vendredi 17 février 2012

[Critique] Martha Marcy May Marlene, de Sean Durkin



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Martha
Marcy May Marlene, de Sean Durkin



(Etats-Unis, 2011)



Sortie le 29 février 2012



Note :
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Pour son premier film long, Sean Durkin souhaitait aborder le thème des sectes, pour lequel il éprouve une forte fascination. Mais il voulait à tout prix s’éloigner des clichés habituels, ce
qu’il parvient assez bien à faire avec cette histoire de jeune fille (époustouflante Elizabeth Olsen) qui vient de fuir une « communauté » et tâche de reprendre contact avec une forme de «
normalité sociale » en se réfugiant chez sa sœur et son mari, qu’elle n’a pas revu depuis sa disparition quelques années plus tôt…

Le phénomène sectaire est effectivement abordé avec une subtilité visible, dans la mesure où la communauté dans laquelle vivait la jeune fille nous est présentée dans un premier temps comme
relativement positive et attractive, avec ce retour à la nature et à la simplicité, avant de sombrer peu à peu dans une violence de plus en plus insidieuse et sournoise… Le rite de « nettoyage »
dans un premier temps, véritable viol presque considéré comme une purification ou une renaissance, puis des choses de plus en plus douteuses, jusqu’à ce point de non-retour qu’est le meurtre,
interprété par le gourou charismatique comme l’acte d’amour suprême !

Il s’agit bien sûr du principe premier des sectes que d’être a priori séduisantes avant de révéler leur véritable nature très discutable, mais le réalisateur a l’intelligence de ne pas bêtement
opposer la communauté au monde « normal », dit civilisé, qui serait de son côté la bonne voie à suivre… Un échange entre la jeune femme et son beau-frère permet notamment de faire vaciller
certaines certitudes de ce dernier quant au bien fondé de son mode de vie entièrement basé sur le matérialisme.

Tout cela est déjà passionnant, et pourtant le véritable sujet de « Martha Marcy May Marlene » réside peut-être encore plus dans son titre même : cette accumulation de prénoms désigne les
diverses appellations du personnage principal dans le monde « normal » et dans la communauté… Perdue entre ces multiples personnalités, c’est à une interprétation parfaitement skyzophrénique que
l’on est tenté de se livrer sur cette jeune personne, complètement égarée entre plusieurs niveaux de réalité… ou d’irréalité ! On admirera alors la mise en scène de Durkin, capable de nous faire
aller et venir entre le passé dans la communauté – les souvenirs de Marcy May – et le présent de Martha chez sa sœur avec une extraordinaire subtilité : on passe d’un temps à l’autre, d’un lieu à
l’autre, d’une scène à l’autre, souvent dans un seul et même plan avec une force percutante et bien souvent un état d’angoisse intense !

Le film a alors tendance à verser à diverses reprises dans une atmosphère presque horrifique, à mesure que la jeune femme semble complètement perdre pied : est-elle en train de devenir
parfaitement paranoïaque ou les membres de la communauté ont-ils vraiment retrouvé sa trace ? Alors que l’on est prêt à tout voir advenir à l’écran, peut-être même le double meurtre de sa sœur et
son beau-frère par une Martha prise d’un nouveau coup de folie, ne comptez cependant pas sur la fin – abrupte et frustrante – de « Martha Marcy May Marlene » pour vous expliciter quoi que ce
soit… Au risque de décevoir son spectateur, Sean Durkin opte pour une interprétation libre et peu rassurante de son long métrage, en appelant ainsi à l’intelligence de son public…



 



 Martha Marcy May Marlene sur Allociné































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6 commentaires:

  1. Moi j'ai beaucoup aimé cette fin ouverte.
    Un film très attachant porté par une belle mise en scène et une douce lumière.
    A découvrir.

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  2. Je me demande si cette fin révèle quelle partie de nous est prégnante: celle optimiste ou celle pessimiste. Parce que j'ai opté pour la solution pessimiste (en même temps, je ne vois pas comment
    il pourrait en être autrement avec ce qu'on découvre dans le dernier flash-back...). Beau film, étrange. Mais que je n'ai, encore une fois, pas autant aimé que ce à quoi je m'attendais.

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  3. Rien ne m'avait préparé à cette plongée angoissante dans le monde d'une secte sans nom, si ce n'est ce titre étrange que je dus prononcer au guichet de mon cinéma préféré. La réussite est à mon
    sens à la hauteur du sujet qui, en effet, ne se complait jamais dans le travers de la stigmatisation à sens unique. Sa structure en montage parallèle aurait pu laisser craindre le pire, mais
    Durkin l'emploie intelligemment au service du thriller. La mise en scène épurée est symptomatique de ce cinéma d'auteur à l'américaine, parfaite en efficace. Elizabeth Olsen est une vraie
    révélation. Une étoile de plus sur mon tableau d'honneur.

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  4. Un bon film mais le "calvaire" reste peu violent et retire toute émotion... Dommage sinon ca reste un beau film... 2/4

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  5. Un film que j'ai vraiment beaucoup aimé, l'histoire est prenante, la mise en scène est soignée et les acteurs sont à la hauteur. Qui plus est, le film interpelle, à l’image de cette séquence
    finale particulièrement réussie. J'envisage moi aussi une issue négative mais qu'importe, ça n'enlève rien à la beauté du film.


    Ce que j'ai bien aimé, c'est que le film n'imposait pas une façon de voir les choses mais laissait au spectateur le soin de se forger sa propre opinion. C'est ce qui rend le film intéressant, on
    est captivé par ce qui a pu amener Martha à se comporter ainsi et on rassemble progressivement les pièces du puzzle. Mention spéciale à Elizabeth Olsen qui signe une très belle performance !

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  6. oui un film troublant et ambigu, c'est pas si courant ! :)

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