lundi 18 février 2013

[Critique] Passion, de Brian De Palma



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(France, Allemagne, 2012)



Sortie le 13 février 2013




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Etonnant et inattendu « remake » du "Crime d'amour" d'Alain Corneau (son dernier
film, sorti en 2010), « Passion » signe un retour aux sources des plus réjouissants de la part de Brian De Palma… Après ses détours par Hollywood (« Mission Impossible », « Mission to Mars »…
autant de « missions » sous la contrainte d’un système économique peu malléable pour un auteur créatif), quel bonheur en effet de le voir revenir à ces thrillers érotico-horrifiques qu’ils
tournaient dans les années 70 et 80 et qui ont fait tout le sel de son cinéma ! C’est bien simple, on a l’impression d’assister à une sorte de « best of » de sa carrière et de ses obsessions dans
ce « Passion », dont le titre même apparaît déjà comme un clin d’œil à des œuvres comme « Pulsions » ou « Obsession »… Mais on retrouve également du « Blow Out » ou même encore du « Sœurs de sang
» dans ce long métrage, notamment à travers une mise en scène qui porte en profondeur la patte éminemment « hitchcockienne » de De Palma : plans séquences excitants, qui suivent souvent avec une
étrange perversité l’un des personnages, cadrages précis et admirables, musique enveloppante, atmosphères sombres et mystérieuses, visions cauchemardesques savamment orchestrées, le split screen
traditionnel proposant deux points de vue de la scène clé du film… et de façon générale d’ailleurs cette multiplication des points de vue, des angles, des personnages presque interchangeables,
qui insistent toujours plus encore sur la thématique du double, si chère au cinéaste, confortée qui plus est par un personnage hypothétique de jumelle, dont le mystère laisse un peu plus le film
se dérober sous nos yeux !

Si « Passion » met certes un peu de temps à démarrer et ne laisse pas apparaître d’emblée les enjeux qu’il cherche à développer (le film de Corneau se révélait plus clair à ce niveau), il n’en
demeure pourtant pas moins « passionnant », et fascinant, par la suite, jusqu’à une dernière partie et un finale hallucinant et percutant, nous laissant comme deux ronds de flan ! Il faut dire
que Brian De Palma s’appuie sur le scénario du film original pour mieux le détourner par le prisme de ses propres obsessions… Il change notamment le sexe d’un personnage pour se concentrer sur un
trio de filles, offrant à leurs relations un contexte lesbien, où l’érotisation des corps transcende largement de simples liens professionnels. Rachel McAdams, Noomi Rapace et Karoline Herfurth
sont toutes les trois exceptionnelles dans ce jeu poussif et excédé de dominations et de manipulations, où chacun(e) prend à tour de rôle les positions de victime et de bourreau !

Mais même s’il réutilise un style qu’il avait déjà largement exploité auparavant, De Palma ne le met pas moins au service d’un film éminemment moderne, notamment dans ses thématiques… Il est
d’ailleurs très intéressant de constater que la mise en scène hyper-voyeuriste du cinéaste conserve encore aujourd’hui tout son sens, mise en perspective avec tous les moyens technologiques
contemporains : il y a une jouissance visible et communicative de la part du cinéaste à montrer à l’excès la pression que les caméras de surveillance, les téléphones portables (permettant
d’ailleurs tous de filmer de nos jours…) et les réseaux sociaux (vidéos sur youtube, par exemple…) exercent sur la vie des individus. Pas seulement dans le monde du travail d’ailleurs, le
scénario de « Passion » mêlant habilement harcèlement dans l’univers glacé d’une agence de publicité, qui déborde très largement dans la vie intime de chaque personnage… Encore une fois, Brian De
Palma nous propose là une grande leçon de cinéma, dans tout ce que cet art peut posséder d’habile, de manipulateur et de pervers !



Perspective :



- Crime d’amour, d’Alain Corneau































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7 commentaires:

  1. Bonsoir Phil, je viens de le voir, j'ai beaucoup aimé la virtuosiité de la réalisation. Le final est grandiose. C'est du grand cinéma. Je l'ai préféré au film original d'Alain Corneau.

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  2. C'est justement ce que j'aime chez de Palma qui m'a manqué. Sensualité vénéneuse notamment qui est absente ici, entre autres... 1/4

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  3. J'aime beaucoup De Palma et pourtant je suis un peu sur la réserve avec ce film. Assez bien fichu (malgré ses aspect un peu cheap parfois), virtuose presque à l'excès, il se perd dans une mise en
    abyme vertigineuse, un gouffre duquel on ressort étourdi et déboussolé. Manque cependant la flamme d'autrefois, la pointe d'ironie, l'aspect ludique du jeu de piste. Reste la passion des
    images.

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  4. Critique interessante pour ce film dont l'avis est partagé sur de nombreux site.

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  5. J'ai trouvé le film très inégal pour ma part. Noomi Rapace ne semble pas vraiment à sa place dans cette histoire, je la préfère dans Prometheus. 

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  6. la passion des images certes, mais le film aurait du s'appeler "confrontation" et pas "passion"..


    Mais ca fait tout de suite moins vendeur !


    ma critique : http://critique-ouverte.blogspot.fr/2013/02/passion-de-palma.html

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  7. ou alors de palma voulait juste mettre en avant sa passion pour les lesbiennes ? ;)


    en fait je crois justement que la passion, ou en tout cas l'amour tel qu'il est considéré actuellement (soit comme un bien de consommation courante), est au coeur du film ! quand la lesbienne
    menace l'autre fille pour qu'elle l'aime, on est en plein dans le sujet non ? comme si l'amour pouvait se commander...

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