mardi 2 février 2010

Elmer, le remue-méninges, de Frank Henenlotter (Etats-Unis, 1987)

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Plutôt qu’« Elmer, le remue-méninges », ce film aurait pu s’appeler « Dialogue avec mon pénis » tant il est traversé de scènes connotées sexuellement et tant la bizarroïde créature nommée Elmer
fait penser à un gros gland en liberté… Mais commençons par le commencement ! Le film est d’ailleurs lancé sur les chapeaux de roue : dans un appartement, un couple de personnes âgées devient fous
en constatant la disparition d’un certain Elmer de leur baignoire… Ils mettent alors tout à sac à sa recherche et la bonne femme se met à hurler à la mort : ambiance tétanisante et à hurler de rire
à la fois, il faut vraiment le voir pour le croire ! Mais ce n’est qu’un début, car tout le film sera une succession de situations complètement hallucinantes et délirantes, qu’on n’oserait même pas
imaginer dans nos cauchemars les plus fous !

Elmer ayant quitté les vieux, c’est avec le jeune Brian qu’il se liera désormais d’amitié. Brian va se montrer parfaitement asocial à partir de là, délaissant son frère et sa petite amie (qui du
coup en profiteront bien dans leur coin), afin de passer le plus de temps possible avec Elmer, qui provoque un lien de dépendance complètement fou ! Mais qui est donc ce fameux Elmer, me
demanderez-vous ? Eh bien, ses origines ne sont pas bien claires mais elles semblent remonter à la nuit des temps, selon le discours d’un vieux fou qui scande son texte comme un narrateur extérieur
: du coup c’est complètement mauvais et on se fend bien la pèche en tout cas ! Elmer est en fait une sorte de créature étrange et dégoûtante, une sorte de gros vers immonde qui parle et qui chante,
et doté par ailleurs d’un grand sens de l’humour… Il a en fait besoin d’un humain pour se greffer à lui comme un parasite et partir en balade afin de dévorer tous les cerveaux qu’il pourra croiser
sur son passage. Pour éviter de perturber son hôte, il lui propose une substance bleue qu’il injecte dans son cerveau et qui le fait partir dans des trips hallucinatoires ! Brian devient ainsi
complètement accroc à cette substance, qui agit en fait comme une drogue : il se comporte en vrai junkie et en redemande de plus en plus… Le film se veut donc en partie une jolie réflexion sur la
drogue et la dépendance en général. Le titre original « Brain damage » évoque d’ailleurs les dommages irréparables que peut provoquer la cocaïne sur le cerveau des adolescents… héhé !

Mais le côté « brain » peut nous emmener aussi du côté de la masturbation intellectuelle, voire du conflit entre la raison et la pulsion, ou en d’autres termes un peu plus crus entre la cerveau et
la verge ! Les dialogues entre Brian et Elmer illustrent parfaitement ce débat et quand Elmer (extension phallique de Brian) lui envoie son « jus » (le précieux liquide bleu) dans le cerveau, c’est
le côté pulsionnel et sauvage de Brian qui ressort, engourdissant toutes ses fonctions intellectuelles ! Le film bascule ainsi souvent dans un univers grivois et à la sexualité assez glauque : pour
envoyer sa substance, Elmer se sert par exemple d’un « trou » qu’il a creusé au bas de la nuque de Brian ; une scène fabuleuse nous montre Brian jouant avec son sexe avec son Elmer dans le bain ; on assiste enfin à une séquence porno-gore assez phénoménale, au cours de laquelle une prostituée s’apprête à
faire une fellation à Brian, mais Elmer ayant pris la place du pénis de Brian (la pute se rend d’ailleurs compte de l’énormité de son engin à travers le pantalon !), on assiste à une pénétration
buccale carrément dégueulasse, où ce qui tient lieu d’organe mâle se met à dévorer la cervelle de la fille ! Ami de la poésie, passez votre chemin…

Bien gore et bien sale, mais à aucun moment dénué d’humour, ce film dénote vraiment dans la production de films horrifiques de l’époque, un peu comme si John Waters avait réalisé un film
d’épouvante ! Un sommet de décadence et de subversion, un peu oublié, plutôt risible (les acteurs sont mauvais comme des porcs !), mais qui mérite définitivement toute l’attention des fans d’un
cinéma un peu décalé et underground…






























