lundi 17 février 2014

[Critique] Qui a peur de Vagina Wolf ? de Anna Margarita Albelo



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Qui a
peur de Vagina Wolf ?



de Anna Margarita Albelo



(Etats-Unis, France, 2013)



Sortie le 19 mars 2014




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Premier long métrage de la haute en couleurs Anna Margarita Albelo, à la fois réalisatrice et actrice de son film, « Qui a peur de Vagina Wolf ? » est une curiosité indéniable, qui ne peut que
surprendre tous ceux qui auront justement la « curiosité » d’aller y jeter un œil…

Dans une ambiance bien bordélique et foutraque, le film respire l’intime et l’autobiographique… Venant de fêter ses 40 ans, Anna décide de prendre enfin sa vie en main, en prenant trois
résolutions pour cette nouvelle année de vie : trouver l’amour, perdre quelques kilos et surtout réaliser une adaptation lesbienne, queer et underground de « Qui a peur de Virginia Wolf ? »

Dans le garage minable où elle vit, elle réussit à monter une équipe pour tourner son scénario, dont une actrice dont elle tombe très vite amoureuse… Les histoires sentimentales entre les filles
se télescopent, rendant vite impossible la poursuite du tournage… Si l’histoire n’est pas forcément très bien troussée, la sincérité et l’humour qui émaillent le film demeurent généreux et
plaisant à suivre ! Le casting, à commencer par l’actrice-réalisatrice, permet de rendre le tout franchement attachant et surtout drôle…

Si le tout n’est pas toujours très abouti, il y a dans ce « Qui a peur de Vagina Wolf ? » suffisamment d’audace et de liberté pour combler les manques. Visuellement, la réalisatrice sait être
inventive et son style narratif oscillant presque constamment entre chronique quotidienne et comédie absurde relève le tout avec une sacrée énergie !































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samedi 15 février 2014

[Critique] Les grandes ondes (à l’ouest), de Lionel Baier



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Les grandes ondes (à
l’ouest)



de Lionel Baier



(Suisse, France, Portugal, 2013)



Sortie le 12 février 2014




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Mine de rien, le cinéaste helvète Lionel Baier trace depuis bientôt une dizaine d’années un parcours cinématographique passionnant et atypique. Après le très cul-te (et accessoirement gay) «
Garçon Stupide », il avait enchaîné avec deux comédies peu banales à l’humour sincère et décalé, autant dire un genre plutôt rare et bienvenue dans une production ciné qui se cantonne
généralement aux grosses comédies balourdes et opportunistes… Si « Comme des voleurs » proposait une fuite délirante et irrésistible d’un couple en Europe de l’Est (dont l’homme était incarné par
le cinéaste lui-même), « Un autre homme » offrait le portrait en noir et blanc d’un journaliste qui s’improvisait critique de cinéma par un jeu de circonstance, dans une atmosphère délicieusement
absurde…

« Les grandes ondes » s’inscrit dans un projet de tétralogie sur l’Europe que Baier avait initié avec « Comme des voleurs ». Ce dernier était sous-titré « à l’est » (les héros partant pour la
Pologne) alors que « Les grandes ondes » s’inscrit « à l’ouest », nous transportant dans le Portugal de 1974… Le réalisateur espère pouvoir illustrer le nord en Ecosse et le sud en Italie, avec à
chaque fois une tonalité s’inspirant des évènements historiques et politiques des pays visités.

Ce nouveau long métrage évoque le parcours sur les routes du Portugal en Combi VolksWagen de journalistes de la SSR (la Société Suisse de Radiodiffusion) cherchant vainement matière à illustrer
un reportage sur l’aide de la Suisse au Portugal… En chemin, les rencontres se multiplient et ils finissent par se retrouver en pleine Révolution des Œillets, insufflant au pays et à leurs
aventures un vent de liberté joyeusement débridé, entre partouze libertaire et enthousiasme populaire communicatif…

