mardi 6 avril 2010

Lifeboat, d’Alfred Hitchcock (Etats-Unis, 1943)



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Note :
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Sur un scénario de John Steinbeck, Hitchcock signe avec « Lifeboat » un vrai défi de cinéaste, sous la forme d’un huis clos à ciel ouvert, en plein milieu de l’océan, qui met en scène à
l’intérieur d’un canot de sauvetage les rescapés des naufrages d’un bateau américain et d’un sous-marin allemand l’ayant attaqué. Un peu moins d’une dizaine de personnages, comme autant de
figures archétypiques de l’Amérique de ces années-là, brassant les couleurs de peaux ou les classes sociales… Ceux-là vont donc apprendre à se supporter et à survivre tous ensembles, en faisant
des efforts de solidarité. Quand un nouveau survivant parvient jusqu’à la chaloupe et qu’il s’avère être le capitaine nazi du sous-marin attaquant, le malaise s’installe… Avec une mise en scène
riche et intelligente, très axée sur les contraintes de décor et les tentatives formelles, Hitchcock dira lui-même qu’il recherchait avant tout la gageure technique : « Avec ce film, je voulais
prouver que la plupart des films sont tournés en gros plans. Ce fut vraiment un film sans décors. Je l'ai fait par défi ».

Dans le contexte de la seconde guerre mondiale, « Lifeboat » est en réalité une commande et se voulait à la base un vrai petit film de propagande, contre les dangers du nazisme montant et sur la
nécessité de rallier la population américaine à l’effort de guerre… Sauf que peu après sa sortie, le long métrage sera fortement décrié et insidieusement accusé d’être pro-nazi. Hitchcock met en
effet en scène un nazi plus fort et plus intelligent que tous les autres membres de l’équipage, incarnant la fameuse « race supérieure » (à laquelle il est d’ailleurs fait référence avec sarcasme
dans une réplique), qui va finir par avoir le dessus sur eux tous, après maintes manipulations et un fort épuisement général. A la fin, les américains se transforment en outre en une sorte de «
meute » bestiale et violente pour finir par le jeter par dessus bord, alors même que celui-ci se sera toujours montré poli et capable de les aider, notamment pour soigner l’un d’entre eux,
atteint de gangrène… Mais au fond, ce que cherche à faire le cinéaste, c’est surtout à contrer le plan de propagande qu’on lui imposait, en distillant autant que possible une bonne dose
d’ambiguïté et de cynisme dans son film. Après tout, l’Allemand n’agissait peut-être que dans l’intérêt général, sachant parfaitement que le seul moyen de survivre était de rejoindre une base
allemande, de laquelle ils étaient le plus proche… Son film ne fait ainsi que gagner en personnalité, et ce n’est après tout que le rôle des grands metteurs en scène que d’utiliser la subversion
dans leur travail !

Malgré le sujet du film, abordant même au fil de l’eau et des conversations la mort d’un enfant ou les camps de concentration nazis, Hitchcock parvient à insuffler à son récit une part d’humour
non négligeable et plutôt salvatrice. On pense notamment au personnage de la journaliste faussement fortunée, qui est progressivement départie de toutes ses affaires au fur et à mesure que
progresse l’histoire, chacun des objets lui échappant fonctionnant comme un gag à répétition assez subtil… L’ironie pointe également dans bon nombre de dialogues, notamment entre le marin un peu
fruste et la bourgeoise à apprivoiser, et l’étonnement du noir qui apprend que sa voix compte lors d’un vote démocratique résonne assez froidement et cyniquement. Quant à la traditionnelle
apparition d’Hitchcock dans le film, ses fameux « caméos » récurrents, pourtant menacée par l’étroitesse du décor, le cinéaste lui trouve une parade hilarante, puisqu’on le voit en photo dans le
journal, vantant les mérites d’un nouveau régime amaigrissant, avec une image le montrant avant le régime, et une autre après…



 



Mise en perspective :



- L’inconnu du Nord-Express, d’Alfred Hitchcock (Etats-Unis,
1951)































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5 commentaires:

  1. Pas le plus connu du maître du suspense mais un excellent cru ! Rien à voir mais je me permets de conseiller vivement 2 films: requiem pour un massacre et santa sangre. 2 chefs d'oeuvre absolus
    du cinéma !
    Santa sangre est tout simplement mon film préféré ! Renseignes-toi sur ces 2 films et tu verras que je ne te mens pas !


    Vais passer aussi le message à Cachou...

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  2. Voilà un film d'Hitchcock dont j'ignorais l'existence... En tout cas le sujet et ton avis donne vraiment envie!

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  3. fais de ces 2 films une priorité absolue: santa sangre est tout simplement mon film préféré. Tu trouveras également ces 2 films sur mon blog ds les sommaires des films.

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  4. Sinon, hors sujet, mais je sais que tu as rebondi plusieurs fois chez moi sur certaines abominations du cinéma. Aussi, je me permets de faire ma petite pub et je t'invite à découvrir mon article
    sur Bruno Mattéi. C'est promis, tu ne seras pas déçu...

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  5. J'avais vu ça il y a 20 ans, j'avais beaucoup aimé.

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