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Océans, de Jacques Perrin et Jacques Cluzaud (France, 2010)

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Le véritable héros d’« Océans », c’est bien sûr le léopard des mers : cet énorme phoque de l’Antarctique pouvant mesurer 4 mètres de long et peser jusqu’à 500 kilos est de toute évidence celui qui
s’en sort le mieux devant la caméra… Un jeu bouleversant et inoubliable, plein de grâce quand il nage dans les profondeurs océanes ou plein de graisse quand il vient s’échouer comme une masse à la
surface ! De tous les cétacés et les mammifères marins qui l’entourent, c’est bel et bien lui et lui seul qui domine ! Et les pauvres otaries, pâles imitations de phoques juste assez connes pour se
faire bouffer par les orques, peuvent aller se rhabiller… En un mot comme en cent : a star is born ! Vivement son prochain film…

Plus sérieusement, « Océans » est une petite merveille qui, bien plus qu’un documentaire, nous transporte littéralement au fond des mers pour nous faire découvrir toute la faune et la vie
sous-marines… A l’aide d’images bien souvent incroyables, d’une musique et d’un bruitage adéquat, et surtout d’un montage habile et manipulateur, le film parvient à nous embarquer dans une belle
odyssée, subtilement dramatisée et racontant une histoire riche en émotions : la comédie, le drame, le thriller psychologique, le film à suspense et même le gore, tous les genres sont ici convoqués
! Jacques Perrin, qui a l’intelligence de laisser parler les images, nous offre un merveilleux poème contemplatif, qui laisse exploser le spectacle de la nature, où la maxime majeure pourrait être
« manger ou être mangé »… Le somptueux ballet d’oiseaux plongeant pour pêcher, l’impressionnant et tragique repas des orques ou des requins, et jusqu’à la vision du plus cruel des prédateurs :
l’homme ! Tuant toujours plus qu’il n’en faut, capable de couper aileron et nageoires à vif avant de laisser le pauvre animal agoniser des heures au fond de l’océan… De nombreuses séquences
semblent ainsi savamment scénarisées, comme si les animaux interprétaient leurs propres rôles à l’écran : le regard ému d’un varan suspendu devant le décollage d’une fusée, le spectacle comique
très « cinéma muet » des crustacés aux formes étonnantes, des armées de crabes qui s’affrontent dans des combats dignes de « Star wars » ou du « Seigneur des anneaux », le suspense hitchcockien à
faire frémir devant les pauvres bébés tortues essayant de rejoindre l’océan sans se faire attraper par les oiseaux… Tout le film s’avère ainsi intensément cinématographique, il n’y a pas le moindre
doute !

Le seul véritable problème (mais pourtant de taille !) avec ce genre de film, ce sont ses financements tristement sales et peu reluisants… Comme la plupart des films « écologistes » qui sortent en
salle depuis quelques temps, il est en effet financé paradoxalement avec l’argent des multinationales les plus polluantes de notre moins en moins belle planète. Ici, on a notamment droit à un
partenariat avec Total (vous savez : les marées noires…), EDF, la fondation Bettencourt-Schueller-Nestlé… Ces sociétés investissent dans ces « cautions environnementales » pour justement se donner
bonne conscience et continuer leurs horreurs dévastatrices en toute impunité : à une époque plus religieuse, on appelait cela des « indulgences », qui permettaient aux riches d’être acceptés au
royaume de Dieu s’ils donnaient assez d’argent à l’Eglise pour tous leurs péchés… En fait, c’est un peu comme si un film sur l’Holocauste était financé sur des fonds nazis : est-ce tolérable selon
vous ?






