Le casting, composé notamment de Valérie Donzelli et Michel Vuillermoz, fait mouche pour incarner une équipe de bras cassés absolument irrésistibles… On s’amuse vraiment de leurs moult
mésaventures et on savoure la légèreté et la générosité douce amère qui émane d’un film sincère, bien écrit et aux portraits de personnages bien brossés ! Il y a même comme une nécessité de la
part de Lionel Baier d’ancrer sa comédie dans cette ambiance pleine d’espoir des années 70, histoire de contrebalancer avec le cynisme et l’état de marasme inquiétant du monde d’aujourd’hui :
"Nous avons cherché à être au plus près du sentiment de liberté et d’espoir qui régnait dans les années 60, 70. Il est plus que jamais important aujourd’hui de se souvenir d’où on vient et ce
qu’on a gagné en route. Pour ne pas voir notre nostalgie se teinter de brun… Quand la situation devient vraiment critique, il est temps de faire une comédie." Dont acte !































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vendredi 14 février 2014

[Jour de colère] Nymphomaniac : Cachez-moi ce Lars que je ne saurais voir…


lars_von_trier.jpegQu’un film sorte avec un visa d’exploitation
agrémenté d’une interdiction aux moins de 12, 16 ou 18 ans est une chose, certes, parfois discutable. Mais que ce visa soit modifié au cours de l’exploitation du film en salles par un tribunal,
suite à la plainte d’une association ultra-catho et conservatrice, est, il me semble, un peu inquiétant quant au climat réactionnaire qui ronge peu à peu notre société et la fait retourner
progressivement dans l’obscurantisme…

Si le système d’attribution des visas demeure très probablement imparfait et n’évite certainement pas la corruption par les studios les plus fortunés prêts à tout pour permettre à leurs films,
quel que soit leur degré de violence, d’être vus par le plus grand nombre, l’affaire « Nymphomaniac » révèle tout de même des aspects peu rassurants quant à la conception de progrès social ou
moral dans la France d’aujourd’hui… Il est vrai que la vraie fausse polémique autour du film de Lars von Trier à sa sortie n’était pas des plus subtiles et que sa façon de se « vendre » comme un
objet de pornographie « grand public » (ce qu’il n’est finalement en aucune façon !) relevait visiblement plus d’un opportuniste mercantilisme que d’un pur amour de l’art… « art » que glorifie
pourtant chaque image du long métrage, immense film d’auteur que l’on ne manquera pas de qualifier de chef-d’œuvre, même si ce n’est pas forcément le propos de ces quelques lignes de colère…

Il faut dire que l’association Promouvoir, à l’origine de la requête de révision du visa (rehaussant l’interdiction de 12 à 16 ans pour le volume 1 de « Nymphomaniac » et de 16 à 18 ans pour le
volume 2), n’en est pas à son coup d’essai. Association se targuant de faire la « promotion des valeurs judéo-chrétiennes, dans tous les domaines de la vie sociale », Promouvoir a déjà tenté
d’interdire « Antichrist » (un autre film de Lars von Trier, comme par hasard !) aux moins de 18 ans, en vain d’ailleurs, même si leur plainte avait fini par retarder la sortie du film dans les
salles… Ce groupuscule réputé homophobe et proche de l’extrême droite (ça fait envie, non ?) était à l’origine de la création de l’interdiction aux mineurs pour un film qui ne soit pas
pornographique, lors de l’affaire « Baise-moi », le film de Virginie Despentes qui avait tenu à peine quelques jours en salles avec une interdiction aux moins de 16 ans avant d’être retiré de
l’affiche, temporairement purement et simplement interdit… Sans compter que d’autres films encore ont fait les frais de Promouvoir, comme notamment le « Ken Park » de Larry Clark.

Sur le site internet de l’association, on trouve notamment ce texte mémorable : « La pornographie représente un danger capital pour la jeunesse. Elle déforme en effet de manière grossière et
racoleuse la réalité de l’union charnelle, en donne une image fausse, et peut aboutir au résultat exactement inverse de celui recherché par ceux qui s’y adonnent : l’impuissance amoureuse, avant
que la recherche de la violence ne vienne « compenser » ce phénomène dévastateur. Le caractère artificiel des relations qui en découle décourage un nombre croissant de jeunes gens, avec un dégoût
pour le sexe opposé qui conduit tout droit à l’homosexualité, masculine ou féminine, dont il est l’un des agents déclencheurs». Bon, ça, c’est juste pour vous les situer un peu mieux… bien qu’il
soit apparemment extrêmement difficile d’en savoir plus sur ce charmant collectif !

