vendredi 30 juillet 2010

Des hommes et des dieux, de Xavier Beauvois (France, 2010)



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Note :
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Grand prix du Jury au Festival de Cannes



 



Sortie nationale le 8 septembre 2010



 



« Des hommes et des dieux » décrit les derniers jours de sept moines français installés dans le monastère de Tibéhirine, qui furent enlevés puis assassinés par un groupe armé islamiste. Si le
film s’appuie bel et bien sur ce fait historique authentique, sur lequel planent encore certains doutes aujourd’hui, ce n’est pas pour en livrer une vision rigoureuse, documentée ou illustrative.
Xavier Beauvois se sert en réalité ici de l’Histoire comme d’un prétexte pour raconter une véritable odyssée spirituelle et humaine…

Le cinéaste plutôt peu prolifique livre un travail de mise en scène remarquable et exemplaire : des cadrages souvent quasi picturaux, inspirés de la peinture religieuse, une belle mise en relief
de paysages de montagnes sublimes, une exploitation de la lumière intense et réfléchie… le tout servi par une interprétation tout à fait juste et sans bavure, d’un casting très classe, à
commencer par Lambert Wilson et Michael Lonsdale, tous les deux impeccables ! En exploitant ainsi un tel sujet et en lui offrant une réalisation à la fois simple, précise et très pure, il offre
finalement un film en tout point inattaquable, au service d’un message indiscutablement recevable, baigné par une spiritualité et une humanité magnifique, prônant les notions d’entraides et de
sacrifices de la part de ces moines admirables, qui offrent leurs vies à la cause d’un pays qui n’est pas le leur… Qui a dit « bons sentiments » ?

Car au fond, c’est peut-être le problème d’une œuvre qui se veut trop parfaite : servir quelque chose de tellement beau et touchant, de si parfaitement idéalisé, que ça en devient trop lisse et
un tout petit peu chiant… Suffit-il de livrer une nouvelle Cène à la Dreyer (le dernier repas des moines dans le monastère), sur la musique du « Lac des cygnes », pour faire du mystique à la
Dreyer ? N’y a-t-il pas aussi dans le geste de Beauvois une question d’époque différente ou d’imitation un peu trop simiesque ? A trop vouloir être intouchable dans sa forme comme dans son
discours, Beauvois prend en somme le risque de devenir pénible et décevant, voire carrément trop consensuel… Le tout est à l’image de cette ultime séquence, où la mort des moines est laissée à
l’imagination du spectateur : on les voit doucement disparaître dans la brume, comme digérés par l’immensité du paysage… Tout semble alors trop calme. Où est donc passé la fougue du cinéaste et
tout son talent « à vif », toute cette urgence de faire du cinéma, toute cette violence contenue aussi, que l’on voyait dans le magnifique « N’oublie pas que tu vas mourir » ou même encore dans «
Le petit lieutenant » ? Mais c’est peut-être ça, hélas, ce que l’on appelle la « maturité »…



 



Mise en perspective :



- La Palme d'or du
Festival de Cannes : Oncle Boonmee (celui que se souvient de ses vies antérieures), d’Apichatpong Weerasethakul (Thaïlande, 2010)































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8 commentaires:

  1. c'est ce qui me plait ce côté calme et contemplatif. Tu sais, en général, dès qu'il est question de religion c'est soit raillé gentiment par une comédie, soit un brulot pleins de clichés eronnée
    (Agora, Antichrist).


    je ne suis absolument pas croyant, mais ma formation d'historien et ma curiosité naturelle m'a toujours amené à me pencher sur le religieux. Et là, ce que tu appelles du bon sentiment ressemble
    pour moi plus à une description de l'idéal monastique. A la fois ce rigueur à la tache dans la foi (les prières, le travail de la terre- un truc génial a fairer au passage) et l'échange avec des
    gens qui ne partagent pas la même foi. Et puis, il y a l'ouverture à l'Islam. Je sais bien que le climat politique général laisse penser que d'un les pretres sont tous pédophiles et de deux les
    religions se tirent continuellement dans les pattes. Or, c'est tellement peu vrai!


    Des hommes et des Dieux montre surtout des humains dénudés devant un choix décisif. Les voir s'obtiner à aider le monde, à ne pas foutre en l'air leurs idéeaux et surtout à douter de leur foi
    (d'ailleurs, par définition, on doute tout le temps de sa foi) je trouve ça beau, trs beau même.

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  2. Eh, comment ça tu pars en vacances en septembre ! Quand ? Combien de temps ? Je veux tout savoir...

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  3. Niko (de Filmosphère) l'a vu 2 fois et m'a dit qu'il avait préféré le second visionnage. peut-être que ça te ferait pareil.

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  4. Je trouve aussi qu'au final Des hommes et des dieux est un film très consensuel.


    C'est bien mis en scène et le sujet est traité intelligemment mais moi aussi je préfère les premiers films de Beauvois.

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  5. Et si Xavier Beauvois avait pensé aux familles en ne présentant pas une fin rude ?
    Relisez ses interviews : quand la neige est tombée à la fin du tournage (signe du ciel ?), il a décidé de changer sa fin avec, en particulier, une pensée pour les familles des moines pour
    lesquelles elle aurait été violente (il prévoyait l'image choc des têtes égorgées des moines : les moulages étaient prêts). Et finalement, il a mis du symbole dans sa conclusion (certes pas
    forcément facile à saisir par tous) : otages et terroristes qui se fondent doucement dans le blanc de la neige vers le ciel avec en voix off le texte véridique du testament de frère
    Christian (qui explique qu'il se retrouvera en paix avec celui qui aura porté la main sur lui). Merci à Xavier Beauvois si il peut donner envie à quelques uns de lire ce texte magnifique de
    tolérance et merci à lui pour cette fin "apaisée".
    Désolé pour le pseudo mais je n'aurai pas apporté ce commentaire autrement.

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  6. "Des hommes et des dieux" est tout sauf un film prosélyte, et malgré ces scènes liturgiques minutieusement composées et son jaillissement de violence, n'est pas davantage un film qui se complait
    dans l'ostentation. Inutile dès lors de brandir les têtes des moines sur des pics, mieux vaut s'en prendre à demi-mot au résidu du colonialisme que peuvent représenter ces chrétiens sur la
    terre musulmane. Il faut, peut-être pour aider à comprendre leur présence sur place, rappeler que quelques uns de ces moines étaient des vétérans de la guerre d'Algérie. Après, on peut
    aussi trouver ça chiant (comme "Poetry" par exemple).

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  7. Voir l'interview exclusive de Tim Burton sur mon site.

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