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lundi 1 février 2010

Were the world mine, de Tom Gustafson (Etats-Unis, 2010)

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Si l’on peut être gêné, les premières minutes, par la cruelle modestie du budget de ce film qui point ici ou là, c’est une chose que l’on oublie très vite par la suite, tant le film s’enflamme de
génie et d’audaces inattendues, comme autant d’odes à une excitante liberté de cinéma ! Qu’on se le dise, malgré sa confidentialité sur les écrans et une presse peu élogieuse, « Were the world mine
» est une œuvre majeure dans une offre cinématographique (surtout américaine) de plus en plus standardisée : l’étonnant souffle qui traverse le film nous offre une occasion inespérée de prendre un
grand bol d’air, plein de plaisir, de bonheur et de tolérance !

Ce premier film de Tom Gustafson nous conte le quotidien du jeune Timothy, adolescent un peu malmené au lycée à cause de son homosexualité. Poussé par une prof de littérature aux allures de fée
(l’actrice Wendy Robie est très bien), il se présente aux auditions pour le spectacle de l’école, qui est une adaptation du « Songe d’une nuit d’été » de William Shakespeare. Il décroche le rôle
principal et découvre dans les vers shakespeariens de son livre la recette d’un philtre d’amour, qu’il voudrait utiliser pour conquérir l’amour de Jonathon, l’élu de son cœur. Les choses ne
tournent pas totalement comme prévues et une vague d’amour gay et lesbien gagne bientôt toute la ville, ouvrant l’esprit de ceux qui le gardait jusque-là si fermé…

Ce qui saute tout de suite aux yeux dans « Were the world mine », c’est la mise en scène très audacieuse et complètement folle de l’ensemble ! Avec si peu de moyens et quatre semaines de tournage,
parvenir à un tel résultat demeure une gageure incroyable et admirable… Entre teenage movie et comédie musicale, entre tendre drame et fantaisie shakespearienne, le film s’emporte dans tous les
styles et explore des formes tout à fait nouvelles. La plus belle idée demeure sans doute les nombreux passages chantés, faisant basculer le film dans la plus vivifiante des comédies musicales : le
kitsch éclatant et coloré y est parfaitement assumé et les chorégraphies sont sensuelles et libérées. Chaque séquence musicale reflète généralement les rêveries et fantasmes du jeune gay, qui sont
souvent habilement interrompus par un retour brutal à la réalité, plus sèche et moins heureuse. On pense au théâtre, on pense à une fantaisie fantastique, on pense surtout qu’on est en train
d’assister à la naissance d’un genre parfaitement nouveau ! Les chansons sont adaptées des textes de la pièce de Shakespeare et sont merveilleusement interprétées par les acteurs du film, tous
aussi inconnus qu’attachants et talentueux… Entre le « Moulin rouge » de Baz Luhrmann et « Beautiful thing » d’Hettie MacDonald, Gustafson parvient à percer une voie magistrale, pleine d’énergie et
de douceur, qui fait vraiment chaud au cœur !

Tantôt émouvant, tantôt gay (et très joyeux), le film n’est pas seulement un choc esthétique, mais également un superbe traité de tolérance prenant la forme d’une belle et enivrante fantaisie… Le
jeune héros du film répand l’amour avec sa fleur tout autour de lui, un peu comme dans un rêve éveillé. Quand les choses rentrent dans l’ordre à la fin du film, on se demande au fond si tout cela a
réellement existé, si tout n’a finalement pas été qu’un songe, exactement comme dans la pièce de Shakespeare. Un détail nouveau, cependant, laisse à penser que quelque chose est véritablement
advenu : Timothy est sur le point, visiblement, de connaître l’amour… C’est alors que l’on quitte le film à regret et que l’on retient une dernière fois le visage de Tanner Cohen, jeune acteur et
chanteur plein de talent, à la plastique plus charmante que belle (un peu à la façon d’un Joshua Jackson dans « Dawson »… admirez la référence !) et à la voix divine, rappelant celle de Ewan
McGregor dans « Moulin rouge »… Un immense coup de cœur !






