Pour en revenir à « Nymphomaniac », il est assez clair que la décision prise par le tribunal est tout bonnement inique et insultante pour la liberté. Les raisons exprimées  dans l’ordonnance
demeurent d’ailleurs assez souvent floues et fallacieuses, sujettes à une subjectivité extrême : "des scènes de sexe montrées avec un certain réalisme" (ça c’est « certain » !), "[le film] se
déroule dans un climat d'ensemble assez sombre" (sans blague ?), "l'utilisation de la sexualité à des fins de manipulation" (manipulation de qui ? pourquoi ?), "le film présente de nombreux gros
plans de sexes féminins et masculins, à l'état flaccide et en érection, notamment dans une scène évoquant la pédophilie pour l'une et le triolisme pour l'autre" (et voilà que la pédophilie et la
partouse sont mis sur le même plan, dans une société bien pensante où une sexualité libre ne peut pas être admise en dehors d’un schéma purement judéo-chrétien du couple marié)…

S’il faut très certainement admettre que le film de Lars von Trier ne s’adresse clairement pas à des mineurs (et ne les passionnera d’ailleurs guère pour la plupart), une interdiction au moins de
18 ans est un risque important dans son exploitation. Il se trouve que les salles qui programmaient le film ne l’on apparemment pas retiré de l’affiche pour autant, comprenant que les mineurs
n’étaient pas vraiment le public cible du long métrage. Cependant, une telle interdiction aurait pu être fatale à un film moins réputé, dont le nombre de copies aurait forcément été revu à la
baisse au regard d’un public potentiel forcément plus réduit… Mais la carrière d’un film ne se limitant largement plus, de nos jours, à sa distribution au cinéma, la question du devenir de «
Nymphomaniac » demeure bel et bien posée : quid, notamment, de ses futurs passages à la télévision, sachant que les films pour adultes ne peuvent y être diffusés qu’entre minuit et 5h du matin et
uniquement sur certaines chaînes accessibles par abonnement et permettant un système de verrouillage de leurs programmes afin d’éviter que des mineurs y aient accès…



A ne rater sous aucun prétexte :



- Nymphomaniac : Volume 1, de Lars von Trier



- Nymphomaniac : Volume 2, de Lars von Trier































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samedi 8 février 2014

[Jeu] Le Ciné-rébus # 34


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Réponse : Qui a tué Bambi ?



(qui - at - u - haie - banc - bee)



Trouvé par π



Jouez et gagnez plein de cadeaux avec Phil Siné : guettez la publication des jeux sur le blog, soyez le premier à donner la bonne réponse en commentaire et accumulez un maximum
de points afin de choisir le lot que vous convoitez parmi la liste mentionnée un peu plus bas…



Règle du « Ciné-Rébus » : Déchiffrez le titre d’un film dans le rébus ci-dessus et gagnez un point si vous parvenez à être le premier à donner la bonne réponse en commentaire !



A partir de 3 points cumulés, vous pourrez choisir un cadeau parmi les suivants en en faisant la demande à 3615philsine@free.fr :
- 1 badge collector « I [love] Phil Siné » (3 points)
- 1 badge collector « I [star] Phil Siné » (3 points)
- 1 lot des 2 badges collector (4 points)
- DVD « The calling » de Richard Caesar (3 points)
- DVD  "Karaté Dog", de Bob Clark (5 points)
- DVD « Tropical Malady », d’Apichatpong Weerasethakul (5
points)
- 1 TV écran plasma 100 cm (1000 points)
- 1 voyage pour 2 personnes à Hollywood (1300 points)
- DVD « Sugarland Express » de Steven Spielberg (6 points)
- DVD « Le candidat » de Niels Arestrup (5 points)
- DVD "Killing Sharks" de Pat Corbitt et Gary J.
Tunnicliffe
(5 points)
- DVD "Jack Frost" de Michael Cooney (5 points)
- Coffret DVD Série "Le Caméléon" Saison 1 : épisodes 1 à 11 (8 points)
- DVD L’avion de l’Apocalypse, d’Umberto Lenzi (5 points)
- DVD Monster Brawl, de Jesse T. Cook (5 points)
- DVD Subwave, d'Anton Megerdichev (5 points)



