ai trouvé la version finale très
    difficile d'accès, et malheureusement je l'ai visionné à une heure trop tardive, du coup j'ai trouvé le tout trop lent au point de somnoler...^^ la version d'origine est peut être plus facile à
    approcher, mais comme il paraît que la fin est trafiquée ça donne plus envie :/

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  2. Voilà un commentaire qui me rassure car j'ai eu exactement la même expérience en voyant le film pour la 1ère fois l'an dernier... Alors qu'on m'en avait dit tellement de bien pendant toutes ces
    années passées sans le voir ! Il faudrait que je lui redonne sa chance un de ces jours maintenant que j'ai lu ta critique.

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  3. Chef d'oeuvre absolu et cultissime. Et dire que Scott à l'intention d'en faire une suite :( ... 4/4

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  4. papa tango charlie9 juin 2012 à 05:27

    phil: comme c'est gentil d'avoir posté cette critique en pensant en moi, le jour de mon anniversaire en plus, quel cadeau!  Oui, je pense regarder la final cut à nouveau un jour ou je serai
    plus éveillé: dans l'immédiat c'est vrai que je suis plus tenu en haleine par les zèbres à pois qui chante à tue tête "afrocirque!" :S 

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  5. oui, encore bon anniversaire d'ailleurs !


    oh, je n'ai jamais vu de madagascar je crois : ni le 1, ni le 2, ni le... 12?

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