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dimanche 31 janvier 2010

Jeu : les 7 degrés de séparation # 4



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Avec son premier film tout à fait merveilleux, Joann Sfar a remis
Serge Gainsbourg à l’honneur. Ce génie de la chanson s’est également essayé plusieurs fois au cinéma et a côtoyé bien des actrices… Etait-il également un génie du cinéma ? Pas facile de trancher au
regard de son travail dans le domaine, mais facile en tout cas de le relier à un cinéaste de génie comme Orson Welles, en quelques degrés de séparation que je vous propose de chercher… A moins que
vous ne préfériez essayer de le lier à un autre chanteur, dont on dit qu’il est son digne héritier : Benjamin Biolay. Dans un cas comme dans l’autre, les liens doivent se faire par des films et en
aucun cas par des chansons ou des clips ! (trop facile sinon…)

Deux chaînes de liens possibles cette semaine, mais un seul point attribué (faut pas abuser, quand même !), à celui qui aura la plus courte ! (J’attends déjà les blagues vaseuses, là…)

Pour ceux qui préfèrent potasser un peu la règle de ce jeu étrange avant de participer, c’est par
ici !


Et nous tenons donc cette semaine notre premier grand gagnant : Knorc ! Avec les 2 points qu’il a
remporté haut la main grâce à toutes ses relations entre frères
, il atteint le score fatidique de 3 points, qui lui permettent de choisir un DVD parmi cette liste fastueuse :
    « Evolution » d’Ivan Reitman (édition limitée avec jaquette
holographique !)
    « Akoibon » d’Edouard Baer
    « The calling » de Richard Caesar (une sorte d’ersatz de « La malédiction », qui ne m’a pas paru nécessiter de chronique sur ce blog… vous voilà averti ! :o)

On applaudit en tout cas tous notre ami Knorc encore une fois, que je laisse me dicter son choix en compagnie de ses coordonnées postales dans la rubrique « contact »… et désolé pour les autres,
mais : « scores à zéro » pour repartir dès la semaine prochaine sur de bonnes bases… Bonne chance à tous et à gromanche prochain !






























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Top Cinéma 2010 selon Phil Siné


amours imaginaireswere the world mineoncle boonmee



1 - Les amours imaginaires, de Xavier Dolan (Canada, 2010)



2 - Were the world mine, de Tom Gustafson (Etats-Unis, 2010)



3 - Oncle Boonmee (celui
qui se souvient de ses vies antérieures), d’Apichatpong Weerasethakul (Thaïlande, 2010)



ghost writerdaniel anamammuth



guerrier silencieuxgainsbourgscott pilgrim



4 - The ghost writer, de Roman Polanski (France, 2010)



5 - Daniel & Ana, de Michel Franco (Mexique, 2010)



6 - Mammuth, de Gustave Kervern et Benoît Delépine
(France-Groland, 2010)



7 - Le guerrier silencieux, de Nicolas Winding Refn (Danemark,
2010)



8 - Gainsbourg (Vie héroïque), de Joann Sfar (France, 2010)



9 - Scott Pilgrim, d’Edgar Wright (Etats-Unis, 2010)



10 - La régate, de Bernard Bellefroid
(France-Belgique-Luxembourg, 2010)



11 - Lebanon, de Samuel Maoz (Israël, 2010)



12 - Inception, de Christopher Nolan (Etats-Unis, Grande-Bretagne,
2010)



regatelebanoninceptionkaboom



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13 - Kaboom, de Gregg Araki (Etats-Unis, 2010)



14 - Potiche, de François Ozon (France, 2010)



15 - London Nights, d’Alexis Dos Santos (Grande-Bretagne, 2010)



16 - Le nom des gens, de Michel Leclerc (France, 2010)



17 - A single man, de Tom Ford (Etats-Unis, 2010)



18 - Fin de concession, de Pierre Carles (France, 2010)



19 - Shutter Island, de Martin Scorsese (Etats-Unis, 2010)



20 - Achille et la tortue, de Takeshi Kitano (Japon, 2010)