Scores actuels :



π : 10 points
MaxLaMenace_89 : 7 points
Cachou : 6 points
Titoune : 4 points
Foxart : 4 points
Docratix : 2 points
Papa Tango Charlie : 2 points



Adèle de Saint-O : 2 points



Mister Loup : 2 points



Bruce Kraft : 1 point
Niko (de CinéManga) : 1 point
Squizzz : 1 point
FredMJG : 1 point
Marc Shift : 1 point
Cinédingue : 1 point



Maitre Savalle : 1 point



Dom : 1 point



Ronnie : 1 point



Stanley Schnitzler : 1 point



Romainst : 1 point



Zo : 1 point



Didi : 1 point



 



Bonne chance à toutes et à tous !































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jeudi 6 février 2014

[Critique] Gerontophilia, de Bruce LaBruce



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Gerontophilia



de Bruce LaBruce



(Canada, 2013)



Sortie le 26 mars 2014




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Quand le réalisateur Bruce LaBruce décide de délaisser son univers underground habituel (« Hustler White », « Otto », « L.A. Zombie »…) pour se lancer dans le cinéma « mainstream », on ne peut pas dire qu’il le fasse
avec un sujet tout à fait discret : il y aborde rien de moins que le thème de la gérontophilie, laissant d’emblée présager que son film ne sera en rien un film banal ou édulcoré, comme le tout
venant de la production « grand public »…

« Gerontophilia » raconte ainsi un moment de la vie de Lake, jeune homme de tout juste 18 ans, vivant chez une mère un peu volage et sortant avec une fille de son âge, et découvrant
progressivement son attirance pour les vieux messieurs, lorsqu’il commence un job d’été à leur contact dans une maison de retraite… Il deviendra plus particulièrement proche de l’un d’eux, M.
Peabody, avec qui il va vivre une véritable histoire d’amour.

Toute la gageure – et le talent ! – de Bruce LaBruce est de surfer entre une utilisation assez étonnante des codes du film « mainstream », sur le mode je raconte une bluette amoureuse façon «
teenage movie » avec toutes les étapes que cela exige (rencontre, drague, obstacles, fuite en avant, jalousie…), et tout un ensemble de passages borderline où l’âme indécrottable et perverse du
cinéaste se révèle avec évidence… Si la pornographie est absente du film, par exemple, elle se révèle néanmoins parfois insidieusement dans la mise en scène : gros plan sur le visage de plaisir
du jeune homme alors qu’il se masturbe devant le vieillard endormi, présence nonchalante d’une capote oubliée dans les draps… etc.

Il y a en outre une forme d’ironie comique dans la façon dont LaBruce nous décrit cette histoire d’amour, qu’il souhaiterait visiblement nous présenter comme parfaitement banale : les scènes de
jalousie de Lake à l’égard de son vieil amant qu’il surprend à parler à d’autres jeunes hommes sont notamment particulièrement piquantes… Mais en plus d’être tout à fait distrayant et sincère, «
Gerontophilia » interroge autant le cinéma dans ses représentations formelles que la société dans les regards qu’elle porte encore sur des sexualités minoritaires, faisant une nouvelle fois du
cinéma de Bruce LaBruce quelque chose de parfaitement atypique et passionnant ! Révélant qui plus est ici un très jeune acteur tout à fait charmant et aux choix pour le moins audacieux :
Pier-Gabriel Lajoie, que nous suivrons donc désormais avec beaucoup d’attention…



Autres films de Bruce LaBruce :



L.A. Zombie (2010)



Otto (2008)































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mardi 4 février 2014

[Critique] Nymphomaniac : Volume 2, de Lars von Trier



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Nymphomaniac : Volume
2



de Lars von Trier



(Danemark, 2013)



