lundi 15 avril 2013

[Critique] L’écume des jours, de Michel Gondry



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(France, 2013)



Sortie le 24 avril 2013




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Réputé inadaptable, le roman de Boris Vian « L’écume des jours » se destinait assez logiquement à la filmographie du « ciné-bricoleur » Michel Gondry, spécialiste d’un cinéma poético-fantastique
aux images bidouillées assez uniques et toujours en-dehors des modes… Il n’y a qu’à penser à des films comme « Eternal sunshine of the spotless mind » ou à « La science des rêves » pour s’en
rendre compte. Visuellement, son adaptation est d’ailleurs plutôt réussie – presque trop, pourrait-on dire –, avec une profusion assez hallucinante d’images-métaphores et de plans saisissants… De
la cuisine complètement surréaliste de Nicolas dans l’appartement de Colin qui change de forme en fonction des émotions qui le traversent à l’illustration de la fameuse danse jazzy du Biglemoi ou
à une balade « en nuage » au-dessus des Halles et des toits de Paris, le film fourmille d’inventivités à chaque plan, un peu comme le roman alignait les jeux de mots dans presque toutes ses
phrases… Mais si ce procédé surprend ou amuse au début de l’histoire, il prend aussi le risque de lasser assez vite, voire de faire perdre de vue le propos du récit, dilué alors dans cette
attention permanente demandée aux spectateurs de regarder toutes ces jolies choses qu’on lui met ostentatoirement devant les yeux !

Si l’utilisation d’effets spéciaux avant tout mécaniques et presque « vintage », au détriment d’effets numériques plus modernes, demeure tout à fait charmante et dans la personnalité même du
cinéma de Gondry, on reste un brin plus sceptique devant le scénario qu’elle illustre… Certes, l’attachement et l’amour du cinéaste pour le roman culte de Vian est constamment palpable, mais
cette volonté de « trop bien faire » l’a peut-être quelque part aveuglé et lui a empêché de prendre la distance suffisante pour réaliser une œuvre plus fluide ou plus importante… car qui a lu le
roman original se rendra très vite compte d’une certaine forme de trahison : mais l’adaptation d’un tel monument de la littérature ne mène-t-il pas fatalement à un échec, ou dans le meilleur des
cas comme ici à un « échec relatif » ? Michel Gondry devait de toute façon faire des choix drastiques dans ce qu’il garderait au final du livre – c’est le principe même d’une adaptation –, mais
son choix de focaliser essentiellement sur l’histoire d’amour entre Colin et Chloé et de passer hyper rapidement (voire de faire l’impasse !) sur de nombreuses scènes clé du bouquin conduit
presque à dénaturer certains propos de Vian, notamment dans ses charges contre le travail, la religion ou l’armée… Je me demande d’ailleurs ce qu’un spectateur ne connaissant rien de l’ouvrage
pourra penser en voyant certains images vite expédiées dans le film.

Côté casting, on comprend grâce à Michel Gondry l’importance d’une bonne direction d’acteurs dans un film, celui-ci parvenant à rendre presque parfaits des pseudo-comédiens aussi insupportables
qu’Omar Sy ou Gad Elmaleh ! Contre toute attente, le long métrage ne possède du coup que peu d’erreurs de casting, si ce n’est Vincent Rottiers, dont le visage poupin a bien du mal à faire croire
au prêtre cynique qu’il incarne… Quant à Audrey Tautou dans le rôle de Chloé, si elle fait encore un peu son « Audrey Tautou », elle forme tout de même un assez joli couple avec Romain Duris en
Colin… Au final, si « L’écume des jours » selon Gondry n’est pas un mauvais film, il n’est malheureusement pas non plus la merveille que l’on attendait… Si sa frénésie risque de finir par
ennuyer, on pourra néanmoins s’émerveiller ici et là de nombreuses idées fortes qui l’émaillent, comme cette belle idée de passer de la couleur au noir et blanc au fur et à mesure que la
mélancolie envahit l’intrigue, ou celle d’inscrire concrètement le livre de Vian dans la narration, comme un ultime hommage de l’adolescent Gondry à l’écrivain qui l’a inspiré…



L'écume des jours sur Allociné



Autres films de Michel Gondry :



L’épine dans le cœur (2010)



The Green Hornet (Le Frelon vert) (2011)



The We and the I (2010)































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7 commentaires:

  1. L'ayant lu il n'y a pas longtemps, je pense aller le  voir pour completer ma lecture !

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  2. Plutôt d'accord avec toi : les effets et la place qu'ils occupent nuisent à la vitalité du récit. Bon, par contre, les éléments qui ont été ejectés du scénario ne m'ont pas vraiment choqué même
    s'il est vrai, le film perd un peu en richesse thématique. C'est surtout le segment final qui m'a vraiment plu - une déception, en somme !

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  3. C'est sur que niveau acteur il n'y a pas pas mieux !

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  4. J'hésite j'hésite ! J'avais beaucoup aimé le livre !


    Bises

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  5. Assez d'accord, on aime les machineries et l'univers de Gondry mais au final ça reste un film qui reste trop superficiel et qui ne s'imprègne pas de l'âme de l'oeuvre originelle... 2/4

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  6. Merci pour cet article, j'ai enfin compris

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