21 - Agora, de Alejandro Amenabar (Espagne, 2010)



fin de concessionshutter islandachille tortueagora



Voici venu le temps des rires et des chants (après tout, c’est les fêtes, il paraît qu’il faut rire et chanter…), mais c’est aussi (et peut-être surtout, en ce qui nous concerne ici) le temps des
Tops et des Bilans ! Si en 2010, Phil Siné a vu 422 films, dont 341 au cinéma et 247 sortis cette année, il a du coup bien du mal à faire son choix devant pareille profusion, surtout que la
qualité était bien souvent au rendez-vous… Comme je trouve effectivement toujours cela frustrant de ne retenir que 10 films de l’année écoulée, quand 100 mériteraient selon moi de figurer sur la
« liste », je vous propose du coup rien de moins qu’un Top 20 (et une poussière) de mes films préférés en 2010… Et comme c’était toujours aussi déchirant pour moi de sacrifier tant d’autres films
formidables, j’en ai réparti plus d’une trentaine d’autres en trois catégories parfaitement artificielles : les meilleurs films de genre, les films les plus « remarquables » et mes films « coups de cœur » (cliquez sur les liens adéquats pour les découvrir).

Mais revenons à notre « Top 20 »… Le « podium » est occupé par trois films qui se seront jusqu’au bout disputés la première place, jusqu’à ce que le hasard détermine finalement leur
positionnement respectif. Ils méritaient tous, à vrai dire, le statut de « grand vainqueur », mais il m’a semblé plus pertinent d’y placer le film d’un tout jeune cinéaste, capable tout à la fois
de faire la synthèse d’un cinéma passé et de projeter son art dans l’avenir. Xavier
Dolan
n’est pas seulement beau et fougueux, il immisce dans ses films une intelligence, une grâce, une sincérité et un perfectionnisme qui force le respect et l’admiration ! Et puis il a
l’air de posséder surtout cette qualité déterminante qui manque parfois à nombre d’acteurs du métier : la passion pour son travail et la détermination à tout sacrifier pour l’art… Le geste est
beau, certes, mais il engendre aussi dans son cas des chefs-d’œuvre, à commencer par ce deuxième et merveilleux long métrage que sont « Les amours imaginaires ». Nous attendons désormais la suite avec une « folle »
impatience !

Si Dolan passe haut la main le cap bien souvent casse-gueule du second film, Tom Gustafson a malheureusement eu bien du mal, lui, à imposer son coup d’essai dans la cour des longs, après
notamment un très prometteur court métrage… Malgré un accueil toujours enthousiaste dans les
nombreux festivals où il a été présenté avant sa sortie en salle, « Were
the world mine
» a pourtant été condamné à une carrière ultra confidentielle en France, doté d’une seule copie pour tout le territoire hexagonal ! Un scandale qui mériterait d’être corrigé
par un succès foudroyant du DVD, disponible déjà depuis six mois… Mais ne rêvons pas, cette
comédie musicale fauchée mais incroyablement brillante et réjouissante est d’ores et déjà classée dans la catégorie des films hyper cultes pour les quelques heureux élus qui auront eu la chance
de l’entrevoir et injustement ignorés de la plus grande partie de l’humanité cinéphile…

Dernier élément de notre tiercé gagnant 2010, « Oncle Boonmee » demeure à tout
point de vue comme un étrange et fascinant rêve éveillé… Dans sa forme même, il égraine de superbes et intenses images contemplatives et oniriques, qui nous emportent dans les rêveries atypiques
d’un réalisateur thaïlandais enfin révélé au monde : Apichatpong Weerasethakul, dont c’est pourtant déjà le sixième film… Mais cette révélation, qui résonne comme la naissance d’un cinéaste
majeur à qui l’on souhaite la carrière la plus longue possible, est due essentiellement à une Palme d’or inattendue, mais cependant parfaitement légitime. Inattendue dans la mesure où le Festival
de Cannes couronne traditionnellement un film certes de grande qualité mais généralement plus accessible ou de facture plus « classique » (laissant les films plus « expérimentaux » au Grand Prix
du Jury). Légitime parce que mettre en avant des pans entiers de cinématographies majeures et néanmoins sans visibilité devrait toujours demeurer la mission principale de ce Festival mondial du
septième art !