Sortie le 29 janvier 2014




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On s’est déjà extasié sur le premier « volume » de « Nymphomaniac » et l’on
s’extasiera peut-être encore d’avantage lorsque le film sera proposé dans sa version intégrale de 5h30, alors tâchons de ne pas trop nous étendre pour glorifier comme il se doit la deuxième
partie de ce chef-d’œuvre pur dans sa version actuelle… Autant ainsi le dire d’emblée : cette suite (et fin temporaire) du nouveau film de Lars von Trier tient toutes ses promesses et s’enfonce
même encore plus loin – c’est le cas de le dire ! – dans l’analyse et l’exploration des désirs humains…

A travers le portrait de Joe (plus incarnée que jamais par Charlotte Gainsbourg pour ce volume 2), il offre à voir le parcours sublimé dans l’expérience de la vie à travers les plaisirs de la
chair d’une « paria du sexe », comme le personnage se qualifiera lui-même dans cette psychanalyse passionnante aux allures de dialogue philosophique brillamment construit et archi-référencé, mais
aussi drôle et espiègle comme le cinéaste sait le faire, se jouant de nous tout en nous hypnotisant, jusqu’à un finale rigolard qui nous laisse imaginer la mine amusée de l’ami Lars lorsqu’il l’a
mis en boîte…

Abreuvé de références à l’art, à la religion ou au divertissement populaire (on nous parle même de James Bond !), « Nymphomaniac 2 » est un gouffre de fascination, aussi attirant qu’il peut être
inconfortable… Le film exploite toute la panoplie des expérimentations sexuelles, l’héroïne cherchant bien à tout tester, presque incapable de trouver des limites à l’ardeur de ses désirs :
partouze (certes inaboutie, sans doute à cause de la difficulté pragmatique de jouir à plusieurs dans des rapports hétérosexuels), sadomasochisme (via des scènes incroyables avec un Jamie Bell
des plus surprenant), lesbianisme… jusqu’à des moments « limites », lorsque par exemple Joe délaisse son enfant poussée par l’appel du plaisir (qui est d’ailleurs un plaisir à travers la
souffrance pour le coup !), ou lorsqu’une scène parvient à faire passer un pédophile « non pratiquant » pour un héros, dans la mesure où il a réussi à refouler la force de son désir sa vie
durant…

Furieusement mis en scène et fascinant de bout en bout, « Nymphomaniac » se permet même quelques affèteries plaisantes. Lars von Trier se laisse par exemple aller à une ou deux autoréférences
discrètes, rappelant à nos mémoires son œuvres passées : si on avait cru apercevoir un plan furtif de l’entrée de « L’hôpital et ses fantômes » en stock-shot dans la première partie, on trouve
dans ce second épisode une séquence rappelant étrangement le début d’« Antichrist », lorsque l’enfant sorti de son lit à barreau s’approche dangereusement du rebord du balcon… et puis rien que
pour entendre la divine Charlotte Gainsbourg interpréter « Hey Joe » sur le générique de fin, cet incroyable « film monument » n’en vaut-il pas largement
la chandelle ? Assurément, vous dis-je…



Autres films de Lars von Trier :



Dancer in the dark (2000)



Melancholia (2011)



Nymphomaniac : Volume 1 (2013)































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dimanche 2 février 2014

[Critique] RoboCop, de Paul Verhoeven



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RoboCop



de Paul Verhoeven



(Etats-Unis, 1987)



Le Jour du Saigneur # 136




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« C'est l'histoire d'une chenille qui se souvient avoir été un papillon » : c’est par ce mystérieux aphorisme que Paul Verhoeven a décrit un jour son « super héros » RoboCop. Veut-il expliquer
par là le débat philosophique entre la part d’humain et la part de machine qui sert de fil rouge à l’évolution du personnage au cours du film ? Peu importe, puisque cette perspective d’analyse
est de toute façon passionnante…

