Exposition du 10 avril au 4 août 2013
A la Cinémathèque française (Paris)
Infos sur le site de la Cinémathèque
En pénétrant dans l’exposition consacrée au cinéaste à la Cinémathèque française, c’est à dire en pénétrant dans le monde merveilleux et « en chanté » – comme il le qualifiait lui-même – de
Jacques Demy, on entre forcément dans un univers unique et coloré, où le rêve le dispute à l’enchantement… Il faut dire que les grandes thématiques du cinéma de Demy s’y prêtent à merveille,
qu’il s’agisse de l’amour, de la recherche d’un idéal ou du déploiement de l’imaginaire. La forme de tous ses films relève d’ailleurs de l’illusion et du fantastique, depuis ses long métrages
intégralement « chantés », comme un « réenchantement » du quotidien des personnages d’ailleurs plutôt terne et mélancolique (« Les parapluies de Cherbourg », « Une chambre en ville »), jusqu’à
l’adaptation de contes (« Peau d’âne », « Le joueur de flûte ») ou même de manga japonais localisé dans la France du 18e siècle (« Lady Oscar »). Si ses films paraissent parfois improbables sur
le papier, c’est tout simplement que l’imaginaire du cinéaste demeurait finalement sans limite !
Si une large part des salles d’exposition reste dédiée assez logiquement aux trois joyaux de la filmographie de Demy (« Les parapluies de Cherbourg », « Les demoiselles de Rochefort », « Peau
d’âne »), ses autres œuvres, pas systématiquement à la hauteur de leurs ambitions mais toujours follement imaginatives et stimulantes, sont heureusement bien représentées et s’intègrent
parfaitement à la scénographie plutôt vivante et bien pensée des lieux… On traverse ainsi les décors de certains films, reconstitués pour l’occasion, ou l’on passe devant de nombreuses
tapisseries tape-à-l’œil et colorées, répliques exactes de ces excès de kitsch qui caractérisent assez bien le style même du réalisateur. Au gré de nos pérégrinations dans ces espaces
indémodables et chargés en souvenirs de spectateurs, on peut alors observer divers objets, divers documents de tournage précieux (castings envisagés, scénarios annotés, lettres…), de nombreuses
photos de plateaux (découvrir Jeanne Moreau de « La baie des anges » en couleurs est notamment un pur plaisir…), ou encore des costumes (on reste bien sûr subjugué devant les robes couleur du
temps, de Lune et du soleil de « Peau d’âne », recrées pour l’occasion (les vraies ont été perdues ou décousues-recousues pour d’autres films dans d’obscures réserves d’habits de cinéma), mais
aussi devant la fameuse « peau d’âne » de Catherine Deneuve, qui elle est authentique !) Divers écrans diffusent également en boucle extraits de films et témoignages, qui participent à ce voyage
nostalgique : on reste très ému de découvrir Jacques Demy dirigeant toujours joyeusement ses comédiens sur les plateaux, ou bien par cet étonnant aveu d’Harrison Ford, dans la salle consacrée à
la mitigée aventure américaine (avec « Model Shop »), qui déclare presque devoir toute sa carrière à Demy !
On ressort de l’expo littéralement émerveillé et « enchanté » - du moins si l’on adhère aux œuvres du cinéaste -, peut-être « trop », pourrait-on dire, tant tout ce déballage finit assez
logiquement par sembler factice et débordant de guimauve… Depuis cette enfance idéalisée et forcément cinéphile du futur réalisateur (quasiment mythifiée par Agnès Varda dans son « Jacquot de
Nantes »), l’exposition demeure très discrète, pour ne pas dire secrète, sur la véritable vie de Jacques Demy, qu’il serait pourtant très intéressant un jour de mettre en perspective et en
résonance avec son œuvre ! Son existence risque néanmoins de continuer de ressembler à un pur conte de fées aux yeux du grand public tant que sa famille (Agnès et Rosalie Varda, Mathieu Demy…)
continuera d’être pleinement associée à ce type de projets…
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