jeudi 18 avril 2013

[Critique] Promised Land, de Gus Van Sant



promised land
(Etats-Unis, 2013)



Sortie le 17 avril 2013




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Anecdote amusante, Matt Damon voulait réaliser lui-même « Promised Land », dont il a co-écrit le scénario avec John Krasinski, autre acteur important du film… Pour des raisons de planning avec
d’autres projets en cours, il a du y renoncer, et c’est en en parlant au téléphone à Gus Van Sant juste avant de monter dans un avion que la solution a été trouvée : Gus Van Sant lui demande de
lui envoyer le scénario par e-mail, et lorsque Matt Damon rallume son portable en descendant de l’avion deux heures plus tard, il reçoit un message enthousiaste du cinéaste, qui souhaite réaliser
le film… Amis depuis les tournages de « Will Hunting » et « Gerry », la fibre écologique de Damon et Van Sant les prédestinait en quelque sorte à tourner ce nouveau long métrage ensemble…

Même si le réalisateur semble s’être détourné depuis un moment de ses passionnantes expérimentations filmiques (que l’on avait pu suivre de « Gerry » à « Paranoïd Park », en passant par «
Elephant » et « Last Days »), on demeure pourtant bluffé par sa capacité à nous passionner à travers les sujets de chacun de ses films, même lorsque ceux-ci restent d’apparence plus « classique »
: après le biopic militant « Harvey Milk » et le sublime mélo sur le deuil « Restless »,
voici donc « Promised Land », étonnant manifeste écolo, bien plus subtil et complexe qu’il n’y paraît ! Comme souvent avec Gus Van Sant, c’est sous une simplicité apparente que l’on saisit
progressivement la grandeur et l’importance des enjeux qui sont évoqués sous nos yeux…

Au fond, le film nous présente deux « salauds » qui, à la solde d’une multinationale affublée du nom évocateur de « Global », viennent dans une petite ville de fermiers pauvres pour récolter
leurs autorisations de forer leurs terres pour exploiter le gaz de schiste qui s’y trouve. Sauf que ces « salauds »-là semblent ne pas tout à fait être conscients de l’être, et il n’est
d’ailleurs pas innocent de la part du cinéaste de nous placer de leur point de vue, afin de nous les rendre sympathiques et humains, poussant même le vice en nous laissant rire avec eux… Sauf
aussi que même s’ils leur font miroiter de fortes sommes d’argent, la docilité des fermiers sera bientôt troublée par les déclarations d’un scientifique à la retraite, membre respecté de la
communauté, et par la campagne anti-Global d’un militant écolo brusquement apparu dans les environs…

« Promised Land » nous rappelle ainsi avec une vitalité et un panache puissant que les apparences peuvent être trompeuses et que les choses demeurent toujours plus complexes qu’elles n’en ont
l’air… Loin de proposer un simple film environnementaliste au discours orienté de plus, Gus Van Sant va bien plus loin en décrivant des personnages parfois prisonniers d’une idéologie qu’ils
croient obstinément être juste, bonne ou plus simplement la seule possible. Il montre des êtres déchirés entre des versions multiples d’une même vérité et dans les choix qu’ils doivent faire… Si
le jeu sur les faux-semblants se révèle captivant (jusqu’à ce « twist » étonnant sur l’écolo, qui, loin d’être un retournement facile pour maintenir la tension comme on peut en trouver dans de
nombreux films aujourd’hui, montre au contraire un peu plus avant le cynisme d’un système économique pervers et manipulateur), c’est à travers la véritable prise de conscience du héros que «
Promised Land » subjugue : parce qu’elle n’est pas simple et qu’elle rend parfaitement compte de la difficulté pour chacun de faire les bons choix, même si ces choix – comme préférer préserver la
terre pour l’avenir plutôt que de la voir empoisonner en échange de simples compensations financières – devraient pourtant sembler évidents pour tous… Gus Van Sant livre ici un film précieux,
qu’il met en scène une fois encore avec une virtuosité étonnamment modeste et des acteurs tous aussi formidables les uns que les autres !



Perspective :



- Restless, de Gus Van Sant































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5 commentaires:

  1. Extrêment démago sans prise de risque dans les enjeux dramatiques... 2/4 de justesse

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  2. Encore une fois je suis content d'avoir vu le film avant d'avoir lu ta critique (ce que je fais systématiquement maintenant)


    Tu serais avisé et courtois d'utiliser des spoilers alerts...


    Sinon sur le film, j'ai surtout aimé l'interprétation de Frances McDormond, et étonnament, ca m'a donné envie de retourner a la campagne

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  3. Si si avec un peu d'imagination  tu peux parler d'un film sans en dévoiler les ressorts scénaristiques dont la révélation pourrait gâcher le futur plaisir d'un infortuné lecteur non averti.


    Ce n'est pas être "in" que de procéder de la sorte, juste préserver a ton public les mêmes surprises que tu as pu avoir lors du premier visionnage d'un film.

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  4. Adèle de St-O5 juin 2013 à 04:10

    Superbe film sur la forme et puis vraiment Matt Damon est formidable.. J'ai apprécié aussi le point de vue des 2 personnages de Matt Damon et Frances mcDormont et les tronches des comédiens
    "ruraux" mais après ça reste très américain comme film. C'est tellement prévisible et puis cette fin dans le gymnase où tout le monde repart la larme à l'oeil..

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  5. je te trouve pas totalement très gentille, même si ton avis commençait pourtant bien... ;)


    on sent en tout cas la fan de matt ! (mais comment t'en blamer ?)

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