samedi 4 janvier 2014

[Critique] Nymphomaniac : Volume 1, de Lars von Trier



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Nymphomaniac : Volume 1



de Lars von Trier



(Danemark, Allemagne, France, Belgique, 2013)



Sortie le 1er janvier 2014




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Le Lars von Trier nouveau est arrivé, et comme il se doit il souffle sur lui une légère brise de souffre, histoire d’alimenter l’une de ces polémiques dont seul le cinéaste a le secret…
Bizarrement, ce n’est d’ailleurs pas le caractère sulfureux du film qui fait le plus parler, mais son découpage en deux parties, auquel le réalisateur n’a pas participé, bien incapable de porter
atteinte au cut de 5h30 qu’il avait préalablement livré à ses producteurs… Ces derniers se sont ainsi chargés de charcuter « Nymphomaniac » et d’en retirer 1h30 afin de rendre la chose «
distribuable » en salles. Si Lars von Trier a néanmoins validé la version alors obtenue, on ne sait encore rien sur ce qui a véritablement été enlevé du montage initial, ni si on aura un jour
l’honneur de le découvrir, ne serait-ce que lors de sa sortie en DVD. Reste que la simple interdiction aux moins de 12 ans du long métrage fait d’emblée bien retomber les rumeurs pornographiques
de l’œuvre qui s’annonçait depuis des mois, à moins bien sûr que ses passages les plus croustillants ne nous attendent dans la seconde partie, rendant celle-ci invisible à tout individu âgés de
12 à 17 ans ayant découvert la première ? Bref…

On aura beau disserter sur les atours de l’œuvre, il demeure néanmoins évident que cette première partie nous confronte d’emblée à ce qui s’annonce comme un véritable chef-d’œuvre ! Même si sa
conclusion, éminemment frustrante, nous plonge dans une terrible incertitude sur les intentions véritables et morales de Lars von Trier, qui s’éclairciront certainement dans le second « volume »…
à voir donc !

Concernant ce premier volet de « Nymphomaniac », récit troublant et fascinant d’une femme sur sa sexualité exacerbée depuis sa plus tendre enfance, il est porté par une mise en scène intense et
frénétique, qui comblera à coup sûr tous les admirateurs du cinéaste et continuera certainement de mettre dans l’inconfort ses détracteurs… L’audace de cette ouverture dans le silence – vite
cassée par le son assourdissant de Rammstein –, ces plans souvent aux frontières du voyeurisme, ces parallèles osés, peut-être un brin malsain, mais pourtant parfaitement juste : le style von
Trier est bien là, et demeure d’une audace et d’une modernité incroyable !

La construction du récit, raconté par une Charlotte Gainsbourg entre vice et fragilité et interprété par la remarquable débutante Stacy Martin, demeure précise et intelligemment bâtie : les
chapitres successifs nous plongent dans les différentes parties de l’apprentissage sexuel de l’héroïne, tout en les reliant à un objet présent dans la chambre où elle les raconte, objet
permettant de lier chaque épisode à un art ou à une technique… Les façons de séduire les hommes sont ainsi assimilées à des techniques de pêche, le rapport pour le moins œdipien au père convoque
la littérature d’Edgar Poe (dans un passage en noir et blanc marquant), l’amour simultané de trois hommes est comparé à une composition musicale de Bach, et ainsi de suite… Il y a ici une finesse
et une intelligence fascinante, qui rend très vite le film absolument passionnant !

Il est intéressant de remarquer que le récit de la fameuse « nympho » est entrecoupé de conversations avec son hôte (qui la recueille au début du long métrage), qui ressemblent à autant de
dialogues philosophiques précisément écrits, remplis de considérations essentielles sur la vie, le corps, le sexe… en un mot : sur l’homme ! Et c’est bien là que le travail du réalisateur se
révèle passionnant, au moins tout autant – si ce n’est plus – qu’à travers les représentations de la chair qu’il propose, qui s’avèrent presque trop gentilles à l’égard de ce que l’on attendait…
« Nymphomaniac » n’est ainsi sans doute pas le « film porno d’auteur » que l’on nous vend mais bel et bien une subtile réflexion sur nos rapports aux autres et à la chair, et sur les façons dont
nous ressentons le monde et les choses, toujours dans un déluge de sens et de sensualité… Les images créées par Lars von Trier n’en demeurent pourtant pas moins captivantes et troublantes : les
quelques scènes de nudité « frontales » nous semblent authentiques alors même qu’elles ont été trafiquées numériquement, afin de donner l’illusion que les acteurs en présence (d’ailleurs tous
très bons, de Shia LaBeouf à Uma Thurman en passant par Christian Slater) font véritablement l’amour sous nos yeux… Un film littéralement « hypnotique »… et audacieux à plus d’un titre !

(A suivre…)



Autres films de Lars von Trier :



Dancer in the dark (2000)



Melancholia (2011)



Nymphomaniac (2013)































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7 commentaires:

  1. Salut Phil, j'hésite à aller voir ce film car même si j'ai adoré certaines de ses oeuvres (Melancholia ou Breaking the waves, par exemple), d'autres m'ont laissé traumatisé, comme Dogville ou
    Antichrist. Pas trop dur psychologiquement celui-ci ? Pour info, j'ai mis mon blog en stand-by, le temps de rendre compte justement si j'ai envie de le continuer. Je me suis créé un blog de
    lecture qui me prendra moins d'énergie. Mais je continuerai à aller au cinéma, et venir commenter tes billets ici. Bonne année 2014 !

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  2. A force de la vendre comme un film porno d'auteur j'avoue avoir un peu peur de me rendre à une séance ... Cette pub peut sans doute le désservir ...


    Bises et bon WE en espérant que 2014 ait bien commencé pour toi !

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  3. Et encore, vous n’avez pas vu la version non censurée : https://www.youtube.com/watch?v=8qzzqkEj4rU

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