vendredi 8 avril 2011

[Critique] Pina 3D, de Wim Wenders



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Pina 3D, de Wim Wenders (France, Allemagne, 2011)



Sortie le 6 avril 2011



Note :
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Wim Wenders rêvait avec Pina Bausch depuis de nombreuses années d’un projet fou de « film dansé », qui aurait pu rallier avec grâce leurs deux merveilleux arts cinétiques : l’un chorégraphique,
l’autre cinématographique… Manque de chance, au moment même où ils semblaient avoir trouvé la forme idéale pour leur travail en commun, par le biais de la 3D, la chorégraphe allemande décède
brusquement… Plutôt que de tout abandonner, Wenders décide cependant de transformer un « film de collaboration » en une « œuvre hommage », entièrement dédiée à l’immense artiste que pouvait être
Pina Bausch. Non pas un documentaire vaguement biographique plus ou moins convenu, mais un véritable long métrage d’un genre nouveau, à la forme novatrice, tâchant d’approcher au plus près du
travail et des spectacles mi-théâtraux mi-dansés de la chorégraphe…

L’hommage passe ainsi et avant tout par la représentation de la danse, telle que l’exprimait en tout cas la grande Pina. Plusieurs de ses « pièces chorégraphiques » sont reprises devant la caméra
stéréoscopique du cinéaste allemand : les mouvements du corps, les déplacements parfois fluides, parfois chaotiques… Chaque geste des danseurs semble rempli d’une puissante émotion ! Si quelques
témoignages des collaborateurs de Pina Bausch viennent ponctuer le film et éclairer un peu sa façon de travailler ou ce qu’elle cherchait à faire sur scène, « Pina » reste avant tout dans la pure
mise en scène de la danse et par là même dans l’expression de la grâce… Mais là où Wenders aurait pu se laisser piéger, c’est de ne montrer les danseurs que prisonniers de l’espace scénique. Or,
il a fort heureusement l’idée géniale de faire exploser les limites du cadre (nouvelle dimension de l’espace, troisième dimension donc…) et d’explorer de ce fait la danse des corps au sein du «
vrai » monde : une façon de faire entrer la danse dans l’univers du cinéma, en quelque sorte… Il filme alors les chorégraphies à travers le « monde », en fait essentiellement dans la ville de
Wuppertal (lieu d’inspiration privilégié de Pina) et de ses alentours, avec des parcelles de nature idyllique : les danseurs évoluent notamment dans les rues, au milieu des voitures et de la
circulation, dans une usine déserte, au bord d’un lac ou près d’une rivière où s’ébroue un hippopotame, ou bien encore dans une rame du monorail suspendu de la ville, au cours d’une séquence
assez drôle et surprenante… On peut rire ou être ému aux larmes en regardant « Pina », vivre finalement toute une palette d’émotions merveilleuses : on ressent la souffrance de ces corps forts ou
vacillants, qui tombent parfois alors que d’autres corps les rattrapent… Les chorégraphies de Pina Bausch incarnent finalement le spectacle de la vie, dans tout son prisme de sentiments, tantôt
sincères et très humains, d’autres fois plus cruels ou désespérés… Tout pourrait se résumer à travers ces interprétations mises en parallèle du même spectacle, « Kontakthof », d’abord avec des
adolescents (ceux-là même que l’on avait découvert dans « Les rêves dansants »), puis avec des
gens d’un âge intermédiaire, et enfin avec des personnes âgées : trois âges de la vie, trois visions du monde que l’on traverse tous…

Le plus beau dans tout ça, c’est que la danse et les mouvements des corps prennent tout leur sens à travers l’utilisation que Wenders fait de la 3D : une utilisation innovante et pertinente,
vectrice d’intenses émotions ! Pour la première fois depuis « Avatar », on sent
que l’utilisation de l’image en relief a été réfléchie et étudiée, qu’elle a un sens véritable et qu’elle ne se contente pas du caractère d’esbroufe et de gadget qu’elle revêt dans la plupart des
films proposés en trois dimensions ces dernières années… Le cinéaste impose ici une mise en scène spécifique à son utilisation : des plans longs et posés, des mouvements de caméra calmes et
subtils, un montage discret et surtout un travail remarquable sur la profondeur de champ, qui permet d’immerger le spectateur dans l’écran et de lui faire toucher des doigts cette nouvelle
dimension ! Mais là où « Avatar », certes remarquable dans sa proposition
visuelle, ne dévoilait au bout du compte qu’une prouesse purement « technique », « Pina » le dépasse finalement largement en cumulant à la fois un aspect « technique » impeccable et épuré, et une
dimension plus « artistique », la fameuse caution de « cinéma d’auteur » du film, qui permet rien de moins que de proposer la grâce absolue à son public !



 



Mise en perspective :



- Les rêves dansants (sur les pas
de Pina Bausch), d’Anne Linsel et Rainer Hoffmann (Allemagne, 2010)



- Les ailes du désir, de Wim Wenders (France-Allemagne, 1987)



- Black Swan, de Darren Aronofsky



- Avatar 2D, de James Cameron (Etats-Unis, 2009)































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5 commentaires:

  1. Pas sur ce qui précède mais sur ton teaser...


    Ça va screamer fort promets-tu. Je sens surtout que ça va spoiler à mort ^^

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  2. J'ai pas encore testé Pina 3D ; J'en suis resté à "Piranha 3D". Il y a aussi des danseuses d'ailleurs...

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  3. tous les éléments nous emportent dans ce film ! Une belle suspension comme sur l'affiche (de l'eau, le sol, le ciel et la robe qui s'agite comme une flamme)


    Mais je suis sûr de ne pas être autant séduit devant un spectacle de Bausch (durs semble-t-il) que devant le film de Wenders ou Les rêves dansants, tous deux merveilleux. Faudrait faire
    l'expérience.


     

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  4. Le film est beau, exigeant, mais limité par l’admiration que le cinéaste porte à la danseuse. Ma critique :
    http://tedsifflera3fois.com/2011/07/04/pina-critique/

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  5. je vais lire ça de ce pas (chassé ;)

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