« RoboCop » se passe dans un futur indéterminé, aux Etats-Unis. Le cinéaste hollandais, qui a toujours cherché à filouter Hollywood en y réalisant des films bien plus complexes et subversifs
qu’ils en avaient l’air, y décrit une société américaine atrocement ultra violente, où les crimes sont banalisés à outrance et où les criminels commettent leurs forfaits le plus souvent
gratuitement, jour_du_saigneur_bis.jpgquand ce n’est pas par pure jouissance ! Cette banalisation visionnaire de la violence, en cette fin des années 80,
Verhoeven la fait passer notamment par une télévision inconsciente et aseptisée, dans laquelle on voit des journalistes de JT égrainer les pires abominations le sourire aux lèvres ou des
publicités pour un jeu de société guerrier et anxiogène dont le slogan est « tuer avant d’être tué »…

Slogan qui pourrait d’ailleurs parfaitement s’adapter à la vision futuriste du monde offerte par « RoboCop », dans laquelle les notions de justice, de respect de la loi deviennent de plus en plus
réactionnaires et où le spectacle de la mort semble célébré sans le moindre respect de la valeur des vies humaines… C’est dans cette société décrite avec une profonde ironie que le « bien public
» semble de plus en plus perverti, en se retrouvant par exemple cédé par l’Etat au profit d’intérêts financiers privés. La société commerciale OCP se retrouve ainsi à la tête des forces de police
publiques et crée le programme « RoboCop », consistant à récupérer le cadavre d’un policier parmi les meilleurs (ceux-ci ont justement été placé judicieusement et cyniquement dans les zones les
plus à risque pour accélérer la mort de l’un d’entre eux) pour le transformer en robot, en ne récupérant que son cerveau. Après une exécution abominable par des malfrats, Alex Murphy (incarné à
l’écran par Peter Weller) devient alors RoboCop !

Répondant à des directives simples (protéger les innocents, faire respecter la loi… et même une autre qui restera d’abord secrète), le nouvel agent va alors multiplier les actions et rétablir
l’ordre dans son secteur. Le film enchaîne ainsi des séquences d’une effroyable efficacité (encore aujourd’hui !) et d’une violence inouïe à un rythme soutenu, créant alors un incroyable pouvoir
de fascination, ce que recherche très probablement et très justement le réalisateur… La mise à mort de Murphy (main qui explose, bras arraché…) est à ce titre une scène d’anthologie ! On citera
également des corps mis en charpie par des mitraillettes, une balle en plein dans des parties génitales, le pic rétractable de RoboCop (lui servant normalement à se connecter à un ordinateur)
s’enfonçant dans une gorge, un « méchant » à la peau « fondue » par l’acide venant s’exploser littéralement sur le pare-brise d’une voiture, etc.

Mais outre une dénonciation outrancière de la violence grandissante de nos civilisations, le film procède aussi à un habile discours sur la « robotisation » de l’humanité. Si de nombreux
personnages, arrogants ou cyniques en diable, semblent avoir perdu toute notion de conscience, on assiste au parcours intérieur difficile et magnifique, émaillé parfois de contradictions quasi
métaphysiques, du personnage de RoboCop / Murphy, qui d’humain est devenu machine, mais dont l’humanité est si grande et si forte que de machine il redeviendra humain… Si son fils l’admirait pour
sa capacité à imiter le mouvement de pistolet du robot héros de sa série télévisée préférée, c’est justement (et paradoxalement) par ce geste que son ancienne partenaire reconnaît en lui son
identité humaine ou qu’il se remémore les souvenirs affectifs de sa vie passée, avec sa femme et son enfant. Il redevient alors sensible comme un homme tout en conservant les capacités de la
machine : est-il alors, enfermé sous des couches d’acier invincibles, le dernier espoir pour l’humanité ? Son identité purement humaine ne fait en tout cas plus aucun doute lorsqu’il répond très
clairement à une question l’invitant à décliner son nom : « Je m’appelle Murphy ! » C’est peut-être alors la victoire de l’homme sur la machine et le début du réveil des consciences endormies
auquel veut nous amener Paul Verhoeven… Derrière le masque de la violence éperdue, le cinéaste cache ainsi dans son film des couches bien plus fines et intelligentes !



Perspective :



- Total recall, de Paul Verhoeven































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