Dans la suite du classement, vous retrouverez un échantillon éclectique et à tendance internationale (autant que faire se peut) des meilleurs films de l’année écoulée selon votre serviteur :
l’absolument parfait dernier film de Polanski, l’intense et passionnante gravité psychologique d’un atroce fait divers mexicain, l’élégance formelle d’une grandiose épopée viking, la comédie culte et humaine aussi grosse qu’un « Mammuth »,
la coolitude d’un looser fantasmé en super héros, le félin et subtil premier film du plus génial des auteurs de bandes dessinées
contemporains
, etc… Il vous suffit de cliquer sur les liens ou les affiches correspondantes pour en savoir un peu plus sur les films mentionnés ! (c’est magique !)

L’année 2010 s’achève, et en attendant déjà impatiemment les films qui feront 2011, je vous souhaite à toutes et à tous un excellent début de nouvelle année !



 



Mise en perspective :



- Nouvel an et palmarès 2009



- 21 films pour le 21e siècle



- 12 films de genre en 2010



- 12 films « remarquables » en 2010



- 15 films « Coup de cœur » pour 2010































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Mother, de Joon-ho Bong (Corée du Sud, 2010)

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« Mother » est un film vraiment étonnant et inattendu. On y suit l’itinéraire d’une mère dont le grand fils attardé aurait commis un meurtre : celui de la pute du quartier, si l’on puit dire. Face
à un système judiciaire expéditif, pressé de classer l’affaire en jetant son fils en prison, la mère va elle-même mener l’enquête et s’acharner surtout à tout faire pour innocenter son fils et le
sortir de sa geôle… y compris l’irréparable ! Car au fond, c’est bien connu lorsque l’on s’attaque à un être cher, peu importe la vérité : seul le bien de l’être aimé doit compter !

Il y a vraiment des plans surprenants dans « Mother » : un personnage étrangement coupé à la taille par la pelouse au milieu d’un terrain de golf, la mère filmée en plongée dans un cimetière formé
de nombreux cercles surélevés… L’esthétique du film est très soigné et vraiment original ; on y décèle la main d’un grand cinéaste : Joon-ho Bong nous livre une mise en scène puissante et subtile
pour un film à l’histoire souvent déroutante…

Le personnage du fils, débile léger, semble maintenu dans son état fragile par une mère possessive et ultra protectrice, toujours derrière lui, guidée par un amour exacerbé… Elle fait encore dormir
son fils dans son lit, celui-ci y prenant d’ailleurs une posture fœtale, comme un gros bébé, un enfant qui n’a jamais vraiment quitté le ventre de sa génitrice. Cette relation aux frontières de
l’inceste est décrite tout en douceur par le cinéaste, sans démonstration trop appuyée, ce qui rend le film bien plus intrigant encore…

Un autre thème fort du film passe par le rapport à la mémoire. Le fils semble prisonnier d’une amnésie quasiment permanente et se frotte frénétiquement les tempes lorsqu’il veut essayer de
retrouver la mémoire : des images lui reviennent alors, pas forcément les bonnes, pas forcément aux bons moments… La mère, elle, s’acharne à retrouver la mémoire du fils de son côté, mais
lorsqu’elle y est confrontée, la voyant dans toute sa cruelle vérité, elle va tout faire pour l’effacer à nouveau, pour rendre la liberté à son enfant en maintenant l’état d’amnésie et en
transformant surtout la vérité… La mère devient elle-même criminelle, mais évitera d’y penser encore une fois que les choses seront rentrées dans l’ordre, parce que seul l’oubli possède une vertu
cathartique à ses yeux, pour le meilleur mais surtout pour le pire, dans la mesure où des innocents devront payer… Cette femme monstrueuse est semble-t-il l’incarnation d’un Etat coréen qui oublie
volontairement des pans entiers de sa sombre et terrible Histoire !

Malgré quelques longueurs, « Mother » est un film éclatant ! La noirceur et l’atmosphère assez glauque y est contrebalancée par un humour souvent décalé et salvateur. Un humour parfois très noir,
vous l’aurez compris : la scène où le fils tue la jeune fille, puis s’approche du corps étendu, se penche vers elle pour lui dire qu’il ne faut pas traîner par terre, demeure quand même un moment
assez extraordinaire…






























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Sound of noise, d’Ola Simonsson & Johannes Stjarne Nilsson (Suède, 2010)



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Lire la critique du film par Phil Siné































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