vendredi 17 juin 2011

[Critique] Prud’hommes, de Stéphane Goël



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Prud’hommes, de Stéphane Goël (Suisse, 2010)



Sortie le 8 juin 2011



Note :
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Avec « Prud’hommes », Stéphane Goël signe un documentaire passionnant sur cette juridiction qui traite des conflits entre les employés et leurs employeurs… Si l’action se déroule ici en Suisse,
au fond peu importe, car les situations décrites sont suffisamment exemplaires et significatives pour permettre aux spectateurs français de comprendre, voire de s’identifier, aux différents
partis présentés.

En entrecroisant une multitude de cas, qui sont chacun plus ou moins approfondi et développé à l’écran, le documentariste alterne les dossiers plus ou moins graves, avec des patrons ou des
salariés plus ou moins impliqués dans leurs démarches… Mais c’est justement cette diversité des exemples qui dresse un tableau représentatif du monde du travail d’aujourd’hui, et surtout de ses
souffrances et de ses abus, plus que jamais dans une époque en crise, où les intérêts économiques dépassent trop souvent l’importance des vies humaines… Il est un peu étonnant de constater
d’ailleurs que tout se termine souvent avec des questions d’argent, comme si les sommes versées suffisaient à réparer tous les conflits et toutes les douleurs… Cela permet au moins de reconnaître
les problèmes et c’est toute la subtilité du rôle des juges, que l’on voit toujours tempérants, parfois fermes et toujours s’efforçant de ne pas léser un côté plus que l’autre : comme ils le
rappellent souvent, il n’y a pas de gagnants ou de perdants dans ce tribunal, et les individus pourront souvent avoir l’impression d’avoir perdu en cédant chacun un peu sur leurs revendications…
Une sacrée vision de la société, résumée par l’ironique affiche du film, vu par le prisme de ce que l’homme moderne a choisi de mettre au cœur de tout : le travail et l’argent comme valeurs
absolues.

Prisonnier d’un dispositif contraignant (la discrétion s’impose lorsque l’on film dans un tribunal), Stéphane Goël parvient pourtant très bien à faire respirer son film, en présentant notamment
la préparation des dossiers avec les syndicats, ou en laissant sa caméra filmer les « à côtés » et l’environnement de la cour de justice… On aperçoit notamment quelques conversations de couloirs
entre les personnes en conflits : la « salle des pas perdues » devient alors parfois le « off » du tribunal, là où les affaires ont le plus de chance de s’arranger… Mais par l’habileté et la
force de son montage, le documentariste parvient surtout à nous raconter des histoires, dans lesquelles on trouvera des débuts de réponses ou beaucoup de pathos : le film provoque souvent
l’empathie des spectateurs avec les personnages, qu’on peut aimer ou détester, qui peuvent nous faire rire ou nous émouvoir jusqu’aux larmes… Entre un vieux de la vielle un peu alcoolo et un peu
filou qui ne voit pas où est le problème si on lui a déjà retiré son permis trois fois en état d’ébriété et une jeune femme de l’Est renvoyée de son travail juste après un congé maternité, on
passe également de l’hypocrisie à la sincérité sur les visages : « Prud’hommes » se transforme alors en petit théâtre de la vie et des mœurs modernes… Le film devient presque une fiction
exemplaire sur la comédie humaine, et c’est en cela qu’il touche à une forme de grand cinéma !































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